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Saint-Etienne-du-Bois dans l'horreur....
Saint-Etienne-du-Bois dans l'horreur...
C'est un article inhabituellement long que nous vous proposons ce soir. En effet, les bulletins paroissiaux de Vendée sont souvent d'une grande richesse et il eut été dommage de passer à côté de certains détails en voulant trop résumer.
L'amateur d'histoire retient la plupart du temps de Saint-Etienne-du-Bois le miracle de la chapelle de la Tullévrière qui échappa au passage des massacreurs de 1794. Nous verrons ici qu'il n'en fut pas de même, et loin s'en faut, du reste de la paroisse. Nous transcrivons ici les différents bulletins paroissiaux à la suite les uns des autres sans rien modifier. Il apparaîtra donc des répétitions concernant certains villages mais qui sont nécessaires afin d'être le plus complet possible.
RL
Août 2015
SAINT-ETIENNE-DU-BOIS
LES COLONNES INFERNALES
... Les colonnes infernales avaient pour mission de tout détruire par le fer et par le feu dans la Vendée. La paroisse de Saint-Etienne-du-Bois dans toute son étendue n'échappa pas à leur vandalisme et leurs atrocités. D'après les renseignements recueillis vers 1884-85 par l'abbé Boutin, alors nouveau curé de Saint-Etienne, de la bouche des plus anciens du pays, dont les parents avaient vécu à cette terrible époque, tous les villages de la paroisse, sauf la Tulévrière, furent incendiés et en grande partie détruits par les bleus et les habitants qu'ils purent trouver furent cruellement massacrés. On a pu estimer à 350 les victimes, hommes, femmes, enfants, tués pendant ces années.
Parmi les villages, deux eurent particulièrement à souffrir ainsi que les villages avoisinants. Ce furent la Chambaudière et le Chiron, parce que, situés sur des hauteurs, ils furent choisis par les révolutionnaires pour établir des camps chargés de surveiller la grande route et les alentours.
A la Chambaudière, le camp était établi dans un champ derrière la maison située au sommet de la côte. Les habitants effrayés de ce voisinage s'enfuirent chercher abris et cachettes ailleurs. Toutes les maisons furent saccagées et incendiées. Cela, au dire de Vincent Loizeau qui habitait là, comme ses descendants actuels.
La Glossetière, qui touche, ne fut pas mieux traitée. Tout y fut brûlé et du haut de la Chambaudière les bleus tiraient sur les habitants qu'ils voyaient y revenir. On trouva dans la suite un nombre considérable de balles dans le village et les alentours. Un jour, les bleus alignèrent le long d'un mur les personnes qu'ils purent saisir : vieillards, femmes, enfants, et les égorgèrent sans pitié et sans pudeur. Ils suspendirent même au branches des pommiers du village des cadavres de femmes pour épouvanter les Vendéens.
La Chênelière, voisine de la Chambaudière et de Legé, où les bleus ont souvent campé, eut le même sort que la Chambaudière et la Glossetière. Plusieurs personnes furent jetées dans un puits situé au bas du village. Les habitants de la Chênelière, de même que ceux de l'Aubier, cherchèrent refuge dans la forêt de Grand'Landes. Ils y transportèrent des provisions de vivres, des instruments de cuisine. Mais les bleus les y découvrirent et mirent le feu à la lisière de la forêt qui porta le nom de "le brûlé". Tous les hommes de la Chênelière s'étaient enrôlés dans l'armée vendéenne. Ces souvenirs ont été rapportés par une femme Mandin et par Pierre Musseau.
Cet homme disait aussi que le curé des Lucs, M. Barbedette, qu'on surnommait "le curé grand-bot", aurait séjourné quelque temps à la Chênelière. Il était renommé pour son habileté à déjouer les recherches des révolutionnaires. Il se déguisait en tous genres de costumes et changeait souvent de résidence, soit dans sa paroisse du Grand-Luc, soit dans d'autres, si bien qu'il ne fut jamais pris par les ennemis de la Religion.
Comme la Chambaudière, le Chiron fut occupé militairement et sans doute tour à tour selon qu'ils étaient les maîtres de la contrée, par les bleus et par les Vendéens. Le Chiron en effet est un point stratégique plus encore que la Chambaudière, car de là on peut surveiller les alentours et plusieurs routes ou chemins suivis par les troupes adverses. Le centre du cantonnement était la maison située sur le point le plus élevé, avec des dépendances importantes. A cause de cette destination on lui donna le nom de "Quartier", qu'elle conserva depuis. Le champ qui est derrière servait de champ de manoeuvre et de tir et il reçut à cause de cela le nom de "Parc", et le champ suivant servait à enterrer les morts des environs et il prit le nom de "Cimetière".
Le Chiron et les villages situés sur la crête, Rotelière, Lande, Fontenet, Embardières, furent incendiés et un grand nombre de leurs habitants furent tués ou plutôt sauvagement massacrés. Le moulin des Embardières fut incendié, mais on le reconstruisit plus tard. Il y en avait un aussi à la Rotelière, juste dans l'emplacement de la croix de la Mission de 1945. Sans doute servait-il de poste d'observation. Aussi fut-il entièrement détruit après avoir été incendié. En déblayant le tertre du moulin pour y établir les assises de la croix, on y découvrit des traces d'incendie.
Le moulin de la Rotelière sur le cadastre de 1833
Le grand village des Embardières attira particulièrement l'attention des incendiaires et des massacreurs, qui y firent de nombreuses visites à la recherche de cachettes dans cet entassement de bâtiments de toutes sortes, surtout après qu'il fut devenu un amas de ruines. De fait en découvrirent-ils et tuèrent-ils beaucoup de monde, surtout les 8, 11 et 12 février 1794. Peut-être ces tueries furent-elles accomplies par une des "colonnes infernales" qui durent traverser le pays vers ces dates. Une des plus fructueuses fut peut-être celle du 26 mars, où ils tuèrent 6 femmes cachées dans la maison habitée maintenant par la famille Erceau. Une d'elle avait dans ses bras une toute petite fille que les bleus se contentèrent de jeter à terre, où elle fut ramassée peu après et sauvée. Elle devint une femme Charrier, de la Lande.
Les Embardières possédaient alors un grand calvaire dans le genre de celui du Côteau, avec une Pieta également. Les soldats bleus se préparaient à le démolir après avoir incendié le moulin, lorsqu'un de leurs officiers arriva et le leur défendit. Ce calvaire, situé un peu plus haut que le petit calvaire d'aujourd'hui, a été démoli en 1845 pour faire la route.
Voici la liste des personnes tuées aux Embardières par "les ennemis de la Religion", dont les noms ont été conservés dans les archives :
1) Louis Bignon, 32 ans, tué le 18 octobre 1793.
2)Jean Orceau, meunier, 49 ans, tué le 18 octobre 1793.
3) Marie Charrier, 48 ans, tuée le 29 janvier 1794.
4)Marie Charrier, sa fille, 20 ans, tuée le 29 janvier 1794.
5) Pierre Lachaise, 55 ans, tué le 8 février 1794.
6) Jacques Lachaise, son frère, 48 ans, tué le 8 février 1794.
7 )Gilles Barreteau, 72 ans, tué le 8 février 1794.
8) Renée Perrocheau, femme de Pierre Orceau, tuée le 8 février 1794.
9) Marie Perrocheau, Vve Barreteau, 48 ans, tuée le 11 février 1794.
10) Marie-Anne Baudouin, femme Barreteau, 70 ans, tuée le 11 février 1794.
11) Jeanne Grelier, épouse de Jacq. Charrier, 20 ans, tuée le 12 février 1794.
12) Louise Guillet, épouse de Mathurin Poingt, 70 ans, tuée le 18 février 1794.
13) Charles Pérocheau, veuf de Marie Dugast, tué le 21 février 1794.
14 )Pierre Orceau, 70 ans, tué le 22 février 1794.
15) Etienne Barré, tué le 27 février 1794.
16) Jean Barré, son fils, 27 ans, tué le 27 février 1794.
17 )André Potier, époux de Marie Nau, 69 ans, tué le 16 mars 1794.
18) Pierre Yvernogeau, tué le 17 mars 1794.
19) Pierre Goéchon, tué le 12 décembre 1795.
20) Dans le même temps, le Fontenit eut :
21) Jean Crété, 85 ans, tué le 13 février 1794.
22) Jeanne Simonneau, tuée le 15 février 1794.
23) Clément Bignon, 70 ans, tué le 18 février 1794.
24) Pierre Péraudeau, 66 ans, tué le 22 février 1794.
25) Charles Charrier, 23 ans, tué le 26 février 1794.
26) Marie Charrier, sa soeur, 20 ans, tuée le 26 février 1794.
Essayons de nous figurer l'effroi dans lequel vivaient les habitants de ces villages et bien d'autres, où se commettaient ces horribles tueries.
LES HEURLIN
Le chroniqueur des faits de l'époque révolutionnaire à Saint-Etienne-du-Bois cite à l'admiration de ses lecteurs Jacques Heurlin et son fils Martin, successivement sacristains de la paroisse en même temps que fossoyeurs, pour leur dévouement à enterrer les morts nombreux qu'on leur apportait ou qu'ils allaient eux-mêmes chercher, soit qu'ils fussent morts de leur bonne mort, soit qu'ils aient été tués par les Bleus, car le séjour ou le simple passage de ces cruels soldats révolutionnaires étaient toujours marqués par des massacres d'habitants. C'est ainsi qu'un soir, aidé d'un métayer des Emérillères, Jacques Heurlin alla chercher dans une charrette six femmes de ce village qui ne voulant pas dire où étaient leurs maris, avaient été emmenées et massacrées près du moulin de Rochequairie. Leurs cadavres étaient là depuis plusieurs jours et sentaient déjà mauvais. Il les enterra, non dans le cimetière où il n'y avait plus de place, mais dans le bas-jardin de la cure où il avait préparé une fosse. Mais une fois arrivés là ils s'aperçurent qu'il leur manquait un corps, qui était tombé de la charrette par suite des chaos du chemin. Ils retournèrent le chercher et le trouvèrent près du Rorthais.
Une autre fois c'est entre la Savarière et la Chiffaudière que Jacques Heurlin alla avec une charrette à boeufs chercher les corps de 15 femmes qui y avaient été tuées. Il devait les enterrer dans un champ qui servait lui aussi de cimetière de secours et qui touche au petit pré où se trouve la "Vieille Croix" encore debout près de la Bagatelle. Mais en route il fut averti qu'un commandant républicain se trouvait avec sa troupe près de cet endroit et lui barrait le passage. Heurlin, ne pensant qu'à l'accomplissement de sa bonne oeuvre, va le trouver et lui demande la permission de faire passer sa charrette et de mettre en terre les cadavres qu'elle contenait. Le chef trouva sa démarche légitime et lui donna même quatre soldats pour l'aider dans sa triste besogne et, comme marque de satisfaction, lui offrit une prise de tabac dans une belle tabatière en or. - Ces détails ont été racontés à M. le Curé Boutin par Angélique Heurlin, veuve Foucaud, petite-fille de Jacq. Heurlin, âgée de 86 ans.
Quelques personnes ayant exprimé le désir de connaître les détails historiques recueillis et écrits par M. le Curé Boutin sur les villages de Saint-Etienne, et survenus surtout en fin d'année 1793 et début de 1794, je vais les reproduire dans le Bulletin. Ces notes ont dû être prises et consignées dans le registre de la chronique paroissiale au hasard des sorties de M. Boutin dans la campagne, car on ne peut pas dire qu'il y suit un ordre quelconque. Je le suivrai cependant tel quel.
Le Bulletin a déjà donné des faits concernant certains villages, en particulier à propos des camps de la Chambaudière et du Chiron.
Je rappelle que M. le Curé Boutin recueillit les faits qu'il note de la bouche des anciens des villages. Il les nomme habituellement. Mais c'était il y a environ 70 ans ; ces vieux sont morts il y a longtemps et même on ne trouve plus trace de leurs noms dans les villages, ordinairement. Certaines personnes d'aujourd'hui pourront sans doute quand même y reconnaître le nom de leurs ancêtres paternels ou maternels.
"Les vieillards que j'ai interrogés, dit M. Boutin, touchant le sort de leurs villages à cette époque, m'ont presque tous répondu par ce mot laconique et tristement révélateur : il a été brûlé ! ..."
LA LARDIERE
Mes renseignements sur la Lardière viennent d'un habitant de ce village, Jean Loizeau, âgé de 77 ans. Il m'a affirmé que toutes les maisons de la Lardière furent brûlées, à l'exception d'une seule, qui sert actuellement (il y a 70 ans) de boulangerie à sa famille et dans laquelle se voit un vieux pétrin d'un seul morceau, creusé dans un tronc d'arbre. Un certain nombre de femmes et d'enfants y furent massacrés.
Un jour une femme revenait de la fontaine. Des bleus qui la rencontrèrent se saisirent de sa cruche et l'en frappèrent si rudement à la tête qu'elle tomba sans mouvement sur le terrain. Elle n'était heureusement qu'étourdie par le coup. - Un autre jour ils réquisitionnèrent plusieurs femmes, parmi lesquelles se trouvait la future mère dudit Loizeau, pour aller conduire un chargement de vin à Legé. Quand elles y furent arrivées, on voulut tuer leurs boeufs pour les manger. "Mais, citoyens, dit l'une d'elles avec beaucoup de sang-froid et d'à-propos : si vous mangez nos boeufs, nous ne pourrons plus vous amener de vin !" Cette réplique fut trouvée de bon goût, car les citoyens épargnèrent les boeufs et poussèrent même l'amabilité jusqu'à offrir à boire à ces paysannes dans une belle coupe en argent. De retour chez elles ces femmes étaient tellement effrayées qu'elles ne voulurent plus rester dans leurs maisons dans la crainte de recevoir de nouveau la visite des bleus. Elles abandonnèrent tout pour aller se cacher dans les champs. Pour ceux-ci ne trouvant plus personne dans le village lorsqu'ils y passèrent de nouveau, ils mirent le feu aux maisons. - Jean Loizeau tenait ces détails de son père François Loizeau, qui avait suivi Charette, Savin et Lecouvreur, et avait participé à 52 combats sans recevoir de blessure. Les bleus passaient souvent à la Lardière comme ils avaient un camp non loin de là, à la Chambaudière.
CHENELIERE ET AUBIER
Presque toutes les maisons de ces villages furent brûlées, celle des Mandin entre autres. Des massacres y furent commis et plusieurs personnes furent jetées dans le puits situé dans un pré en bas du village. Une grand'mère Mandin surprise près de sa maison fut massacrée sans pitié. Tous les habitants de la Chênelière et de l'Aubier avaient coutume de se cacher dans la forêt de Grand'Landes. Ils y avaient emporté tous les ustensiles nécessaires pour cuisiner. Ils y moulaient même du blé au moyen de petits moulins à bras. Mais les bleus les y découvrirent et mirent le feu à ce côté de la forêt qui a gardé le nom de "Brûlé".
Tous les hommes de la Chênelière et de l'Aubier prirent part à l'insurrection et s'enrôlèrent dans l'armée de Charette. Quand les bleus occupaient leur camp de la Chambaudière, ils avaient des sentinelles dans toutes les directions, afin de n'être pas surpris par l'armée de Charette ; et le soir, on entendait les sentinelles se passer ce mot : "Sentinelles, garde à vous ! Charette marche sur vous !" Mais un soir qu'il y avait liesse au camp républicain à la suite d'une bonne affaire contre les Vendéens, on entendit cette variante ironique : "Sentinelles, garde à vous ! Charette n'a plus qu'une roue !"
Tous ces renseignements sur la Chênelière et l'Aubier m'ont été fournis par une femme Mandin et le nommé Pierre Musseau, âgé de 69 ans et très instruit de toutes ces choses. D'après lui, M. Barbedette, curé du Grand Luc, surnommé "le curé Grand-Bot", aurait séjourné quelque temps à la Chênelière. Il était très populaire dans les alentours et avait une renommée légendaire à cause de son habileté à déjoué les recherches des révolutionnaires. On lui prêtait même un pouvoir mystérieux sur ce point. En voici un exemple rapporté à M. Boutin par Augustin Boilève, du Marché-Nouveau. (Il tient plus de la légende que de l'histoire).
Un jour que le curé Grand-Bot traversait les Landes de la Loubisse, ceux qui l'accompagnaient lui signalèrent une bande de républicains qui marchaient sur lui à pas précipités. Nullement déconcerté à cette vue, il planta son bâton au milieu de la route et continua son chemin. Les bleus arrivés à l'endroit où se trouvait le bâton furent pris soudain comme d'un accès de folie et se mirent à danser autour. Pendant ce temps le curé Grand-Bot, évidemment, disparaissait dans le bocage.
LES EMBARDIERES
On a déjà vu (bulletin de décembre 1955) que le village des Embardières avait été souvent visité par les troupes révolutionnaires, que toutes les maisons avaient été incendiées et qu'un grand nombre de personnes avaient été massacrées. Les Embardières eurent cependant l'avantage de posséder dans leurs murs pendant un temps relativement long, un prêtre, M. Thouret, natif du diocèse d'Angers. Il dut y venir après ces massacres et y resta jusqu'à 1797. Il habitait tantôt aux Embardières, tantôt au Fontenit. Il descendait aussi au bourg où il aurait fait au moins un baptême dans la famille du sacristain Heurlin, à la Poissonnière, dans la maison possédée depuis par Erceau. Les archives de la mairie conservent quelques notes de lui concernant le massacre de plusieurs hommes des Embardières en 1794 et 1795.
AU FONTENIT
Toutes les maisons furent également brûlées.
LE MARCHÉ-NOUVEAU ET LE RORTHAIS eurent le même sort que les autres villages. Les moulins des Emérillères furent incendiés. On a déjà vu que les bleus y prirent et les tuèrent au moulin de Rochequairie six femmes qui ne voulaient pas dire où étaient leurs maris. M. le Curé des Lucs, le curé Grand-Bot, dont on a déjà parlé a demeuré entre autres lieux dans le voisinage des Emérillères et de la Renardière. Il aurait dit la messe dans un champ appelé les Grandes Landes, aux environs de la Renardière et du Marché-Gantreau.
A la Chiffaudière et à la Savarière, les bleus se signalèrent par les mêmes cruautés. Quinze femmes cachées dans cette vaste campagne inhabitée, entre ces deux villages, y furent fusillées. Le sacristain Heurlin les amena en charrette, enterrer près de la Bagatelle, comme on l'a déjà vu. Un nommé Thomas Paudeau faillit faire partie des victimes de cette tuerie. Il avait dans ce coin de campagne creusé une grande excavation en terre et l'avait recouverte d'un tas de fagots de bois. Il y cachait ses enfants et leur portait à manger. C'est le fils d'un de ces enfants qui a rapporté le fait à M. le Curé Boutin. Comme quoi les pauvres habitants usaient de toutes sortes de moyens pour échapper et faire échapper les leurs à la mort dont ils étaient toujours menacés.
LES FOUGERES, au rapport de la veuve Morandeau, eut moins à souffrir que les autres villages. A quoi dut-il sa tranquillité relative ? On ne sait. Il aurait été un des refuges du curé Grand-Bot du Grand-Luc.
A LA BERSAUDIERE, on trouve un autre expédient bien imprévu pour échapper au massacre. Le village bien qu'incendié abritait quelques habitants. Un jour ils virent tout à coup des bleus dans le voisinage. Epouvantés, ne sachant que devenir, ils entrèrent pêle-mêle dans la boulangerie et sans plus réfléchir, voyant la gueule du four ouverte, les femmes et les enfants s'y entassèrent et deux hommes en fermèrent l'entrée et se sauvèrent précipitamment. Les bleus qui les virent sortir et qui entrèrent dans la boulangerie pour voir s'il en restait d'autres, n'eurent pas l'idée d'ouvrir la porte du four, mais n'eurent d'autre souci que de se mettre à la poursuite des deux hommes. C'est ainsi que les femmes et les enfants des villages furent sauvés. Mais l'un des deux hommes fut atteint et tué par les bleus.
LA BOUTIERE
Gilles Guillet, vieillard de 93 ans, très bien conservé, qui a toujours habité la Boutière, a dit qu'à l'époque révolutionnaire tout le village avait été brûlé, que les murs seuls restaient. Il a souvent entendu raconter par sa mère que la veille de sa naissance elle monta elle-même sur le faite d'une maison pour éteindre le feu. Le village étant placé près de la route de Palluau à Legé, dut recevoir souvent la visite des bleus. Aussi les habitants avaient-ils abandonné leurs maisons. Gilles Guillet racontait que dès le matin son père liait ses boeufs et emmenait toute sa famille dans les champs à l'écart. Le dit Guillet a été baptisé à la Boutière même par M. Guillon, aumônier des armées catholiques. L'acte de ce baptême se trouve à la mairie de Saint-Etienne.
LA MARTINIERE eut le même sort que la Boutière. Toutes les maisons furent brûlées à part une seule, qui servait jadis de gerberie à un cultivateur nommé Perdriau, au bas du village. Les bleus y firent de nombreuses victimes dont les corps furent enterrés dans un pré voisin appelé le pré de la Martinière. Anne-Marie Angibaud, veuve Loué, disait que sa grand-mère paternelle avait été du nombre des victimes. Et sa mère lui avait souvent raconté que pour échapper à la mort, elle et ses parents allaient se cacher dans une gîte. Comme alors on était sans cesse sur le qui-vive à cause des alertes fréquentes, plusieurs préférèrent quitter le village et suivre l'armée de Charette.
LA SALLE
Au rapport de Pierre Erceau, charpentier, âgé de 57 ans, le village de la Salle, que son grand-père habitait, fut entièrement incendié, à l'exception d'une maison, propriété d'une famille Gillaizeau. Quand les bleus approchaient du village les habitants se sauvaient dans les bois de Chantebusain. Les hommes montaient dans les grands arbres pour surveiller les allées et venues des Républicains, qui avaient un camp dans les vignes proches du bourg de Palluau, appelées depuis "Vignes du Camp". Une fois cependant on fut surpris. On venait de mettre le pain au four et au moment où il était cuit les bleus vinrent et s'emparèrent du pain frais.
LA MARCHEZIERE
Située dans ces mêmes parages voisins de Palluau, la Marchezière fut souvent traversée par les soldats républicains qui l'incendièrent et la pillèrent totalement. Un nommé Jean Fisson, de ce village, âgé de 69 ans, racontait que la belle-mère de sa femme parlait souvent de nombreuses apparitions des bleus dans le village, et que les habitants étaient obligés de se sauver et de se cacher dans un champ d'ajoncs très écarté et très fourré, où ses parents avaient emporté les ustensiles de cuisine et même un lit dans lequel elle avait elle-même couchée. C'était près d'un grand arbre du haut duquel les hommes surveillaient les mouvements des révolutionnaires.
PISSOT, BEL-AIR, LA MALADRIE
Situés encore plus près de Palluau, ces trois villages étaient journellement sous les menaces et les méfaits des républicains et n'avaient de tranquillité que lorsque ceux-ci étaient tenus à distance par les armées vendéennes. Un nommé François Laucoin, 70 ans, dont la famille habitait alors à Bel-Air et où il est né lui-même, a raconté ces choses qu'il tenait de sa mère lors du fait suivant : Les habitants de Bel-Air étaient tous partis assister à une messe célébrée aux Embardières par M. Thouret, dont on a parlé précédemment. Seuls restaient au village les vieillards et les enfants au nombre de dix ; encore s'étaient-ils cachés dans une vigne voisine. Ils y furent surpris par une troupe de bleus qui les massacrèrent tous. Il y avait entre autres victime la grand'mère de Laucoin que l'on enterra avec les autres sans doute à l'endroit du massacre. Tous les ans la mère de Laucoin allait le soir de la Toussaint réciter son chapelet dans cet endroit. Un jour que les habitants de Pissot avaient pétri du pain et se préparaient à le mettre au four, les bleus les surprirent. Ils n'eurent que le temps de se sauver, abandonnant la pâte aux républicains. Ceux-ci furieux d'avoir manqué les habitants, et pour qu'ils ne retrouvent pas leur pâte, la répandirent de tous côtés aux alentours. Cependant, tellement la nourriture était rare, lorsque les habitants revinrent, ils prirent la peine de recueillir ce qu'ils purent de cette précieuse pâte et la firent cuire.
LA GRANDE-VILLENEUVE, LE RONDAIS
Voici ce que relate M. Boutin touchant ces villages : "Le village de la Grande-Villeneuve reçut souvent la visite des bleus qui marquèrent leur passage par le pillage et l'incendie. Les maisons devinrent la proie des flammes. Seul un hangar qui sert actuellement (il y a 70 ans) d'atelier à Beaugé, charpentier, échappa à la destruction générale. Ce hangar présente une forme de construction inconnue dans nos contrées : il ressemble comme genre aux maisons en bois de nos anciennes villes. Voici à quelles circonstances il doit d'avoir échappé à l'incendie : un certain nombre de personnes du village, surprises sans doute par l'arrivée imprévue des bleus, s'y étaient cachées et avaient fermé la porte sur elles. Pendant ce temps les bleus incendiaient le village, et ces personnes craignant avec juste raison qu'ils ne vinrent mettre le feu au hangar, employèrent la ruse suivante pour détourner leur attention ; elles mirent elles-mêmes le feu à la porte du hangar, de sorte que, quand les bleus passèrent devant ils se figurèrent que ce feu avait déjà été allumé par un des leurs et portèrent plus loin les fagots qui sans cette ruse auraient probablement servi à incendier le hangar. Puis à peine les bleus s'étaient-ils éloignés que les personnes enfermées dans ce lieu s'empressèrent d'éteindre le feu qu'elles avaient elles-mêmes allumé. Néanmoins, malgré tous leurs soins, le hangar courut de grands dangers puisque plusieurs pièces de bois qui servent de montants dans les murs ont été léchés et noircis par les flammes. Je tiens ces détails de Pierre Beaugé lui-même".
Au témoignage de Pierre Pérocheau, du même village, la fureur des républicains se porta surtout sur les moulins de la Grande-Villeneuve et sur ceux du Rondais. La Grande-Villeneuve avait alors trois moulins et c'est même sous le nom de "village des trois moulins" qu'on le désignait dans le pays. Ces moulins et ceux du Rondais furent incendiés à plusieurs reprises, mais d'abord sans succès, car les femmes de ces villages, une fois les bleus partis, accouraient bien vite et éteignaient le feu. Quelques-unes d'entr'elles ayant été surprises un jour dans l'acte d'un tel crime, furent immédiatement arrêtées. On fouilla tous les alentours de la Grande-Villeneuve et du Rondais et les femmes qu'on y trouva furent amenées sous un cerisier dans un champ proche des maisons de la Grande-Villeneuve, puis massacrées sans pitié. On incendia ensuite les moulins, qui brûlèrent entièrement.
Les habitants de ces deux villages allaient se cacher dans un bois près de la Jaubretière. On y avait porté un nombre considérable de lits.
LA SEILLERIE, bien que située dans un épais bocage peu accessible fut comme les autres villages visité, pillé et incendié par les révolutionnaires. Les habitants se sauvaient dans la direction de la forêt de Grand'Landes, mais n'y entraient que si des hommes montés sur de grands arbres signalaient l'approche des bleus. Si au contraire ces hommes signalaient le départ de l'ennemi, les habitants rentraient vite combattre l'incendie de leurs demeures. Malgré ces précautions plusieurs personnes ne purent échapper au massacre.
C'est toujours la même répétition à mesure que l'on parcourt les villages de la paroisse, puisque tous ont été incendiés et pillés et la plupart plusieurs fois.
Ainsi LA GROLLE, bien que écartée des grands chemins, fut plusieurs fois victime de la visite des bleus. Au dire de Gabriel Fillâtre, 84 ans, dont la famille habitait ce village, les habitants durent fuir bien souvent les meurtriers, et se cacher même la nuit dans les champs. Il en fut de même du village et des habitants de l'YVERNOGERE, où tout passa par les flammes. On rapporte en particulier que la famille Musseau dut enfouir au pied d'un arbre pour les sauver ses papiers de famille.
Un nommé Jean Trichet, du village de LA RIVIERE, a raconté à M. le Curé Boutin que l'incendie n'épargna aucune maison de ce village, qui alors en comptait une dizaine. Ses parents n'osaient rester dans leur maison en ruines que la nuit. De jour ils allaient se cacher dans le bois de Rochequairie qui était très fourré.
LE PATIS et LA VIEILLE ROCHE eurent le même sort d'après le dit Trichet. Au rapport de Gilles Guittet, de la Boutière, un prêtre dont on n'a pas retenu le nom, aurait été caché à la Vieille-Roche chez la famille Guillon. Au Pâtis, une ou deux maisons auraient échappé à l'incendie. Une veuve Rambaud a raconté à M. Boutin que sa grand'mère avait été tuée dans la partie du village appelée la Barretière. Surprise par les bleus elle eut cependant le temps de cacher ses enfants, encore tout petits dans un mauvais toit à cochons. Les bleus la sachant fortunée lui demandèrent de l'argent ; sur son refus, ils se mirent à piller la maison. Or ils trouvèrent dans un meuble une cocarde blanche (insigne des combattants vendéens). C'en fut assez pour mériter la mort, et aussitôt d'un coup de fusil ils la tuèrent. Puis, quand les meurtriers furent partis, les enfants sortirent de leur cachette et allèrent à la recherche de leur mère qu'ils trouvèrent étendue, sans vie, au milieu de la maison. Parmi eux était, âgée de cinq ans, la future mère de la ci-dessus veuve Rambaud.
Dans ces mêmes parages, ROCHEQUAIRIE, LA THIBAUDIERE et LA BOULOGNE subirent les mêmes ravages à l'exception toutefois du vieux château de Rochequairie, où un petit bâtiment seulement fut incendié, d'après Henri Chabot, dont la famille habitait et cultivait la métairie du château dès avant la révolution. - Au dire d'une femme Guittet, de la Thibaudière, un prêtre se cacha quelque temps dans ce village, et y dit la messe dans le grenier d'une maison située au bord de la route. - D'après Louis Rabaud, de la Boutière, dont les ancêtres habitèrent La Boulogne, ce village fut incendié et pillé comme les autres.
LE GUÉ-AU-CHAUD, LA CROIX-BLANCHE, LA PÉCOULTIERE, qui forment, on peut dire, une seule et même agglomération, étaient bien placés sur le bord de la grand'route pour recevoir la visite des révolutionnaires et subir leurs méfaits. La proximité du camp des bleus, dans les vignes de Palluau, comme les allées et venues des troupes entre Legé et Palluau, firent que les incendies et les massacres y furent souvent répétés. Le Gué-au-Chaud fut même le théâtre d'un des premiers combats entre partisans de la Révolution et défenseurs de la religion. Ce fut le 12 mars 1793. Il y eut des morts. On connaît les noms d'une dizaine, tant de Saint-Etienne que de Palluau et de Legé. Ce combat était la suite de ceux qui avaient eu lieu les jours précédents à Legé et Palluau.
Une femme âgée, Marie Péraudeau, Vve Lancoin, dont la famille habita la Pécoultière, a raconté qu'un certain nombre de personnes furent trouvées par les bleus enfermées dans une petite maison de la Pécoultière et qu'elles y furent brûlées vives. Sa mère avait vu les ossements calcinés des victimes. Son grand'père paternel, soldat dans l'armée de Charette, portait le drapeau orné de l'image du Sacré-Coeur dans une bataille près de St-Laurent-sur-Sèvre et y reçut une blessure mortelle.
LA MERCERIE si près du bourg de Saint-Etienne, suivit à peu près le sort de celui-ci, c'est-à-dire qu'il subit maintes fois incendies et tueries. Elle fut entièrement brûlée, écrit M. Boutin, et une guerre à mort fut déclarée aux habitants, même les plus inoffensifs. Il cite plusieurs faits. Un jour les bleus surprirent une femme enfermée dans une maison avec ses jeunes enfants. Ils les fusillèrent. Cependant la mère échappa à la mort parce que, dès la première détonation, étant tombée comme morte de frayeur, les soldats la crurent réellement morte et la laissèrent. Après leur départ elle revint à elle et se releva couverte du sang de ses enfants. Un autre jour c'est une vieille femme très sourde qui, malgré les avertissements de ses voisins, suivait un sentier par lequel venaient des bleus, qui la tuèrent. Une autre fois, les bleus fusillèrent une femme, laissant deux orphelins : une fille de 7 ans et un petit garçon de 2 ans, qui ne se trouvaient pas avec elle. Mais la fille, voyant les massacreurs venir vers elle, prit son frère, le jeta dans le coin d'une masure découverte, pleine de grandes herbes, où il s'endormit, tandis qu'elle-même alla se cacher ailleurs. Après le passage des malfaiteurs, elle retrouva son frère. Ces renseignements et d'autres ont été donnés par Virginie Pénisson, femme Péraudeau, dont la famille habitait depuis longtemps la Mercerie. Elle dit aussi que le moulin de la Mercerie et le village des Vergnes furent incendiés.
Ici s'arrêtera ce récit pitoyable de la vie à Saint-Etienne-du-Bois pendant les années révolutionnaires. Et ce ne sont là que quelques épisodes entre beaucoup d'autres, qui ont été oubliés ou n'ont pas été recueillis à temps. Si quelques petits villages n'ont pas été cités, cela ne veut pas dire qu'ils ont échappé au sort des autres, puisque c'est un point certain et historique que le bourg et tous les villages de St-Etienne-du-Bois ont été incendiés maintes fois et ont subi des massacres de leurs habitants, sauf la Tullévrière, qui bénéficia, peut-on croire, d'une protection spéciale, due à sa chapelle dédiée à la Sainte Vierge.
Voici une liste longue, bien qu'incomplète, de personnes en majorité de Saint-Etienne, mises à mort, souvent cruellement massacrées au cours des années de la Révolution française : 1793 et suivantes. On peut considérer comme certain qu'un grand nombre d'entre elles ont été tuées parce que restées attachées à la Religion et sont entrées au Ciel comme martyrs, mais nous ne les connaissons pas :
Louise Fleury, veuve Tardy, 40 ans, et Marie Thibault, veuve Lhéritaud, 40 ans. Toutes deux emmenées à Paris pour y être jugées, en même temps qu'un grand nombre de femmes de Palluau, Grand'Landes, Beaufou, Legé. Elles y furent condamnées à mort pour avoir été "les instruments et les complices des prêtres" (25 juin 1794).
27) Pierre Traineau, 62 ans, laboureur, condamné à mort à Nantes, 6 janvier 1794, avec 200 autres.
28) Louis Martineau, dit "Saint-Louis" sacristain, condamné et exécuté à Nantes le 24 août 1794.
29) Jean Bayé, condamné à mort à Châteaubriant : 1er janvier 1794.
30) Guillaume Julien, Alexandre Massé, 33 ans, Louis Jouheneau, 38 ans.
31) Lachaize, notaire, les deux pères de cinq enfants, tous tués à Palluau les 11 et 12 mars 1793.
32) Marie-Madeleine Delaunay, épouse de Jean Bossis, 60 ans, massacrée devant le portail de sa maison (maison Chaignon actuellement) au moment où elle s'échappait.
33) Charles Leroy, 50 ans, "mort martyr pour la Religion", le 25 mars 1793, à la Mercerie
34) Louis Bignon et Jean Orceau (32 et 40 ans), des Embardières, "tués le 18 octobre 1793 par les ennemis de la Religion".
35) François Mignon, 36 ans, de la Renardière, tué le 23 avril 1793 à la Vivantière.
36) Etienne Chabot, 6 septembre 1793.
37) Jean Vincent, de la Mercerie, tué le 25 septembre 1795 à St-Cyr-en-Talmondais.
38) Pierre Goëchon, tué aux Embardières, le 12 décembre 1795.
39) Marie Charrier, mère, âgée de 48 ans, tuée aux Embardières
40) Marie Charrier, fille, âgée de 20 ans, les deux tuées le 29 janvier 1795.
41) Pierre Lachaize, 55 ans, et Pierre Lachaize, 48 ans, frères, tués aux Embardières le 8 février 1794.
42) Marie-Anne Baudouin, épouse Barreteau, 70 ans, tuée aux Embardières le même jour.
43) Jeanne Grelier, épouse Charrier, 20 ans, tuée aux Embardières le 12 février 1794.
44) Jean Crété, 85 ans, tué au Fontenit le 13 février 1794.
45) Jeanne Simonneau, tuée le 15 février 1794.
46) Clément Bignon, 70 ans, tué au Fontenit le 18 février 1794.
47) Louise Guillet, épouse de Mathurin Poingt, 70 ans, tuée aux Embardières le 18 février.
48) Charles Pérocheau, tué le 21 février 1794 (veuf de Renée Pérocheau, tuée le 8).
49) Pierre Péraudeau, 66 ans, tué le 22 février 1794 au Fontenit.
50) Marie Babinot, veuve de Pierre Charrier, 72 ans, tuée au Chiron le 22 février 1794.
51) Etienne Barré, charpentier, tué aux Embardières le 27 février 1794.
52) Jean Barré, charpentier, tué aux Embardières le 27 février 1794
53) Jean Péraudeau, 50 ans, tué à la Lande, le 3 mars 1794.
54) Julien Royer, tué au bourg le 6 mars 1794.
55) Jeanne Savariau, tuée à la Rotelière le 5 mars 1794.
56) Françoise Rousseau, 62 ans, tuée le 9 mars 1794.
57) Jacques Montassier, 60 ans, tué au bourg, même jour.
58) Même jour, Marie-Anne Montassier, 22 ans
59) Jean Musseau, 30 ans, tué le 6 mars 1794.
60) André Potier, 60 ans, tué aux Embardières le 16 mars 1794.
61) Pierre Yvernogeau, tué le 17 mars 1794.
62) Marie Charrier, du Fontenit, tuée aux Embardières, le 23 mars 1794 avec 5 autres femmes
63) Charles Charrier, son frère, 23 ans, tué au Fontenit le même jour.
Six femmes, prises entre les Emérillères et le Rorthais, fusillées au pied du Moulin de Rochequairie.
64) Femme Perrocheau, massacrée à la Grande-Villeneuve
65 & 66) Femmes Angibaud et Alain massacrées à la Martinière.
67) Femme Pénisson, massacrée à la Mercerie.
68) Femme Rambaud, massacrée au Pâtis.
69 ) Femme Lancoin, massacrée à Bel-Air.
70 à 78) Neuf autres femmes de Bel-Air, massacrées un dimanche dans une vigne voisine.
Enfin voici la liste de 22 personnes du village de la Tullévrière qui, prétendant fuir les bleus qui, croyait-on, venaient incendier le village, tombèrent entre leurs mains et furent massacrées à la Croisée des Mathes et enterrées au même lieu :
79 & 80) Jacques Barré et Jeanne Vincent, sa femme.
81 à 84) Marie et Marie-Anne Barré, leurs filles.
85) Jeanne Pénisson, leur bru.
86 & 87)Pierre Barré et Jean Barré, leurs fils.
88 & 89) deux enfants Barré-Pénisson
90) Marie Orceau, leur servante, âgée de 16 ans.
91) Anne Braud, femme de Jean Prineau, 48 ans.
92) René Devineau, 50 ans.
93) Jeanne-Catherine Prineau, âgée de 7 ans.
94) Jeanne Prineau, fille de Pierre Prineau et Jeanne Braud, âgée de 55 ans.
95) Marie-Anne Tulièvre, âgée de 30 ans.
96) Marie Boucard, veuve de Pierre Braud, 50 ans.
97) Joseph Braud, époux de Anne Prineau, âgé de 45 ans.
98 à 102) François Ballays, Jacques Orceau, François Tulièvre, Jeanne Gareau, Etienne Piberne.
103) Pierre Braud, fils de Pierre Braud et de Marie Charrier, 60 ans, tué au mois de juillet.
104 & 105) Puis deux officiers de l'Armée Vendéenne : Louis-Marc-Antoine Savin du Parc, officier vendéen, fusillé à Noirmoutier avec le général d'Elbée, âgé de 25 ans.
106) Jean-René-François Savin, général divisionnaire de l'armée de Charette, pris à la Sauzais des Lucs et fusillé à Montaigu, comme on l'a vu dans le numéro de mars de ce bulletin.
INCENDIE DE L'ÉGLISE
Nous avons déjà vu que la paroisse de Saint-Etienne-du-Bois fut très éprouvée pendant les années de guerre de Vendée 1793-1794. Pour tout résumer en peu de mots : tous les villages, sauf celui de la Tullévrière, furent saccagés et incendiés et leurs habitants qui y furent trouvés vieillards, femmes, enfants, furent ou tués par les armes à feu, ou massacrés à coups de sabres, ou brûlés vifs dans leurs maisons ou leurs fours. Monsieur le chanoine Boutin, qui fut curé de Saint-Etienne depuis 1883 jusqu'à 1913, a fait dès le début de son pastorat une enquête dans tous les villages, interrogé tous les anciens de 60 à 80 ans, fils ou filles de ceux qui avaient été témoins de ces lugubres événements et a relaté dans la chronique paroissiale les détails recueillis sur chaque village. Cela remplit 20 grandes pages de 34 sur 22. Le bulletin en aurait pour toute une année à reproduire tout cela. Si je savais que cette publication ferait plaisir à beaucoup de lecteurs, je le ferais quand même.
Pour aujourd'hui, je vais du moins donner, en le résumant, ce qui regarde le bourg. Les bleus y firent de nombreuses apparitions, bien que souvent la présence de la Division de Savin les protégeât. Ici comme ailleurs ils marquaient leur passage par des incendies et des tueries. Lorsque leur approche était signalée un même cri lugubre se répétait le long des rues : "Les bleus ! les bleus ! Tout le monde aux Tabarits !" "Les Tabarits" est le nom d'un lieu situé derrière la Renardière. A ce cri d'alarme les vieillards, les femmes, les enfants s'enfuyaient au plus vite au milieu des gémissements des uns et des pleurs des autres. Et au retour, après l'alerte, quel chagrin de trouver sa demeure saccagée, incendiée, quelques personnes qui n'avaient pas pu ou pas voulu partir, massacrées.
Cependant les incendiaires furent assez longtemps sans s'attaquer à l'église paroissiale, faute de temps peut-être. Et pourtant toutes les églises des environs avaient été incendiées. Mais ce que les bleus n'avaient pas fait un habitant de St-Etienne même s'en chargea. Un jour, on n'a pas conservé la date, on vit le nommé D...., avec plusieurs soldats révolutionnaires, transporter tout un tas de fagots de fourmille vers l'église et l'introduire dans le clocher. Peu après on vit la fumée, puis les flammes sortir par les ouvertures du clocher. On entendit la charpente s'écrouler, puis du beffroi brûlé les cloches tomber et se briser avec fracas. La flèche en feu en s'affaissant sur la toiture de l'église communiqua l'incendie à tout l'édifice. Si bien qu'il ne resta de l'église que les murs. Et cet état de choses dura une dizaine d'années. Quand la paix fut revenue on recouvrit le choeur pour pouvoir y dire la messe, mais les fidèles y assistaient dans la nef à ciel ouvert. On n'avait pas le moyen d'en faire davantage.
L'incendiaire était évidemment satisfait du résultat obtenu. Il voulut pourtant faire encore plus. Il y avait en-dessus la Violière, en la place où s'élève maintenant le calvaire de granit, une chapelle très ancienne dédiée à Notre-Dame de Belle-Croix, et qui, le 8 septembre de chaque année, était le but d'un pèlerinage très fréquenté. La chapelle de la Ste Vierge ne trouva pas plus que l'église grâce devant l'impie D.... Par le même moyen qu'à l'église, il y mit le feu. De la chapelle il ne resta que quatre murs qui, non restaurés pendant de longues années, s'écroulèrent peu à peu. Les derniers pans de murs qui restaient encore en 1841 furent démolis pour servir à construire les murs du nouveau cimetière.
La chapelle de la Violière sur le cadastre de 1833
AD85, Bulletins paroissiaux
Saint-Etienne-du-Bois
1955-1956-1957-1958
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Commentaires
4franckSamedi 9 Janvier 2016 à 18:11bravo pour ces recherches très pertinentes sur cette commune
c est très enrichissant et je prends plaisir à vous lire
bonne continuation
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Samedi 9 Janvier 2016 à 23:56
Merci Franck. Je vous avais vu pendant un temps dans la liste des abonnés en attente et à l'époque, un bug de la plateforme "Eklablog" bloquait certaines adresse mail. Le souci est résolu et vous pouvez dès à présent vous abonner.
Cordialement,
Le Loup
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3The dudeLundi 14 Septembre 2015 à 13:23Tu n'as pas d'équivalent en terme d'érudition et de passion, tout cela avec une humilité non feinte: la marque des grands. Tu es vrai, et les Vendéens sont fiers de ton travail dans l'au-delà, j'en suis certain.
2annie33Lundi 31 Août 2015 à 17:31A la Révolution, les Vendéens ont payé la très lourde barbarie des sanguinaires dont les héritiers dirigent le pays aujourd'hui Je trouve qu'actuellement, les vendéens et les bretons sont particulièrement ciblés et injustement humiliés. Il semble que la terreur n'a pas fini son travail et veut tuer l'image de la résistance, pour l'exemple, par la destruction du patrimoine religieux et l'économie qui affame.
Ces criminels d'appareil politique sournois et au pouvoir, ont la rancune et la concupiscence particulièrement tenaces, même si l'ensemble des français subit également les affres et les humiliations quotidiennes de cette horde de bandits qui s'écoute parler et ne supporte pas la contradiction. Courage et honneur aux résistants vendéen qui les affrontent ouvertement !
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Voilà des "chemins" et des lieux qui méritent d'être reconnus et respectés , que de vibrations dans l'air : il faut se recueillir , prier pour ces âmes et ces corps qui n'ont pas eu de sépulture !
Oui , je vous envie de pouvoir fouler ces endroits qui sont tombés dans l'oubli et de pouvoir ressentir cette atmosphère pesante qui continue à y rester !......en union de prière !