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Par Le Loup le 22 Avril 2019 à 21:48
Saint-Mesmin, 1793, le cordonnier aux Archives Nationales…
En série AF II 277-18 des Archives Nationales, parmi les Missions des représentants du peuple en mission auprès des armées, se trouve un dossier un peu fourre-tout dont l’intitulé est : « 16 mars 1793-10 frimaire an II : rapports saisis ou fournis par des espions sur les insurgés de l'Ouest contenant des listes de correspondants vendéens et de prêtres assermentés ainsi que des billets du Conseil de Châtillon-sur-Sèvre (plaquette 2322, pièces 43-58) ». C’est là, en vue 18/19, que l’on trouve un curieux billet concernant Saint-Mesmin dont le contenu est le suivant :
« Nous membres du conseil provisoire de la paroisse de St Mesmin sertifions que Pierre Grelard qui est un de nos soldats quil a payé neuf livres dix sol pour avoir fait faire une paire de souliers au cordonnier de notre bourg qui ne sait pas écrire.
En foy de quoy nous luis délivrons le présent écrit pour luis valloir et servir se que de raison au conseil a St Mesmin le 10 7bre 1793 an 1er du règne de Louis 17
Sachot Bonnin »
Gageons que ce pauvre cordonnier et son client ne se doutaient sûrement pas que leurs noms seraient dans des archives à Paris un jour…
RL
Avril 2019
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Par Le Loup le 21 Avril 2019 à 23:12
Le siège du château de Saint-Mesmin, 1796…
L’affaire du château de Saint-Mesmin du 21 au 23 février 1796 à fait couler beaucoup d’encre sans que l’on en connaisse véritablement tous les détails. Je vous propose donc aujourd’hui d’étudier les faits sous l’angle des archives en essayant d’approcher au plus près de la vérité.
Pour commencer, citons l’erreur monumentale de Crétineau-Joly qui situe ce combat dans les derniers jours d’août 1799, sous une « dévorante chaleur », n’hésitant pas à romancer sur un assaut donné par les Républicains le long des puissantes murailles du château, accompagnés par des tirs de canon. On connaît la capacité de cet historien à s’arranger avec les faits, cherchant à susciter l’émotion et le dramatique, un peu à l’instar de certains « modernes » plus aptes à composer des livres idéologiques que de produire de véritables travaux d’histoire.
Jacques Crétineau-Joly (1803 – 1875), ici en 1865.
Heureusement, une note de l’abbé Drochon, dans l’édition de 1895 de « Histoire de la Vendée Militaire », vient rectifier le tir, d’après le témoignage de la marquise de La Rochejaquelein, qui elle, est allée voir les paysans pour les interroger. Voici la note en question (1) :
« Je me rappelle fort bien, dit Mme de La Rochejaquelein, que Dénis, aubergiste au Pin, m’a dit qu’il était du nombre des assiégés de Saint-Mesmin, et bien des choses qui diffèrent du récit de M. Crétineau.
Voici les informations sûres qui viennent de m’arriver, en juin 1844, du même Dénis. Ces informations sont positives et prises par écrit :
On fut attaqué le dimanche 27 février 1796 premier dimanche de Carême (2). A ce combat étaient : François et Louis Dénis frères, Louis Beloir, Jacques Lusseau et Parenteau, tous les cinq de Cerizay ; Ferchaud, Lasserre et Barijon, tous les trois de la Fosserie (3) ; Boulay, de la Pommeraie ; Jannière, du Boupère ; Pierre Boulord, de l’Obersaie (4) de Clessé, Pigona, ancien soldat ; quelques déserteurs français et allemands, d’autres jeunes paysans ; M. Pinaud, régisseur de Saint-Mesmin ; en tout 42.
M. de Vasselot les quitta pour aller chercher du pain et des secours, mais ne put revenir. Le château était entouré de grands fossés pleins d’eau, ce qui facilitait la défense. En outre ils empêchaient les assiégés de mourir de soif. On ne tint pas la capitulation, car on garda ces braves gens prisonniers, et même des généraux voulaient les fusiller à La Châtaigneraie ; mais le général qui avait fait la capitulation vint à bout de l’empêcher. Toutefois, on les garda en prison et on les y laissa longtemps, à Fontenay.
M. Crétineau se trompe tout à fait sur la date de cette affaire. Quand je parlais à Dénis, il y a quatre ans, il me dit : « Nous avons appris la mort du général Stofflet trois ou quatre mois après que nous étions en prison à Fontenay, mais je ne sais pas le jour ni l’année au juste du combat. » Je l’engageais à tâcher de le savoir. Il m’a fait dire à présent « 27 février 1796 ; c’est positif. » D’ailleurs, pour les paysans, cette nouvelle de la mort de M. Stofflet apprise en prison, est une preuve sans réplique. »
Certaines sources laissent entendre que les Vendéens étaient plus nombreux au départ, mais que quelques uns se soient échappés par la poterne donnant sur les fossés les plus inondés en cette période hivernale (5). En mai 2006, votre serviteur avait été interviewé par France 3 Poitou-Charentes au château de Saint-Mesmin à propos de ces faits.
Voilà, maintenant que vous avez vu ma singulière bobine, revenons à nos affaires et poursuivons avec une source ultra-connue, tirée d’une lettre de Lazare Hoche apparaissant dans le monumental recueil de correspondances de Jean-Julien-Michel Savary (6) :
« Le 23, on a pris quarante-deux hommes dans le château de Saint-Mesmin.
Crublier a pris et fait fusiller le doyen des divisionnaires de la Vendée, nommé Richard. Nicolas, autre divisionnaire, a été tué, et enfin Stofflet pris et fusillé. »
De là, il nous faut maintenant éplucher les Archives Militaires de Vincennes afin d’avoir la vue la plus précise des événements, du moins par la vision qu’en ont eu les différents militaires républicains et qui, selon moi ne sont pas éloignées de la vérité. Le général Lazare Hoche peut être tolérant envers les gens du peuple, mais se montre intransigeant contre les nobles émigrés. En gros, sa devise se résume à exterminer ce qu’il pense être les meneurs, tout en montrant une relative clémence vis-à-vis des paysans. Cette recette sera sans doute la meilleure contre l’insurrection vendéenne, du moment que les prêtres s’en contentent et que la paix civile puisse être obtenue. Napoléon Bonaparte, qui institua le maladroit « Concordat », avait en gros compris la même chose. Je me plais à me poser la question, si Hoche n’était pas mort prématurément, de savoir si Napoléon aurait accédé au pouvoir si facilement, et pourtant je ne suis pas un admirateur de Hoche, loin de là.
Le 25 février 1796, Hoche écrit au Directoire. Il est très en colère car il pense que les généraux Merle et Bonnaire ont fait fusiller les Vendéens malgré la capitulation et la promesse de vie sauve (7) :
« Au quartier-général de Montaigu le 6 ventose 4e année républicaine
Le général en chef au Directoire Exécutif.
Je croyais avoir une bonne nouvelle à vous apprendre aujourd’hui ; et quoique j’aïe à vous parler d’un sucçès, je suis éloigné d’être satisfait.
L’adjudant général Cortez annonça le 2 du courant au général Caffin qu’après une marche de soixante heures il était parvenu à la tête de 400 hommes à bloquer dans le château de St Mésmin près Pouzauges, 300 brigands ; à la tête desquels étaient plusieurs émigrés. Craignant ce qui est arrivé, je lui écrivis avant-hier qu’il n’ait à entendre à aucune capitulation, qu’il fasse son devoir et se conforme aux loix.
Cortez aÿant demandé du secours aux généraux Bonnaire commandant la grande division du Sud, et Merle, commandant la subdivision dans laquelle il se trouvait, ces officiers s’y portèrent et bientôt quatre mille hommes furent réunis devant le château de St Mesmin, lequel, dit-on, a des ponts levis, est crennelé et susceptible d’une bonne deffense.
J’attendais avec la plus vive impatience le résultat de ce siège cruciale, lorsque le général Grigny, qui arrive à l’instant m’annonce que le général Merle a demandé aux Brigands qu’ils aïent à capituler ; que les Brigands y aÿant consenti a condition qu’on leur accorderait la vie ; que trois à quatre mille soldats de la république ont vû défiler devant eux (en enrageant sans doute) quarante deux gredins en sabôts et enfin qu’ajoutant l’infamie à la lâcheté et au ridicule, les généraux Bonnaire et Merle ont ordonné de fusiller ces quarante deux hommes auxquels ils venaient de promettre la vie. J’expédie un contre ordre sur le champ et en attendant le vôtre sur cette affaire, je donne l’ordre aux deux généraux de se rendre à Fontenay où ils garderont les arrêts forcés.
Vous ne scauriez croire quel effet va produire cette scène scandaleuse et quelles vont être les vociférations des messieurs de Niort et de Fontenay. On va de nouveau accuser l’armée d’être composée de monstres, commandés par des scélérats. Je vous demande au nom de cette brâve armée qu’il soit fait justice de ceux qui ont dans cette affaire un triple tort.
L. Hoche »
Lazare Hoche (1768-1797), peinture de François Gérard.
A la même date, le commissaire éxécutif du département de la Vendée écrit au ministre de la guerre (si la commune de Saint-Mesmin est bien en Vendée, en revanche le château de Saint-Mesmin-la-Ville, se trouve sur la commune de Saint-André-sur-Sèvre, dans le département des Deux-Sèvres). Je n’ai trouvé que le bulletin analytique de cette correspondance qui indique ce qui suit (8) :
« Le commissaire éxécutif près l’administration départementale de la Vendée, à Fontenay le Peuple ; au ministre de la guerre.
Rend compte du résultat qu’a eu le blocus du château de St Mesmin, où un corps de chouans s’était retranché. Observe qu’on a exagéré l’importance de ce fait mîlitaire et se plaint de la manière dont la guerre est conduite par les généraux Républicains. »
Le lendemain 26 février, soit trois jours après la fin du siège, Hoche fournit au Directoire la version des faits du général Merle (9) :
« Copie du rapport fait par le général de brigade Merle, le 5 ventose an 4e.
L’adjudant général Cortés, général, commandant des colonnes mobiles dans cette partie pour dissoudre les rassemeblemens des insurgés m’écrit deux du courant qu’il les à attaqué, mis en deroutte et fait poursuivre de si près par la cavalerie qu’ils ont été obligé de se renfermer dans le château de St Mesmin lequel à été promptement circonvallé par les Républicains qui les poursuivaient. Il me demande des forces pour les attaquer. J’ai sur le champ marché avec les troupes que j’avois de disponibles à la chataigneraÿe se montant à trois cent hommes pour renforcer la colonne commandée par l’adjudant général Cortés forte de deux cent cinquante.
Arrivant à St Mesmin je me mis en savoir devoir de reconnaître le château sur tous les points et après l’avoir bien observé je ne tardai pas à juger qu’il ne pouvoit être forcé sans canon même de gros calibre (10).
Le pont levis était dressé et les fossés qui avaient 20 pieds de large présentaient 25 pieds de profondeur, et les murs des deux tours qui composent cette forteresse ont dix à douze pieds d’épaisseur et crénelés de haut en bas, offrent un aspect inabordable.
Aÿant considéré tant de difficultés insurmontables, il eut été imprudent et même une folie que de vouloir tenter l’assaut, n’y ayant que des risques à courir, une perte inévitable d’un grand nombre de Républicains et sans l’espoir d’en retirer aucun succès. D’un autre côté tous nos postes affaiblis pour accourir au blocus de ce château et les renseignemens certains qui m’étoient parvenus que les brigands se rassemblaient de toutes parts pour les attaquer (ce qui devenoit important d’éviter) toutes ses considérations me firent adresser la sommation suivante aux insurgés bloqués.
Les rebelles renfermés dans le château de St Mesmin sont sommés de se rendre sur le champ s’ils veulent profiter de la générosité française, sans quoi trois mille hommes vont leur livrer l’assaut et les passer au fil de l’épée.
A cette sommation ils répondirent.
Citoyen général, nous avons reçu la sommation que vous nous faites de nous rendre. En retirant votre troupe à une lieue de l’endroit et sur une colonne, voila le motif qui nous fera retirer de ce poste. Quant à l’assaut nous ne le craignons point, nous sommes décidés à le soutenir jusqu’à la mort.
St Mesmin ce 22 février 1796 Signé Giraud.
Les rebelles connaissant parfaitement leur poste, ils avaient renfermé des subistances pour dix jours et ils s’avaient bien que l’assaut nous étoit impossible. J’en fis cependant faire tous les préparatifs. Cent *** (illisible) firent d’abord confectionnés. J’envoyai chercher toutes les échelles des campagnes environnantes, les sapeurs parurent avec leurs haches. Ces préparatifs illusoires mis en évidence ne laissa pas que de les jetter dans une certaine consternation. Dans ce moment un chef de bataillon d’infanterie légère cria à un brigand que se faisait apercevoir au travers un créneau, que s’il ne se rendaient point ils allaient sous un quart d’heure être taillés en pièce. Celui-ci répondit qu’ils étaient tous décidés à se rendre moyennant qu’on leur accordat la vie, à quoi j’a acquiessé, tant pour éviter un sang républicain qui aurait inévitablement coulé ; qu’un long blocus qui nous auroit sans doutte été funeste. Ma promesse faite aux brigands, ils descendirent des tours au nombre de quarante deux qui déposèrent leurs armes à ma compagnie de grenadiers postée à la porte du château. Cette horde composait la compagnie de chasseurs de Mr Wasselot (Vasselot) laquelle nous remis un drapeau blanc Sali de fleurs de lys qu’on leur avoit donné depuis peu pour signe de ralliment. Voilà général le résultat de l’affaire de St Mesmin dont vous avés connaissance d’une partie. Signé Merle
Pour copie conforme
Le général de division commandant en chef celle du Sud.
Signé Bonnaire.
Pour copie conforme
Le général en chef.
L. Hoche »
Le 28 février, Bonnaire signale au Directoire qu’il est aux arrêts à Fontenay (11) :
« Bonnaire, Général de Division, commandant en chef la division du Sud.
Au Directoire Executif.
Citoyens Directeurs.
J’apprends que le général en chef Hoche, mal instruit (sans doute) sur l’affaire de St Mesmin, me fait un crime d’avoir conservé la vie à quarante deux Brigands renfermés dans le chateau et qui s’étoient rendus au général Merle à cette condition (12).
J’étois porteur du rapport de cet officier général, et je me rendois à Montaigu pour avoir une conférence avec le général Hoche ; lorsque sur ma routte il m’a été remis une lettre par laquelle il m’étoit ordonné de me rendre de suitte à Fontenay, où en arrivant le commandant de la place m’a écrit qu’il avoit l’ordre de me mettre aux arrêts forcés.
Comme je dois à la justice et à l’honneur de faire paroître la vérité dans tout son jour : je m’empresse de faire un recueil de toutes les pièces justificatives de ma conduite dans cette affaire et je vous les fairés passer par le prochain courrier : veuillés je vous prie suspendre votre décision jusqu’à leur arrivée.
J’espère que vous voudrez bien avoir égard à ma demande, et être persuadés que s’il y avoit eû possibilité de prendre le château d’assaut sans verser le sang d’une centaine de républiquains on n’auroit point transigé avec une poignée de rebelles.
Bonnaire »
Le lendemain, 29 février, rebelotte et Bonnaire s’épanche à nouveau auprès du Directoire (13) :
« A Fontenay le peuple le 10 ventose l’an 4e de la République française, une et indivisible.
Au Directoire Exécutif
Citoyens Directeurs,
La vérité ne devant jamais perdre ses droits, je m’empresse de vous éclairer sur le rapport imparfait que le général Hoche vous adresse de la prise de 42 rebelles au chateau de Saint Mesmin avec lesquels on a capitulé par suite d’un blocus de 3 jours par deux mille républicains, vu l’impossibilité de les exterminer par la force sans encourir les risques de perdre deux cens hommes pour en détruire 40. D’une autre part les troupes formant le blocus étoient tirées des cantonnemens circonvoisins, qui alors par cette extraction de force, devenoient très foibles et réduits à l’impuissance de résister aux incursions des rebelles, si toutesfois ils eussent tenté de secourir les bloqués. Il falloit donc de toute nécessité composer avec les brigands, puisque les troupes du blocus étoient déjà sans subsistances, et que ce siège auroit duré jusqu’à l’entier épuisement des ressources des insurgés ; la prise de vive force était reconnue impossible, on somma les rebelles de se rendre à discrétion, ils y consentirent à condition que l’existence leur seroit garantie. Ils voulurent la promesse par écrit, elle leur a été accordée ; et après ces formalités les 42 brigands sortirent du chateau, déposèrent les armes et munitions et furent conduits à la Chateigneraye et de là à Fontenay où ils existent encore. Ce traitement est donc bien contraire au rapport du général Hoche et aux sollicitations du général Grigny chef de l’état major, qui désiroit beaucoup (comme le prouve par la copie de lettre jointe à celleci) que les brigands fussent jugés sur le terrein, en me persuadant avec complaisance que je ne devois pas tenir à ma parole quand la loy parloit. Sans doute que ce général ne peut être assimilé à un homme d’honneur puisqu’il reconnoit la loyauté, dans une circonstance qui est la première de cette nature depuis l’insurrection vendéenne et dans la quelle la bonne foi ne doit pas être violée. Au reste je n’ai pas donné mon assentiment à des propositions qui n’appartenoient pas à la ce général attendu que son inespérience et son infériorité lui imposait silence.
Malgré ces préventions il déclama le contraire au général Hoche qui trop empressé de prononcer sur une affaire qu’il ne connoit pas m’ordonna de me rendre a Fontenay pour recevoir de nouveaux ordres. J’obéis à sa volonté et à mon arrivée le commandant de la place me signifia de garder les arrêts forcés.
Dans cette affaire la hiérarchie l’ame du service a encore été une fois méconnue, car on n’a jamais vu qu’un capitaine ait mis un général de division aux arrêts ; et me semble qu’il appartenoit plutôt au général Hôche de m’adresser directement sa sentence, alors les principes militaires auroient été mieux observés et cette signification irrégulière auroit fait moins de bruit. N’importe les formes la punition a été prononcée et comme chef j’ai donné l’exmple de l’obéissance, persuadé que le général en chef sortira de sa fureur lorsqu’il apprendra que ses propres sujets ony eu dans cette avanture le triple tort qu’il attribue au autres.
Vous voyez enfin, citoyens Directeurs, qu’il n’y a eu dans ma conduite et dans celle du général Merle ni infamie ni lacheté. Cette scène que l’on nomme scandaleuse ne produira aucune vocifération, l’armée ne sera pas accusée de monstres, mais ceux qui ont eu l’impudence de compromettre l’honneur et la probité seront taxé de fourberie et d’imposture.
Distinguez je vous prie la vérité du mensonge et faite rejaillir la punition sur ceux qui ont trompé le général en chef et trahi la foi publique.
Bonnaire »
Bonnaire joint les deux justificatifs suivant de son arrestation :
« Au quartier général, à Fontenay le 10 ventose l’an 4e de la République française, une & indivisible.
Au quartier général de Montaigu le 6 ventose 4e année rép.
Le général en chef,
Au général de division Bonnaire.
A la réception de la présente, vous voudrez bien vous rendre à Fontenay, ou vous recevrez de nouveaux ordres, quelque soit le lieu où cette lettre vous rencontrera, vous retournerez bride.
Signé L. Hoche.
Pour copie conforme
Le général de division
Bonnaire »
***
« Au quartier général à Fontenay le 10 ventose l’an 4 de la République française une & indivisible.
Fontenay le peuple le 8 ventose l’an 4e
Petit Laurent commandant de la place au général de division Bonnaire commandant la division du Sud.
Je vous préviens, général, que je viens de recevoir l’ordre du général en chef Hoche pour vous mettre aux arrêts forcés ; vous voudrez bien, général, vous y conformer, et garder les arrêts à Fontenay jusqu’à nouvel ordre.
Salut et Fraternité, signé Petit Laurent.
Pour copie conforme,
Le général de Division
Bonnaire »
Le 8 mars, le ministre de la guerre Claude-Louis Petiet écrit au commissaire exécutif de la Vendée en lui répondant à propos de l’affaire de Saint-Mesmin, mais aussi sur des affaires de pillage, qui comme on le sait, perdurent depuis et malgré la Pacification (14).
Claude-Louis Petiet (1749-1806), portrait par Yan' Dargent.
« Au commissaire du directoire exécutif près le département de la Vendée à Fontenay le peuple.
Ce 18 ventose
J’ai reçu, citoyen commissaire les détails relatifs au prétendu blocus du chateau de St Mesmin contenu dans votre lettre en datte du six de ce mois ;
Il est douloureux sans doute de voir les soldats se livrer sans cesse a des pillages qui frappent sur la classe malheureuse a qui le gouvernement a promis protection et sureté. C’est aux généraux qu’il appartient de maintenir la discipline sévère qui peut seule prévenir de pareils abus, et il est au général en chef a qui j’en écris en ce moment a rappeller a ce devoir ceux qui s’en écartent.
Je vous invite a lui communiquer touttes les observations que vous aurez faittes a cet égard. Je ne doutte point qu’il ne seconde la pureté de vos intentions
Signature illisible »
Puis le 14 mars, le Directoire donne son avis et approuve la capitulation de Saint-Mesmin (15) :
« Paris le 24 ventôse an 4e
L D E
Au général Hoche commandant en chef l’armée des Côtes de l’Océan.
Le Directoire a reçu Citoyen Général vos lettres du 6 et du 7 ventôse reltives à l’affaire de St Mesmin. Il à pareillement reçu deux missives du général Bonnaire qui contiennent sa justification et copie d’une lettre du général Grigny sur cet objet, que le Directoire croit à propos de vous transmettre.
Il paraît que le but de la capitulation de St Mesmin a été principalement d’épargner le sang républicain.
Le Directoire en blamant la non éxécution des ordres que vous avés donnés, pense que puisqu’elle à été consentie elle doit être maintenue et se borne à vous recommander de prendre toutes les précautions que les circonstances commandent pour que les Brigands de St Mesmin ne puissent être désormais dangereux pour la tranquillité de la République.
Il est également urgent de surveiller avec beaucoup de soin la conduite de Pranger, Ussault, Béjarry, Guérin et la Robrie, et d’éloigner surtout les trois premiers, s’il est possible, d’un pays ou leur présence peut occasionner de nouveaux troubles.
Signé à la M. Reubell, Carnot, et P. Barrat./. »
Enfin, trois jours plus tard, le 17 mars, Hoche prend conscience de son erreur et envoie cette lettre à Bonnaire (16) :
« Angers,
L’assurance que l’on m’avait donnée, que vous aviez fait fusiller les hommes pris dans le château de Saint-Mesmin, après leur avoir promis leur grâce, m’avait forcé de vous ordonner les arrêts. On m’assure aujourd’hui que le fait est faux ; je me plais à le croire, puisqu’il ne pourrait arriver à un homme d’honneur de trahir ainsi la foi donnée. Veuillez bien m’adresser un compte détaillé de cette affaire à Angers, et vous rendre à Montaigu pour y continuer vos fonctions.
Je pense que vous ne trouverez pas mauvais une sévérité exigée par l’honneur, et que vous vous vengerez sur Charette qu’il nous reste à prendre. Vous y parviendrez, en tenant toujours un tiers de vos troupes en mouvement et à sa poursuite. »
Hoche fut-il si mal renseigné ? Peut-on accorder du crédit aux dénégations de Bonnaire, à fortiori lorsque le témoignage du Vendéen Denis, vu au début de l’article, précise qu’il avait bien été question de fusiller les Vendéens après leur capitulation ?
Sans doute ne saurons-nous jamais l’entière vérité, mais au moins le travail par les sources aura été effectué.
RL
Pâques 2019
Illustration tirée de « Souvenirs du Bocage Vendéen » par Dom Joseph Roux, 1898. Merci à Caroline, du Château de Saint-Mesmin pour cette source.
Notes :
(1) Op.cit, p. tome II, p. 542 et 543.
(2) On sait que c’est le 21 février et non le 27 qui de toute manière tombait un samedi.
(3) La Flocelière en langue poitevine, dite aussi la « Feussière ».
(4) Il s’agit bien entendu de Laubreçais, se prononçant « Laubeurssais » en Poitevin-Saintongeais.
(5) « Paysages et Monuments du Poitou, le Château de Saint-Mesmin-la-Ville », Jules Robuchon, Henri Proust, 1888, Paris, Motteroz, p. 6.
(6) Op. cit, tome VI, p. 202. Lettre au citoyen Fairain datée de Montaigu.
(7) SHD B 5/35-89 – v. 1 à 4/9, bulletins analytiques compris.
(8) SHD B 5/35-91, v. 14/14, BA seul.
(9) SHD B 5/35-94, v. 15 et 16/16.
(10) On sait que le détachement de la colonne de Lachenay qui pensait brûler le château ne le fit qu’en partie afin de se réserver un possible poste de surveillance, imprenable par les Vendéens.
(11) SHD B 5/35-99, v. 1 à 3/12, BA compris.
(12) La formulation est curieuse quand on sait que c’est justement car il voulait les faire fusiller qu’il se trouve aux arrêts.
(13) SHD B 5/35-104, v. 1 à 6/16, BA compris.
(14) SHD B 5/36-20, v. 1 à 3/6, BA compris.
(15) SHD B 5/36-38, bulletin analytique seul renvoyant au registre de correspondance. Ledit registre en SHD B 5/97, f° 23, n° 76 ; v. 25/126.
(16) Savary, tome VI, p. 222. Je n’ai pas trouvé trace de la lettre originale dans les liasses en ligne.
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Par Le Loup le 21 Avril 2019 à 11:07
Saintes Fêtes de Pâques à vous tous
Sources :
. Crédit photo : Holy Mass Images – Easter : Jésus Résurrection.
X. Paquereau pour Chemins Secrets
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Par Le Loup le 17 Avril 2019 à 10:00
La république est destructrice...
En cette Semaine Sainte, mon cœur de chrétien est meurtri après l'incendie de Notre-Dame de Paris.
Ce système anti-chrétien qu'est la république maçonnique n'est pas à son coup d'essai, le bilan artistique de la Révolution dite française a été catastrophique. Notre-Dame de Paris au cours de cette triste période a subi de graves sacrilèges et des destructions importantes. A cette époque aucun abruti n'avait pensé y foutre le feu, soit volontairement ou par ''mégarde'', c'est dire les progrès de l'insouciance que cette république a fait fructifier dans sa politique menée et dans ses écoles où on lave les cerveaux.
Depuis deux siècles, ce système et ses serviteurs continuent leurs destructions et manquent à leurs devoirs les plus élémentaires, à savoir la protection et la surveillance des édifices réligieux chrétiens.
Il est frappant de constater que ni la Révolution ni l'Empire ne prennent d'initiatives urbaines en dehors de Paris : RIEN ! Ils détruisent ! Aucune création, le génie français, le souffle de l'Esprit a quitté la France définitivement.
Des voyageurs qui traversent la France vers 1800 témoignent :
« Voilà pour l'actif du bilan. Le passif est autrement lourd.
Lorque au printemps de 1800, Chateaubriand regagne la France, quel spectacle, sur la route de Calais à Paris, lui offre sont pays retrouvé ? ''On eût dit que le feu avait passé dans les villages ; ils étaient misérables et à moitié démolis ; partout de la boue ou de la poussière, du fumier et des décombres. A droite et à gauche de chemin se montraient des châteaux abattus ; de leurs futaies rasées, il ne restait que quelques troncs équarris, sur lesquels jouaient des enfants On voyait des murs d'enclos ébréchés, des églises abandonnées, dont les morts avaient été chassés, des clochers sans cloche, des cimetières sans croix, des saints sans tête et lapidés dans leurs niches. Sur les murailles étaient barbouillées ces inscriptions républicaines dèjà vieillies : Liberté, Egalité, Fraternité ou la Mort. Quelquefois on avait essayé d'effacer le mot Mort, mais les lettres noires ou rouges reparaissaient sous une couche de chaux. Cette nation, qui semblait au moment de se dissoudre, recommençait un monde, comme ces peuples sortant de la nuit de la barbarie et de la destruction du Moyen Age''.
A Paris :
'' La place des Victoires et celle de Vendôme pleuraient les effigies absentes du grand Roi ; la communauté des Capucines était saccagée... Aux Cordeliers, je demandais en vain la nef gothique où j'avais aperçu Marat et Danton dans leur primeur. Sur le quai des Théatins, l'église de ces religieux est devenu un café et une salle de danseurs de corde...'' La description est sincère et correcte. Nous retrouverons dans toute la France ces clochers sans cloche, ces cimetières sans croix, ces places royales purgées de leurs statues, ces abbayes dévastées, ces cloîtres laïcisés, ces églises transformées à toutes fins, et par là même sauvées de la démolition. Deux lustres ont suffi à changer le visage de la France.
« Sur la route de Paris, un arrêt à Abbeville : ''Il y a sur la place du marché les ruines d'une belle église entièrement détruite. Tout a un air de pauvreté et de désolation qui fait pitié.... Les mendiants sont en grand nombre.''
Plus loin, à Picquigny : '' Du beau couvent des Bernardins, l'église a été détruite. Le couvent lui même a été acheté dernièrement par un manufacturier d'Amiens, pour être, nous dit-on, transformé en une fabrique à papier...''
Je ne vous parlerais pas de Versailles, visité par un Allemand en 1797... devenu une friche habitée par des clochards...
Tous les témoignages concordent : la France est en état de décrépitude, près de dix ans après la Terreur.
« A la joie de détruire s'ajoute, pour les champions de l'égalité, une fureur de nivellement qu'ils veulent assouvir par les moyens les plus sommaires.
Notre-Dame de Paris :
« La flèche qui domine Notre-Dame, comme celle qui domine la Sainte-Chapelle, leur paraît attentatoire. Toutes deux sont rasées. »
''Notre-Dame devient un entrepôt de vivres, puis de vins, la Saint-Chapelle un dépôt de farines...''
''Sur la façade de Notre-Dame, la Commune prescrit de décapiter la galerie des Rois. Avec une corde passée au cou de chacune d'elles, les vingt-huit statues datant du XIIIème siècle sont abattues et abandonnées sur le parvis, transformé en décharge publique...''
''Il s'en faut de peu que ne soient perpétrés de véritables attentats. Devenue propriété nationale, la Saint-Chapelle manque d'être jetée bas.''
«Passion anticléricale : celle là est la plus agissante, la plus dévastatrice, parce que la France chrétienne est présente partout, jusque dans le plus humble hameau, et parce que les sociétés de pensée (francs-maçons) ont mobilisé les esprits forts contre l'Eglise. Pas de quartier pour les abbayes, les églises, les chapelles, les châsses des saints ! Les vrais révolutionnaires ne transigent pas avec les bondieuseries. »
Et ailleurs : l'abbaye de Cluny, chef d'oeuvre du XIème – 180 mètres de long, 30 mètres de haut, pillé en 1791, l'ordre de démolition date de 1792, la dévastation de 1793, c'est Napoléon qui lui donne le coup de grâce. Il n'en restera qu'un clocher. Quelle honte ! Et puis, et puis tout le reste.... la France devient un chantier de démolition.
Et vous voudriez que moi, Chrétien, j'adhère et devienne complice de ce système de M...
Le château de Saint-Fargeau-en Puisaye, lui est sauvé, a cause du Conventionnel Le Pelletier, ce noble régicide, celui qui a voté la mort du Roi est devenu un héros national, impossible de toucher à son château.
Je vous recommande chaudement la lecture de l'ouvrage de René Sédillot concernant ''Le Coût de la Révolution française'', 282 pages de destructions. Vous en sortirez transformés.
En attendant, je vous souhaite une bonne fin de Semaine-Sainte et de Joyeuses Fêtes de Pâques.
Sources :
. Le coût de la Révolution française de René Sédillot – Vérités et Légendes de chez Perrin 1987. Quelques extraits des pages 123 à 135.
. Photo : Notre Dame de Paris 15 avril 2019, extraite du blogue La Charte de Fontevrault.
X. Paquereau pour Chemins Secrets
2 commentaires -
Par Le Loup le 14 Avril 2019 à 17:30
Le général républicain Amey est un voleur de cochons…
Et s'il n'y avait que cela ! Le général Amey, celui qui faisait brûler les femmes et les enfants dans des fours*, une belle ordure! Comme Turreau, Liger-Belair et Travot le voleur de chevaux, il a son nom gravé sur l'Arc de Triomphe et a été fait Chevalier de Saint-Louis par un roi très clairvoyant...
* Le génocide par les fours de Richard Lueil.
Aux Herbiers, le général Amey et sa troupe, se contentaient de voler, de tuer et de violer les femmes des royalistes, mais volait et épargnait les patriotes, et parfois violaient aussi les femmes de patriotes*, contrairement au Général Grignon qui affirmait, selon les dires des officiers municipaux des Herbiers :
«Quant aux Herbiers, que nous étions heureux que son collègue Amey y fut, que sans cela tous les habitants sans distinction de patriotes ou autrement auraient été fusillés parce que les ordres du général en chef portaient de massacrer, fusiller et incendier tout ce qui se trouvait sur son passage, qu'il avait même fait fusiller des municipalités entières, revêtues de leurs écharpes.»
* Viol de Marie-Anne Hurtaud au Petit-Bourg-des-Herbiers.
Le laboureur patriote Pierre Seguin, de la Chalonnière près le Petit-Bourg-des-Herbiers est ''délesté'', le samedi 1er février 1794, de tout son cheptel sur ordre du général Amey.
«Minutte de certificat et attestation donnée par François Airaud et François Charrier en faveur de Pierre Seguin, laboureur à la Chalonnière commune du Petit Bourg du 29 Germinal an 5 (18 avril 1797).»
« L'an cinq de la République française une et indivisible et le vingt neuf Germinal avant midi.
Par devant nous notaires du département de la Vendée résidant aux Herbiers, canton du dit lieu, soussignés furent présents en personnes : François Ayraud domestique demeurant à la Creulière, et François Charier laboureur demeurant au dit lieu de la Creulière, les deux commune du Petit Bourg des Herbiers.
Lesquels déclarent et attestent avoir une parfaite connaissance, que le premier février mil sept cent quatre vingt quatorze (vieux style) temps auquel l'armée Républicaine commandée par le général Amet qui campoit alors aux Herbiers, que le dit général requit de Pierre Seguin laboureur demeurant à la Challonnière ditte commune du Petit Bourg des Herbiers et le contraignit de fournir pour la subsistance de son armée les objets ci-après déclarés, Lesquels les dits comparants furent aussi requis et contraints par le dit général de prendre et enlever du dit lieu de la Challonnière, en ce que faisait valloir le dit Pierre Seguin, et ce que lui appartenait seul et de les conduire au camp des Herbiers, savoir :
Premièrement, deux bœufs gras, qui furent estimés par le bouché de la ditte armée en leur présence valloir la somme de cinq cent quarante livres – 540L.
Plus dix huit brebis qui furent également estimées valloir par le même bouché a raison de quinze livres pièce ce qui fait deux cent soixante dix livres – 270L.
Plus un cochon gras estimé valloir cent vingt francs -120 francs.
Plus douze boisseaux de froment à raison de six livres le boisseau, ce qui fait soixante douze livres – 72L.
Plus enfin dix boisseaux de seigle à raison de cinq livres le boisseau, ce qui fait cinquante livres – 50L.
Pour un total de 1272 livres.
Lesquelles déclarations, les dits comparants affirment sincères et véritables et des quelles ils nous ont requis acte que nous dits notaires leurs avons octroyé pour valloir et servir ce que de raison : fait et passé aux Herbiers étude de Graffard, étude nous dits notaires duement patentés les dits jour et an que dessus, lu aux parties ont les dits Airaud et Charier déclaré ne savoir signer de ce enquis.
Signé Tillaud notaire public – Graffard Notaire Public. »
Le Citoyen Pierre Seguin est né le 1er mars 1765 à Beaurepaire dans la métairie de l'Echasserie. Il est le fils de Jean Seguin et de Marie-Anne Guerry originaires de la Gaubretière. En 1794 il est laboureur à la Challonnière au Petit-Bourg-des-Herbiers.
Sources :
. Archives Départementales de la Vendée tous droits réservés. Minutes notariales des Herbiers – Etude C de Maître J.M Graffard – anIV, an VII - vue 46/478.
. Itinéraire de la Vendée Militaire – le journal de la Guerre des Géants 1793-1801 par P Doré-Graslin -Editions Garnier – 1979. page 117. Repris de Lequinio, p. 109.
. Registres paroissiaux de Beaurepaire baptême 1769 – vue n°205/262.
. Photo: ''Le génocide par les fours'' de Richard Lueil.
X. Paquereau pour Chemins Secrets
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