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    Conférence d’Amaury Guitard au château de la Chardière…

     

    Chemins secrets avait déjà annoncé il y a quelques jours la conférence et la sortie du livre de l’ami Amaury à l’occasion des journées du patrimoine.

    Ces samedi 15 et dimanche 16 septembre, c’est dans le cadre enchanteur du château de la Chardière en Chavagnes-en-Paillers qu’Amaury s’est livré au difficile mais passionnant métier de conférencier. Exercice réussi avec brio et je ne résiste pas à l’envie de vous en diffuser une vidéo. L’histoire de la Vendée a besoin de sang neuf afin d’assurer son avenir et il est particulièrement roboratif de voir qu’en ce domaine, la jeunesse ne boude ni les archives ni la littérature.

    RL

    Septembre 2018

     


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    Bouillé-Loretz...

     

     

    Il est assez inhabituel de voir des combattants vendéens dans l’extrême Nord-Est des Deux-Sèvres et c’est pourquoi j’ai choisi de parler de cette petite affaire qui eu lieu le 21 juillet 1794. On sait que les Vendéens ont en projet d’attaquer Thouars au cours de l’été qui suit le passage des colonnes infernales. Le combat de Noirlieu (1) s’inscrit dans cette logique et sans doute y a-t-il eu lieu quelques essais de reconnaissance par le Nord de Thouars, qui pourraient expliquer cette présence de « brigands » dans cette contrée pourtant largement acquise à la république.

    Déjà le 19 juillet, Grignon sent bien que sa position à Thouars n’est pas assurée. Ainsi, écrit-il à Vimeux la lettre suivante (2)

    « Du 19 juillet. Le général Grignon, au général Vimeux. (Thouars.)

    Je n’ai que sept cents hommes armés ; il me faudrait au moins deux mille hommes pour seconder et protéger les opérations de la commission d’agriculture et des arts ; cependant je ferai tout ce qui dépendra de moi pour cela. »

    Puis deux jours plus tard, c’est Caffin qui fait un rapport à Vimeux. Visiblement, les Vendéens sont passés au Nord de Thouars (3) :

    « Avis que les brigands se portent du côté de Bouillé Lorette (Bouillé-Loretz). Reconnaissance de cavalerie qui se porte à Sarcey (Cersay) où l’on a trouvé 3 habitans assassinés. Elle va à Bouillé St Paul et à Massé (Massais) sans rien découvrir. »

    Reste à savoir qui étaient ces « brigands » en balade quelque part entre l’Argenton et Montreuil-Bellay.

    A suivre…

    RL

    Septembre 2018

     

     

    Notes :

     

    (1)  J’ai mis en lien hypertexte l’histoire de ce combat avec un article que je souhaite compléter et augmenter depuis déjà longtemps, sans pour autant parvenir à m’y résoudre de manière définitive.

    (2)  Savary, tome IV, p. 35.

    (3)  SHD B 5/9-91, v. 21/21, bulletin analytique seul renvoyant au registre du « Tableau des opérations de l’Armée de l’Ouest » : SHD B 5/10-1, 5ème tableau, Caffin, p. 36, v. 21/26.

     

     

    Bouillé-Loretz....


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    Souvenirs du combat du Mortais...

     

     

     C'est à nouveau aux Brouzils que notre promenade nous conduit, sur les pas de Charette, cette fois.

     Le 12 janvier 1794, Charette, avec 1 200 hommes attaque la colonne du lieutenant-colonel Joba qui l'a défait la veille à Saint-Fulgent. Le combat fut un moment indécis, jusqu'à ce que la cavalerie de Joba mette la déroute dans le camp des vendéens. Charette est blessé au bras non loin du village du Mortier (ou Mortais). La panique s'étant mise dans les troupes royalistes, Joly brûlera la cervelle d'un officier qui criait "sauve qui peut". La troupe se retirera vers le Nord, en direction de Saint-Christophe-la-Chartreuse (dont nous avons déjà parlé) et l'abbaye du Val-de-Morière où Charette ira se faire soigner et séjournera deux semaines. Les villages alentour sont tous incendiés, sauf celui de Malville, lieu d'habitation d'un guide des armées républicaines (source, revue du Bas-Poitou et des Provinces de l'Ouest). L'histoire ne dit pas ce que ses voisins, dont les maisons avaient brûlé, lui ont réservé comme sort...

     

     L'un des trois moulins des Landes de Corbejaud de l'époque (il en reste deux, dont un entier):

     

     

    Souvenirs du combat du Mortais....

     

           La stèle de l'Ouche des Landes, lieu de sépulture des soldats des deux camps, avec une plaque de l'association de Sauvegarde du Patrimoine Brouzilien.

     

    Souvenirs du combat du Mortais....

    Souvenirs du combat du Mortais....

    Souvenirs du combat du Mortais....

     

     La croix de l'Oliverie, village renommé la Pierre-Plate en 1936, lieu où Charette fut blessé. Cette croix se trouvait à l'origine au village du Chiron.

     

     

    Souvenirs du combat du Mortais....

    Souvenirs du combat du Mortais....

    Souvenirs du combat du Mortais....

     

      La fameuse "Pierre plate" qui  selon une vieille légende, se serait envolée depuis le Pont de Sénard à Saint-Hilaire-de-Loulay suite à un pari du Diable et qui aurait atterri ici, sur cette ancienne route conduisant à Nantes.

     

     

    Souvenirs du combat du Mortais....

     

     Une autre plaque à la mémoire du combat du 12 janvier 1794 existe en face de l'église des Brouzils.

     

     

     RL

     Février 2014

     

    Cet article est mis à jour grâce à un lecteur de « Chemins secrets » qui s’est penché sur la localisation précise du lieu du combat et de celui de l’inhumation des victimes.

    Tout d’abord, voyons le récit que fait Jehan de la Chesnaye à propos du Combat du Mortais (1) :

    « Le 25 nivôse (12 janvier 1794), Joba, qui occupait les Brouzils, fut attaqué par les 1200 hommes de Charette. Après quatre heures de combat, les Brigands se retirent à Grasla, puis délogés de la forêt, à travers champs, les Vendéens gagnent « le Mortais » non sans se défendre opiniâtrement sur ce plateau qui s’étend du village de la Sauvetrière, jusqu’au-delà des landes de Lallier et présente une légère déclivité au fond de laquelle coule un ruisselet, le Tail. La brande, les ajoncs, les genêts, les nombreux boqueteaux offrent un asile sûr, une retraite quasi inexpugnable. Les deux troupes ennemies se heurtent en ligne dans les Landes de Corbejeau où s’élève un moulin à vent.

    De part et d’autre les pertes sont sérieuses, mais les Vendéens reculent. La cavalerie de Joba charge les fugitifs et tue ou fait prisonniers un grand nombre d’entre eux. Pendant que Charette fuit par le long du chemin de la Pierre-Plate, un détachement de Bleus suivant le sentier qui mène à l’Atrie aux landes Violton et de Lallier détruit tout sur son passage. La convention, en effet, pour vaincre la révolte a décrété l’incendie méthodique de la Vendée et l’égorgement de ses habitants : « Nous venon de resevoire de la Convantion, écrit un Bleu, un ordre qui est bien triste qui est de parquourire toute la Vendée et des gorge touse que nous trouverons homme, famme, enfan, sependant seuze qui ne son pas vraiman brigan, on le choi de suivre larmée et de conduire touse a Nantes juqu’ase que la Vandée soit fini et même les bestiau. » (Ed. Lockroy, Une mission en Vendée en 1793, p. 313) (2).

    La Sauvetrière, la Bonninière sont incendiées ; seule Maleville doit à un de ses habitants, guide des armées républicaines, d’être épargnée : « C’est mon village que se dresse là-bas de l’autre côté du Tail, ne le brûlez pas ! » Et Malville ne fut pas la proie des flammes. Pendant qu’une immense lueur d’un rouge sinistre éclaire cette froide nuit de janvier dont le silence est troublé par le crépitement de la fusillade, les campagnards effrayés abandonnent, avec leurs familles la maison que demain ils trouveront incendiée.

    Ils se sauvent dans la direction de l’Est vers les landes Violton et de Lallier où l’épais fourré les cache aux regards des Bleus. Femmes et enfants fuient protégés dans leur retraite par les Chouans « égapliés » le long des haies d’où ils visent sûrement leurs ennemis et manquent rarement leur but. De nouveau, brigands et républicains se heurtent face à face dans le triangle formé par les landes de la Herse, en face de la Bonninière qui fume étrangement. Des cadavres sont encore semés sur la lande, marquant aussi jusqu’aux bruyères de Lallier le passage des frères ennemis.

    Là-bas, dans la brande, les fugitifs se sont glissés au plus épais du fourré, et, blottis contre terre, les enfants, les femmes frémissent quand les balles fauchent au-dessus de leurs têtes les grands genêts et les ajoncs presque séculaires. S’aventurer dans ce véritable maquis serait téméraire de la part des soldats de la République. Ce serait courir à une mort certaine, aussi se replient-ils sur le gros du détachement qui vient d’incendier la tuilerie des Bonnins, près de la Pierre-Plate.

    Le lendemain au jour, quand le bruit lointain de la fusillade indique que les Bleus ont quitté les parages du Mortais, les réfugiés des landes de Lallier, revenant vers leurs villages encore fumants, ramassent les malheureuses victimes pour les inhumer, car, chez le Vendéen, le respect de la mort s’étend toujours à l’ennemi. Et si pendant le cours de la guerre, il y eut d’affreuses mutilations, on peut assurer qu’elles furent commises par des brutes aveugles et à l’insu des grands chefs. La fusillade de la Herse avait coûté la vie à une cinquantaine de Blancs et Bleus. Fraternellement unis dans la mort, on étendit leurs corps sur du bois en « relaïe », attendant le moment où ils devaient être inhumés dans la cheintre du champ de la Pointe, à une centaine de mètres plus loin. Le sang, qui découlait de leurs blessures s’étant mélangé à l’eau stagnante du sentier formait une grande flaque rougie, dont le souvenir, cinquante ans plus tard, faisait frémir les témoins oculaires de cette scène : « Ils avaient, disaient-ils, du sang jusqu’à la cheville ! »

    Maintenant, par le grand chemin de la Copechagnière à L’Herbergement, la cavalerie de Joba retardée par les ornières poursuit Charette et ses partisans que les bois touffus et les vastes landes des Dols protègent sûrement. Puis, suivant l’ancienne voie romaine qui allait du Petit-Luc à Durinum (Saint-Georges de Montaigu) les Vendéens atteignent les Forges et de là se dirigent par Saint-Christophe sur Grammont et Legé, toujours fuyant Joba. »

    Situation sur cadastre de 1838 des AD85. Tableau d’assemblage de la section P (3P 038 CE 016) :

    Souvenirs du combat du Mortais....

    En consultant avec mon lecteur les matrices cadastrales, nous n’avons pas trouvé le « Champ de la Pointe » mais celui où se trouve de nos jours la stèle commémorative et n’a pas changé de forme entre 1838 et aujourd’hui. De plus nous avons par les matrices que les « Landes de la Herse » correspondent aux parcelles N°64 à 68, 47 à 50 et 7 à 8 de la section P10 du cadastre de 1838 ainsi qu’aux numéros 9 à 11 et 14 à 16.

    Situation générale sur l’IGN de Géoportail :

    Souvenirs du combat du Mortais....

    Le cadastre de 1838 avec l’emplacement du « Champ de la Pointe » colorisé en jaune (AD85, 3P 038 AD 060). On peut voir que vers le Sud, le chemin à changé de place mais curieusement pas au niveau du lieu où se trouve aujourd'hui la stèle :

    Souvenirs du combat du Mortais....

    Retour à l’IGN avec la légende suivante :

    Intérieur du cercle bleu : zone probable du combat.

    Triangle rose : le supposé « Champ de la Pointe » où sont enterrées les victimes.

    Croix rouge : lieu où Charette fut blessé, de nos jours marqué par la croix vue en photo plus haut.

    Souvenirs du combat du Mortais....

     

    Les matrices cadastrales nous apprennent bien d’autres mystères. Ainsi de curieux noms de parcelles comme le « Champ de la Messe » près de Malville (N° 379 de la section P2) ou le « Pâtis au Prêtre », dans les Landes de Corbejaud (N°45 de la section P6). Que s’est-il passé dans ce petit coin entre les Brouzils et l’Herbergement ?

     

    RL

    Septembre 2018

     

     

     

     

    Notes :

    (1)  « L’Hébergement-Enthier et la seigneurie du Bois-Chollet », Vannes 1905 (extrait de la Revue du Bas-Poitou), p. 51 à 53.

    (2)  Ouvrage paru en 1893.

     

     

     


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    Nouveau livre d’Amaury Guitard…

     

     

    À l'occasion de la rentrée littéraire... Mon nouvel ouvrage, à découvrir à partir du 15 Septembre. (Résumé) « L'histoire de la guerre de Vendée est une histoire sombre et haute en couleurs à la fois. Avec ce livre, j'ai voulu retracer de manière simple et accessible la flamboyante épopée des Vendéens de 1793, en marchant dans le sillage de ceux que Napoléon Bonaparte qualifiait lui-même de " peuple de Géants". Grâce à différents documents d'archives collectés au fil du temps j'ai voulu me plonger dans cette époque trouble et troublée de l'histoire de France : la plus grande des guerres civiles françaises, et son effroyable répression par la Terreur révolutionnaire. Bien que les chiffres varient, on peut objectivement considérer que plus de deux-cents mille personnes, parmi lesquelles hommes, femmes et enfants, ont trouvé la mort au cours de ces atroces événements, décimant une grande partie de la population vendéenne. Terrible duel fratricide entre deux parties d'un seul et même peuple, uni au sein d'une même Nation. En remontant aux sources originales, j'ai voulu en comprendre les mécanismes essentiels, mais aussi les principaux enjeux qui, chacun à leur façon, ont façonné avec le temps l'identité singulière de la Vendée d'aujourd'hui. »

     

     

    Le livre est disponible en précommande chez Pays & Terroirs en cliquant sur l’image.

     

     

    Communiqué d'Amaury Guitard...


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    La Chapelle-Saint-Laurent, Largeasse, insurrection contre les impôts en 1798…

     

     

    Le temps m’avait manqué jusqu’ici pour vous présenter les documents qui vont suivre. Je connaissais leur existence aux archives départementales des Deux-Sèvres, il fallait juste les compulser de nouveau et les analyser un peu.

    Nous voici au lendemain du coup d’état du 18 fructidor de l’an V (4 septembre 1797) et les persécutions reprennent de plus belle contre la religion catholique, ainsi que les vexations qui amèneront le nouveau soulèvement de 1799. Dans le petit coin qui nous intéresse, le port d’armes est interdit depuis le 21 février 1798 et Pierre Maupillier, oncle du Jacques Maupillier de Boismé devient « président de l’administration municipale » de la Chapelle-Saint-Laurent le 25 mars.      Il le sera jusqu’en 1800.

    La révolte commence à gronder une nouvelle fois, et dans le canton de la Chapelle-Saint-Laurent plus particulièrement contre les impôts. La population qui déjà exécrait la caste des fonctionnaires, va se montrer extrêmement menaçante. 

    Le problème éclate avec ce qui va suivre, dévoilant l’immense fossé entre les bourgeois, agents de la république, et le « vrai peuple », pas celui que l’on s’imagine dans les salons, mais celui qui s’agace des vexations permanentes de la part des nouveaux privilégiés. Et comme j’aime bien que le lecteur puisse se faire une idée par lui-même, je vous livre les documents tels quels. On commence au 26 thermidor an VI (lundi 13 août 1798) (1) :

     

    « Séance extraordinaire du 26 thermidor

    Aujourd’huy vingt sixième jour du mois de thermidor de l’an six de la République.

    S’est présenté à l’administration le citoyen Charles Roy percepteur des contributions directes du canton de la Chapelle St Laurent, lequel a déposé un procès-verbal signé de lui, par lequel il appert que ledit Roy s’est transporté le vingt-cinq dudit mois dans la commune de Laregeasse pour y faire payer les contributions, d’après l’arrêté du département du onze messidor (29 juin 1798), et que les citoyens contribuables invités et présent ont déclaré qu’ils ne voulaient pas payer les premiers ;

    L’administration municipale délibérant, oüi le commissaire du directoire exécutif,

    Arrête qu’il sera de suite fait deux copies dudit procès-verbal, l’une pour le commissaire du directoire exécutif près d’elle, et l’autre pour l’administration centrale du département, afin qu’il soit pris les mesures (mot manquant, papier déchiré).

    Fait et arrêté en administration à la Chapelle Laurent les jours mois et (mot manquant, papier déchiré). »

    Suivent les signatures.

     

    Le 10 fructidor (27 août 1798), les habitants de la petite commune de Trayes, se plaignent par une pétition que leur commune paie autant d’impôts que du temps où elle était réunie fiscalement à celle de Bouin. Ils présentent comme preuve les rôles de 1790 et 1791.  

    Voilà bien peu de choses, lorsque l'on apprend ce qui s'est passé ensuite avec un premier arrêté du 1er jour complémentaire de l'an VI (17 septembre 1798) :

     

    « Le commissaire du directoire exécutif présent.

    Vu le procès verbal dressé par le percepteur des contributions directes du canton de la Chapelle St Laurent constatant qu’hier trente fructidor (dimanche 16 septembre 1798) à deux heures environ après midy il est entré chez lui une troupe de paysans qu’il a reçus dans son bureau, comptant qu’ils étaient venus pour acquitter leurs impositions, mais qu’il a vu le contraire, lorsque ces individus au nombre de quatre vingt dix environ ont commenté par vomir des imprécations contre le gouvernement Républicain, contre le percepteur, contre l’administration municipale, et le commissaire près d’elle, et lorsqu’ils ont publiquement déclaré qu’aucun d’eux ne payeraient les impositions et qu’ils séviraient eux-mêmes contre ceux qui payeraient les premiers,

    L’administration municipale délibérant,

    Considérant que les quatre vint dix individus entrés chez le percepteur des contributions ont manifesté une rébellion ouverte contre les loix, les fonctionnaires publics et la rentrée des deniers publics ;

    Que parmi ces individus, il y en avait au moins les deux tiers, qui, avait été invités par écrit à venir payer, ne s’étaient rendus que pour se révolter et empêcher de payer ceux qui étaient dans l’intention de le faire ;

    Considérant que la sureté des Républicains, et des deniers publics, qui sont entre les mains du percepteur, a été comprise et qu’elle est encore ;

    Que la plupart de ces mutins se sont vantés d’attenter à la vie du commissaire du directoire exécutif et des membres énergiques de l’administration municipale ;

    Que, pour venir à bout de leurs desseins criminels, et s’emparer de la caisse du percepteur, ils saisiraient le moment où nous ne serions protégés par aucune force armée ;

    Qu’en conséquence, d’après de pareilles menaces et d’après l’événement factieux d’hier, nous ne pouvons et ne devons point être privés de la force armée même pendant quelques heures ;

    Que le cantonnement de la Chapelle St Laurent ayant reçu ordre de partir pour Bressuire avec armes et bagages ne peut nous abandonner à la mercy des paysans révoltés ;

    Qu’il est urgent et conforme à l’intérêt de la République, à la sureté des Républicains et des deniers publics, qu’au moins une partie du détachement reste ici pour y monter la garde, jusqu’à ce qu’un autre détachement remplace celui-cy, s’il vient à nous quitter, afin que nous ne restions point sans troupes ;

    Oui le commissaire du directoire exécutif.

    Arrête ce qui suit :

    Le commandant du cantonnement de la Chapelle St Laurent laissera la moitié de son détachement à la Chapelle pour y veiller à la sûreté des fonctionnaires publics et des deniers publics ;

    Une expédition du présent arrêté lui sera remise pour être présentée au général ou commandant de la force armée à Bressuire.

    Fait et arrêté en administration à la Chapelle St Laurent les jours, an et susdits. »

    Suivent les signatures

    Insurrection contre les impôts en 1798 à la Chapelle-Saint-Laurent....

    Un nouvel arrêté suit :

    « Le commissaire du directoire exécutif présent

    Vû le procès-verbal dressé le trente fructidor par le citoyen Roy percepteur des contributions du canton de la Chapelle St Laurent, par lequel il est constaté que sur les deux heures après midy environ, pendant qu’il était dans sa maison occupé à recevoir les impositions de plusieurs contribuables des communes de Laregeasse, Clessé et Traye ; une troupe d’environ quatre vingt dix individus s’est introduit dans son bureau avec un air menaçant que là animés par quelques individus à leur tête ils se sont déchainé en injures contre le gouvernement Républicain, contre l’administration municipale et le commissaire près d’elle, ainsi que contre les Républicains amis des loix ; qu’il ont publiquement déclaré qu’ils ne voulaient payer aucune imposition et que ceux qui payeraient les premiers, auraient à faire à eux ; que le percepteur, le commissaire et le secrétaire de l’administration municipale alors présens pour engager les contribuables à acquitter leurs impositions auraient été sacrifiés à leur fureur, si ces mutins n’avaient un peu redouté la force armée du cantonnement ;

    L’administration municipale délibérant ;

    Considérant que la loi a été ouvertement violée ; que le percepteur, le commissaire et le secrétaire de l’administration parlant au nom de la loi, ont été insultés, menacés et réduits au silence par les vociférations et les clameurs injurieuses des quatre vint dix individus entrés comme par force chez le percepteur des contributions du canton ;

    Considérant que, suivant le contenu du dit procès verbal, ils s’animaient et s’échauffaient les uns les autres en se poussant et se heurtant pour savoir celui qui tomberait le premier avec quelques autres d’entr’eux sur le percepteur, le commissaire et le secrétaire de l’administration ;

    Qu’ils ont insulté, invectivé, menacé et repoussé l’épouse du citoyen Roy percepteur, et qu’ils ont voulu l’empêcher d’entrer dans sa chambre, en lui disant qu’elle ne devait pas se mêler de la guerre des hommes ;

    Que cette conduite annonce évidemment des intentions hostiles et dangereuses, des esprits inclinés à la rébellion, une opposition formelle et coupable à la rentrée des deniers publics ;

    Qu’à la tête de cet attroupement on a surtout signalé les nommés François Niort fermier au Boislemay (2) et François Frouin bordier à la Loge, commune de la Chapelle St Laurent ; René Fradin garde-champêtre de la commune de Pugny et Caduc de la Martinière commune de Chanteloup, qui tous les quatre paraissaient conduire les autres et les révolter conte la rentrée des impositions par les discours les plus incendiaires qu’ils tenaient ; que parmi les quatre on a remarqué derrière le nommé Alexis Grellier ; que les quatre individus ci-dessus dénommés étaient les boutefeux et les principaux moteurs de cet attroupement illégal ; qu’ils se sont mis hors la loi, en menaçant ceux qui avaient intention de payer, en détournant et arrêtant ceux qui venaient payer ;

    Qu’ils ont donné par là l’exemple le plus funeste et le plus contraire aux loix ; et qu’ils ont été la principale cause que le percepteur n’a point fait de recettes dans un moment où plusieurs habitans paisibles de Traye, de Laregeasse et Clessé allaient payer, mais qui sont sortis sans rien donner, vu les menaces qu’on leur fesait ;

    Considérant que cet attroupement paraissait médité de plusieurs jours, puisqu’il s’est trouvé un grand nombre d’individus, qui, quoique n’ayant pas été encore invités à se rendre, n’étaient venus que pour augmenter le nombre des mutins ;

    Qu’après être sortis de la chambre du percepteur ils ont encore formé divers attroupemens dans le bourg de la Chapelle St Laurent pour arrêter ceux qu’ils croyaient disposés à venir payer ; qu’ils se sont ensuite réunis à l’auberge des trois marchands chez le nommé Giret boulanger, refuge ordinaire de ceux, qui n’aiment ni la République ni ses loix (note en marge : « et qui lui-même fesait partie de l’attroupement ») ; que là ils se sont encore déchainés contre le gouvernement actuel, qu’ils ont taxé d’injustice ;

    Qu’ils ont ensuite fait menacer le citoyen Beaudet commissaire du directoire qu’il n’existerait pas longtemps, qu’ils lui en voulaient particullièrement ;

    Que les cinq principaux de cet attroupement étaient aurefois les membres des comités des rébelles vendéens ;

    Que l’événement fâcheux qui a eu lieu, n’est dans le fond rien autre chose que l’ouvrage des trames ourdies dans les bois et autres repaires par les émigrés cachés et les prêtres fanatiques et insoumis, pour qui la paix et la tranquillité sont un tourment ; qui sont transportés de rage à la vue des triomphes de la République, et qui voient avec désespoir la rentrée des impositions ; qui corrompent généralement l’esprit public de nos malheureuses contrées, et qui font jouer tous les ressorts du fanatisme, de l’ambition, pour y rallumer et secouer les brandons de la guerre civile ;

    Qu’en conséquence la loi ne doit plus protéger des individus, qui sont en rébellion ouverte contre elle ;

    Qu’en outre cette rébellion est cause que le percepteur a donné sa démission, vu les menaces qu’on a faites d’attenter à sa vie ;

    Oui et le requérant le commissaire du directoire exécutif : arrête ce qui suit :

    Article 1er

    L’administration municipale déclare à ses concitoyens que les nommés françois Niort fermier au Bois**** (Bois Guillemet), François Frouin bordier à la Loge, commune de la Chapelle St Laurent, René Fradin garde-champêtre de la commune de Pugny et Caduc de la Martinière, commune de Chanteloup, sont les principaux autheurs de l’attroupement qui a eu lieu le 30 fructidor chez le percepteur des impositions, la principale cause des insultes et menaces faites aux fonctionnaires publics, et des imprécations vomis contre le gouvernement ; ainsi que l’opposition ouverte à la rentrée des deniers publics.

    2.

    En conséquence une copie du procès-verbal dressé par le percepteur sera remise au commissaire près cette administration avec une expédition du présent arrêté pour être le tout envoyé desuite au commissaire central du département des Deux-Sèvres, afin qu’il soit pris des mesures vigoureuses contre les cinq individus cidessus dénommés, et qu’ils soient traduits devant les tribunaux compétens comme s’étant ouvertement opposés à la rentrée des impositions et s’étant par là déclarés en rébellion conte les loix.

    Fait et arrêté en administration au lieu ordinaires des séances à la Chapelle St Laurent les jours, mois et aux susdits. »

    Suivent les signatures.

     

    On peut ainsi présager aisément de ce qui se passera l’année suivante, de la part d’un pays pourtant ruiné et exsangue.

    RL

    Août 2018

     

     

     Notes :

    (1)  AD79, L 228. Un grand merci une nouvelle fois au personnel des archives de Niort pour sa gentillesse et son aide, toujours la bienvenue, de la part de vrais passionnés d’histoire.

    (2)  Le « Bois Guillemet » de la Chapelle-Saint-Laurent, orthographié « Bois Glumet » sur le cadastre de 1811.

     

    Insurrection contre les impôts en 1798 à la Chapelle-Saint-Laurent.... 


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