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Légendes et réalités sur Westermann...
Légendes et réalités sur le général Westermann…
Vous connaissez tous la trop fameuse lettre de Westermann concernant la bataille de Savenay :
"Il n'y a plus de Vendée, citoyens républicains, écrit-il. Elle est morte sous notre sabre libre, avec ses femmes et ses enfants. Je viens de l'enterrer dans les marais et dans les bois de Savenay. Suivant les ordres que vous m'aviez donnés, j'ai écrasé les enfants sous les pieds des chevaux, massacré des femmes, qui, au moins pour celles-là, n'enfanteront plus de Brigands. Je n'ai pas de prisonnier à me reprocher. J'ai tout exterminé. Un chef de Brigands, nommé Designy, a été tué par un maréchal-des-logis. Mes hussards ont tous à la queue de leurs chevaux des lambeaux d'étendards brigands. Les routes sont semées de cadavres. Il y en a tant que, sur plusieurs endroits, ils font pyramide. On fusille sans cesse à Savenay ; car, à chaque instant, il arrive des Brigands qui prétendent se rendre prisonniers. Kléber et Marceau ne sont pas là. Nous ne faisons pas de prisonniers ; il faudrait leur donner le pain de la liberté, et la pitié n'est pas révolutionnaire." (1)
Illustration des AD85 (6 Fi 1305)
En 2013, un historien rappelait, à ceux qui ne le savent pas :
« Un texte parfait. Trop parfait… » Et de citer un autre historien, sans le nommer mais qui est facilement identifiable, célèbre par les volumes de ventes de ses bouquins mais hélas peu scrupuleux sur la rigueur de ses travaux. Dans un ouvrage publié en 2012, ce dernier accumulait les erreurs, allant jusqu’à faire passer pour authentique, un pastiche politique d’ Edouard Drumont du discours de Clémenceau devant l’Assemblée Nationale, glorifiant les colonnes infernales. Le pamphlet d’où est tiré ce faux discours a été édité en 1899 sous le nom : « Les Juifs contre la France, une nouvelle Pologne ». Quant au vrai discours de Clémenceau, daté du 28 janvier 1891, il est consultable aux archives de ladite assemblée, ici, et n’a rien à voir avec la prose de Drumont, mais il fut pris pour argent comptant par l’historien en question. L’auteur dont on parle n’hésitait pas à avancer de la même manière une cote d’archives pour la lettre prétendument écrite par Westermann au Comité de Salut Public. Cette cote selon lui, est la B 5/16 des Archives Militaires de Vincennes. Là, gros problème et de taille ! Lorsque l’on consulte ce classement, il est bien question de la période concernée (novembre – décembre 1793) mais nous n’avons aucune autre référence de dossier de type B 5/16-55 qui aurait pu correspondre à merveille avec la période dont il est question. Il n’y a donc rien en B 5/16 et dans tout le reste du fond de Vincennes. Rien non plus aux Archives Nationales, et pour cause : tous les amateurs d’histoire un peu exercés savent que cette lettre de Westermann est un faux, inventé de toutes pièces par Jacques Crétineau-Joly, qui lui non plus ne s’est pas trop embarrassé avec les sources. Cette lettre, tout le monde la cherche en vain depuis des décennies et malgré tout elle est partagée régulièrement un peu partout sur le Net, les blogs et réseaux sociaux à chaque date anniversaire de la funeste bataille de Savenay.
Crétineau-Joly qui à n’en pas douter à lu les correspondances de Westermann et a tenté d’imiter son style qui se doit d’être toujours héroïque et inattaquable, mettant en valeur ses compétences, sans doute aspirant à un autre généralat que celui de division, sinon à sauver sa tête ; Crétineau-Joly, disais-je, y va un peu fort il me semble pour être crédible. Westermann a été exécuté pour de soi-disant sympathies dantonistes, ce qui signifie accusé de « modérantisme » !
Ne vous méprenez pas, je ne me fais pas l’avocat du Diable mais à une heure où enfin on commence à pouvoir parler de la Vendée, à une heure disais-je encore, où une possible reconnaissance (vite faite, comme ça, par-dessous le manteau, car il ne faut pas froisser les « valeurs de la république ») serait peut-être envisageable du bout des lèvres, il faut être inattaquable. Et pour cela, il faut présenter des documents sérieux. Westermann était un véritable « boucher », le témoignage de Danton suffirait lui-même à s’en convaincre. Ce dernier n’avait-il pas écrit :
« On me parle aussi de Westermann, mais je n’ai rien eu de commun avec lui ; je sais qu’à la journée du 10 août, Westermann sortit des Tuileries, tout couvert du sang des royalistes, et moi je disais qu’avec 17 000 hommes, disposés comme j’en aurais donné le plan, on aurait pu sauver la patrie ». (2)
Bien d’autres témoignages suffiraient, même si au final, il fut guillotiné pour cause de « dantonisme » et accusé de complicité avec Dumouriez. Nous verrons d’ailleurs dans ce qui suit qu’il a un goût du sang particulièrement prononcé. Pour autant, nous ne pouvons raisonnablement lui attribuer les propos de Crétineau-Joly, avalisés par des historiens sûrement sincères au départ mais devenus « marchands de bouquins » par la suite.
Par contre, une chose m’étonne beaucoup. On trouve, au sein de ces mêmes Archives Militaires de Vincennes qui paraissent si mystérieuses pour le débutant, un bulletin analytique que j’avais déjà publié ici.
Ce document fait partie de ces petites choses qui n’ont jamais été exploitées par aucun historien à ce jour. Les Archives Militaires auraient produit des faux en faveur de la Vendée, à l’instar de Crétineau-Joly ? J’en doute… et je m’étonne que les spécialistes du Génocide ne soient jamais tombés sur cette pièce. Comme par hasard le registre de correspondance auquel il fait référence n’existe pas, ou plus, ou du moins n’est pas en ligne. Je pense que si on avait voulu accuser Westermann de quelque chose, il aurait fallu commencer par là au lieu de rapporter les bobards de Crétineau-Joly.
Voici le document (3) :
« 17 novembre 1793
Le général Vestermann,
Il demande pour en finir avec les rebelles, qu’on leur envoie 6 livres d’arsenic dans une voiture d’eau de vie.
Voir au 7 décembre 1793. »
J’avais déjà publié ici un rapport de Westermann qui en disait long sur sa mentalité, sur son envie de grimper les échelons de l’armée et de se faire bien voir par la Convention. Son impétuosité et son imprudence ne l’auront destiné qu’à ne rester que général de brigade en attendant de le voir guillotiné dans un procès injuste, même si l’homme méritait amplement son sort vis-à-vis de l’humanité.
On trouve néanmoins de bien curieux documents en fouillant les fonds d’archives comme cette pièce isolée des Archives départementales de Vendée où il prend des otages en échange de pain (4) :
« St Maixent le 30 juin 1793
Je pars général à l’instant avec ma troupe, je laisse ici le 6e bataillon de Paris composé de 160 hommes ; j’exécuterai le projet dont nous sommes convenus ; vous aurez souvent de mes nouvelles ; mais ne me laisser (sic) pas manquer de pain et de picques : j’emmène avec moi de St Maixent trois officiers municipaux, en écharpe, j’en ferai autant dans les différents endroits où je passerai.
Je vous embrasse
Westermann »
D’autres pièces peuvent encore prêter à sourire, lorsqu’il écrit depuis Fontenay le 20 septembre 1793 à Robespierre en personne sur sa satisfaction d’être revenu à l’armée. Pensez-donc, les habitants et les soldats ont fêté son retour en faisant une chanson ! le tout en demandant à Robespierre « l’absolution » ( je cite ) (5). A sourire... ou à frémir lorsque Carrier écrit de Nantes, le 22 décembre 1793, en parlant de lui que Vestermann (sic) et Hector ont couvert les rues d’Ancenis de cadavres (6).
Le rapport qu’il envoie au Comité de Salut public et que je vous présente ici a été l’objet d’un mémoire de la part du général Chalbos adressé au ministre de la guerre et qui rectifie plusieurs points (7). Ce long document n’est pas daté et ne comporte pas la mention du lieu de rédaction.
Je vous laisse découvrir à présent ce document dont j’ai conservé au maximum l’orthographe et la ponctuation dans la limite du compréhensible (8).
RL
Janvier 2018
Chaque feuillet est signé.
Campagne de la Guerre de la Vendée du général de brigade Westermann commandant en chef la légion du Nord, contenant tous les faits à sa connaissance, sur lesquels La Convention et son Comité de Salut public demandent des détails.
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Vers le milieu de juin l’an 1er de la République, je suis arrivé avec ma légion, à St Maixent. Le général Biron avait alors le commendement en chef de l’armée.
Le 20 du même mois, je fus prévenu que les Brigands avaient résolu l’attaque de Niort ; qu’un grand rassemblement se formait pour cet effet à Parthenay. En vertu de l’ordre de Biron, je pars la même nuit avec 1200 hommes de ma légion ; je me trouve aux postes ennemis de cette ville à deux heures du matin. Les avant-postes ennemis furent surpris et égorgés, les portes de la ville enfoncées à coups de canon ; et au milieu d’un feu bien soutenu j’entre avec ma petite infanterie à pas de charge. Tandis que la cavallerie coupait la route de l’autre extrémité de la ville, 10 à 12 mille Brigands, prirent la fuitte abandonnant leur artillerie ; beaucoup furent taillés en pièces et fait prisonniers ; quantité de pain, de bœufs et de chevaux fut la prise de cette journée ; et Niort qui alors n’était pas encore fortiffié ne fut pas attaqué (9).
Le lendemain, retourné à St Maixent, les Brigands marchèrent aussitôt sur Nantes, et une armée de 40 mille hommes assiégea cette place. Biron m’envoya l’ordre de marcher à sa deffense et me renvoya un renfort de deux foibles bataillons. En marchant par Tours, il était impossible d’arriver à temps, je pris donc le parti de marcher droit sur Nantes en traversant le païs ennemi. Je pars, le 30 juin, avec 2500 hommes. Parthenay était encore tombé au pouvoir de l’ennemi qui, à mon approche, évacuèrent cette ville en la livrant au pillage.
Le 1er juillet, après une foible résistance, je pris Amaillou, un des repaires des Brigands d’où plusieurs ont été tués et 4 membres du comité royaliste fait prisonniers, beaucoup de chevaux et de bœufs furent pris et tout fut renvoyé à Niort ; en voulant donner l’exemple de la vengeance sur le village de Parthenay je livrai au pillage Amaillou en renvoyant tous les meubles et effets pour être distribués aux patriotes de cette ville. Avant de quitter Amaillou, j’y fait mettre le feu ; et le même jour je me suis porté à Clisson pour investir le château de Lescure, repaire des généraux de l’armée Catholique et Royale ; ce brigand s’occupait de l’évacuation de ce château ; mais prévenu de mon arrivée, il prit la fuite avec tout son monde et le château fut livré au pillage et réduit en cendre.
Dans le pays insurgé, le tocsin sonnait de toutes parts et le rassemblement se formait à Bersuire (sic). Du haut du clocher Lescure voyait en pleurant les flammes de l’incendie de son château en criant à la vengeance. J’aprend que le rassemblement était environ de 20 mille hommes avec 4 pièces de canon. Le 2 juillet je marche avec fermeté sur cette place. Les Brigands étaient tellement intimidés par ces incendies qu’ils prirent la fuite sans tirer un seul coup de fusil.
Le 3 juillet je dirige ma marche sur Chatillon, je retrouve la même armée, qui avait si lachement fui la veille, en position le canon braquée, sur la hauteur des moulins du Bois aux Chèvres à deux lieues de cette ville. A l’instant je fais mes dispositions ; et sans consulter le nombre, je forme l’attaque : après deux heures de combat, où l’ennemi a perdu plus de monde que moi. Je parvins à m’emparer de ces hauteurs et de ces canons et munitions, et à les mettres en fuite sur la route de Chatillon : dix fois l’armée ennemie s’est rangée en bataille devant moi, dis fois ma petite armée toujours victorieuse court dessus et la battit. Enfin le même jour 3 juillet à cinq heures du soir j’entre à pas de charge et en triomphe dans la fameuse résidence du cousin supérieur de Louis XVII où j’eu le bonheur de délivrer près de 2000 républicains prisonniers, de me rendre maître de l’imprimerie, de magazins immenses et des archives du Conseil Supérieur.
Le même soir je reçu une lettre du général Biron qui m’annonce qu’il fait marcher des forces à Niort et à Saumur pour faire sa jonction avec moi ; encore le même soir j’apprend que Lescure avait envoyé courier sur courier à Nantes l’armée devant Nantes pour la faire lever le siège et se porter sur moi. Je pris aussitôt la position des hauteurs des moulins devant Chatillon, pour donner aux forces de Niort et Saumur le temps d’arriver. Le 4 je fis bruler le château de la Rochejaquelin autre général de brigand.
Le 5 vers dix heures du matin, de bons citoyens de St Maixent et Parthenay au nombre de 2000 arrivèrent armés à Chatillon, ayant à leur tête l’évêque et plusieurs administrateurs du district et officiers municipaux. Au moment où je m’occupais de l’organisation de cette nouvelle force, l’armée de Nantes qui avait levé le siège m’attaque ; un bataillon de l’avant poste prend la fuitte et abandonne ses fusils en faisceaux. Cette lacheté favorisa l’approche de l’ennemy et occasionna le désordre dans ma petite armée. Mon artillerie fit un feu épouvantable ; deux fois elle fit reculer l’ennemi qui approchait de la hauteur en perdant beaucoup de monde ; mais enfin abbandonné par l’infanterie, les Birgands vinrent à portée de fusil le ventre à terre, tue les cannonniers à leurs pièces. Ces derniers furent forcés de se retirer et d’abandonner leurs canons. La déroute fut complette, tout de suite la proye de l’ennemy qui me tua au moins deux cents hommes et fit près de mille prisonniers. Je fis ma retraite sur Parthenay, où je ramassais les débris de ma petite armée et où je rencontrai 1500 hommes venant de Niort. C’est ainsi que le fruit de tant de victoires fut perdu dans un seul jour par le retard que les forces de Saumur et de Niort ont apporté à me joindre ; mais du moins ma défaite a été avantageuse à la ville de Nantes.
Assurément je n’avais rien à me reprocher dans cette affaire, néanmoins des commissaires du pouvoir exécutif éloignés de 20 lieues de moi me dénoncèrent aussitôt comme traitre ; je fus traduit à la barre de la Convention ; de la au tribunal militaire à Niort. Voici le dispositif du jugement qui en est résulté.
« Il a été dis à l’unanimité qu’il n’y à lieu à accusation contre le général Westermann dans l’accusation contre lui formée attendu que la conduite de ce général à Chatillon dans la journée du 5 juillet est digne des plus grands éloges ; que les dispositions par lui prises pour s’assurer la victoire, annoncent un général conformé dans l’art de la guerre, tant à cause de sa fermeté que par les principes d’humanité qu’il a manifestés. En conséquence renvoyé à ses fonctions. »
Le 4 septembre ce jugement fut approuvé et enregistré au procès verbal de la Convention. Aussitôt je retournay à l’armée que je rejoignis à Fontenay le peuple sous le commandement en chef de Rossignol.
Le Comité de Salut public s’étant apperçu que les généraux traitres, pour faire détruire nos armées et alimenter les Brigands avaient disséminés nos forces de manière à nous faire battre chaque jour individuellement à arrêté un plan d’attaque général avec la levée de la masse du peuple ; ce plan indiquait l’heure, le jour, le lieu à chaque armée ; où et quand elle devait marcher et agir. L’ennemi dans moins de six jours se trouvant cerné dans un très petit espâce de terrein par 200 mille hommes, était réduit à l’impuissance de résister à une force aussi importante et si bien distribué pour une attaque générale. La guerre pouvait finir dans un jour.
L’armée de Mayence avait aussi sa destination et la force du peuple en masse fut ditribué à chaque armée. A Fontenay le peuple j’ai vu laisser cette masse six jours dans l’inaction, ensuite s’avancer à la Chataigneraye, où cette masse resta encore dans la même inaction pendant 8 à 10 jours. L’armée de Mayence seule, s’est avancée à l’heure au jour et au lieu indiqué par le conseil de guerre à Saumur, rédigé sur le plan du Comité de Salut public, lorsque le 20 octobre (date non logique) l’ordre de Rossignol parvint au général Chalbos pour faire rétrograder sur Fontenay le peuple l’armée de la Chataigneraye et celle de Mouilleron et Chantonay sous le commandement du général Befroy à Luçon. Cette rétrogadation jetta le peuple et l’armée dans la consternation. L’on cria hautement à la trahison ; les armées se replièrent aux postes indiqués et la masse du peuple déserta. C’est de cette manière que le déplacement ruineux de 150 mille citoyens qui avaient abbandonné leurs travaux pour voller à la déffense de la République, a été rendu infructueux. Le général Nouvion qui a témoigné du mécontentement sur cet ordre rétrograde ; le général Ray qui avait un peu avancé et battu les Brigands, moi qui chaque jour faisais des petites expéditions heureuses, nous fumes tous trois destitués par le ministre de la guerre, et ce n’a été que par un arrêté des représentants du peuple que je suis resté à l’armée.
Le 17 octobre, six jours après Rossignol écrivit au général Chalbos à Fontenay le peuple de reprendre la position de la Chataigneraye et de faire reprendre à Befroy sa même position, ajoutant qu’il n’à jamais eu l’intention de faire rétrograder les armées ; que si sa lettre contenant cet ordre ce n’à été qu’une faute de copiste et de son secrétaire. Ces deux lettres sont entre les mains du général Chalbos.
Dans cette intervalle l’armée de Saumur fut battû et mise en déroutte ; sur de 20 pièces de canon et des caissons furent pris par l’ennemi ; l’amrée des Sables eut le même sort. Ausitôt ces affaires, Rossignol fut renvoyé à l’armée des Côtes de Brest et remplacé par le général Léchelle ; enfin après huit jours de station à la Chataigneraye nous arrivons à Bressuire le 9 octobre sans obstacle ; l’armée de Saumur fit sa jonction avec nous, ce qui nous rendit forts de 20 mille hommes. Le 11 nous marchons sur trois colonnes sur Chatillon, l’armée catholique et royale nous attendait sur la hauteur des moulins du bois des chèvres ; j’étais à la queüe de la colonne du centre ; l’armée s’arrête et je reçois l’ordre d’avancer avec ma légion, ma brigade me suit. Notre artillerie se place sur la hauteur, je forme l’attaque et le feu devient sérieux de part et d’autre. Déjà j’avais replié quelque peu, lorsque les braves grenadiers de la convention vinrent à mon secours ; nous fonçons avec tant d’intrépidité sur l’aile gauche de l’ennemi que bientôt il fut mis en déroute. Je poursuis les Brigands avec environ 2000 hommes et le même jour à cinq heures du soir j’entre pour la seconde fois triomphant dans Chatillon. Pour la seconde fois j’eu le bonheur de délivrer quantité de prisonniers ; je pris l’imprimerie, quelques bouches à feur et les 2 magazins. Chalbos quoi qu’instruit par mon ordonnance, ne vint que le lendemain 1 heure après midi avec l’armée à Chatillon.
Je dois rendre compte ici d’un fait bien intéressant : j’ai pris à Chatillon, les papiers du comité de l’armée catholique. Les représentants du peuple Bellegarde, Choudieu et Fayaux se logèrent dans la maison de ce comité, où ils trouvèrent copie de l’arrêté et du plan de campagne du Comité de Salut public de la Convention et du conseil de guerre tenu à Saumur pour l’exécution de ce plan avec des lettres intéressantes ; mais le portefeuille de Bellegarde qui renfermait ces mêmes pièces s’est trouvé perdu dans l’affaire qui eut lieu le lendemain.
Le jour suivant 13, l’ennemi nous attaque et toute notre armée est mise en déroute ; nos canons, caissons, vivres, trésor, enfin tout fut abandonné à l’ennemi ; la division du général Muler fit sa retraite sur Thouars, tandis que ce général s’était sauvé et cherchait sa division à Bressuire où il arriva le premier. Pendant que tout fuyait, les braves grenadiers de la Convention s’étaient seuls rangés en bataille derrière Chatillon, de tous les soldats je sortis le dernier de cette ville ; un Brigand s’attache à la queue de mon cheval, un coup de revers me débarassa de lui. J’ordonnai à ces grenadiers en trop petit nombre de partir, ils s’y refusèrent et crièrent tous qu’ils vouloient mourir à leur poste plutôt que de fuir. Enfin je fus obligé d’employer la menace, je fus obéï. Je favorise leur retraite et celle de l’armée avec 100 hommes de cavalerie, et je fis mettre beaucoup de ces vieux militaires en croupe derrière les cavaliers.
Plus de cinq heures nous fumes toujours aux prises avec l’ennemy, j’eus beaucoup de cavaliers tués et blessés ; n’ayant plus cartouches, le reste faisait mine de ne plus vouloir tenir. Notre infanterie fuyante aurait été hachée par la cavalerie ennemie ; réduit au désespoir et n’en pouvant plus de sueur et de fatigues, je jette mon habillement, je ralie ma cavalerie et nous chargeons l’ennemi avec tant de précipitation que nous parvinmes à le faire reculer un moment ; cela donna le temps à notre infanterie de se reconnaitre ; enfin à la nuit tombante je trouve, par Louis de Barsaire, le général Chalbos avec environ 6 à 7 cent hommes d’infanterie et 100 hommes d’infanterie et 100 hommes de cavalerie ralliés dans une pleine : dans la fureur je courre à lui et je lui présente mon sabre et lui dit : tous le monde m’a abbandonné, je ne sers plus avec des lâches. Toute la petite armée m’entoure à l’instant, et jure quelle en m’abandonnerait point, eh bien, dis-je, si vous êtes vrais, si vous êtes encore les déffenseurs de la République, retournez avec moi à Chatillon u chercher tout ce que nous y avons si lachement abandonnés ou y mourir avec moi. Profitant de la nuit, et suivi d’environ trois ou quatre cent hommes d’infanterie et d’une centaine de cavalerie, je charge l’ennemi avec tant d’impétuosité que nous renversons tout ce qui se présente devant nous. Les Brigands en fuite j’en profite et pousse droit sur Chatillon, en criant : Vive le Roi ! Je surprends et fais tailler en pièces tous les avant postes ennemis ; j’entre de la même manière dans la ville où je fis un carnage épouventable ; 25 mille Brigands prennent la fuite abandonnant trésor et tout ce qu’ils nous avaient pris, leurs drapaux et environ 1000 à 1200 prisonniers du même jour. Je les poursuis avec ma cavalerie jusqu’à une lieue de Mortagne et je brule en leur présence le village du Temple. J’avais laissé mon infanterie à Chatillon faire des visites domiciliaires ; j’envoyai prévenir Chalbos pour le prix de venir à mon secours avec la force qu’il aurait pu ramasser ; il vint effectivement avec quelques cent hommes vers minuit, pris le trésor et quitta Chatillon aussitôt emmenant même avec lui l’infanterie que j’y avais laissé. Je frémissais lorsqu’à mon retour à 4 heures du matin le 14 je trouvai Chatillon abandonné. Je voulois finir une bonne fois de repaire devenu si souvent funeste à nos armées ; je fis mettre pied à terre à ma cavalerie et fis mettre le feu. Vers onze heures du matin toute la ville était incendiée ; plus de 2000 Brigands cachés dans les greniers sautèrent par les fenêtres et périrent encore. Je favorise l’évacuation et je rejoins vers une heure l’armée près de Bressuire, les drapeaux ennemis flottant par-dessus ma tête. La joye que l’armée témoignait est inexprimable et chacun regrtait de n’avoir pas retourné avec moi à Chatillon. Je ne puiserai pas dans la politique qui avait soustrait un pareil fait à la connaissance nationale.
Arrivant à Bressuire l’on a mis tout le soin à réorganiser l’armée le lendemain 15. L’armée de Mayence prit Mortagne le 16 octobre ; et le 17 Chollet. Le même jour nos armées firent la jonction dans cette dernière ville.
Le 18 l’ennemi attaque Chollet ; l’armée de Mayence le repoussa et lui prit dix pièces de canon. Je me mets à poursuivre les Brigands avec la cavalerie et environ 4 000 hommes d’infanterie conduits par les généraux Axo, Beaupuis et Chabo ; il faisait nuit lorsque nous nous trouvâmes sur une hauteur à trois lieues de Beaupreaux. Je connaissais le poste redoutable de cette place ; il fallait le prendre de surprise, ou risquer une bataille meurtrière ; comme le plus ancien officier général, je prend le commandement de la troupe qui toute la journée, sans vivre s’était battue, et n’a pas hésité un instant de marcher et de combattre encore la nuit.
Le 19 vers une heure du matin, je me trouve devant Beaupreau, trois avant postes ennemis furent égorgés à l’arme blanche. Au premier coup de canon ennemi, nous sommes sur son canon, et nous entrons à pas de charge dans la ville, tout ce qui se présente devant nous est renversé et taillé en pièces ; 20 000 Brigands prirent la fuite, abandonnèrent 10 pièces de canons et caissons ; un moulin à poudre ; 30 à 40 mille rations de pain, beaucoup de vin et autres denrées et des prisonniers en grand nombre. Je dépêche aussitôt une ordonnance au général Léchelle à Chollet, je lui demande du secours pour pouvoir me porter à St Florent pousser l’ennemi dans la Loire. Léchelle n’arrive avec l’armée qu’à six à sept heures du soir et L’ennemie toute la journée passe tranquillement la rivière.
Le 20 l’armée dirige sa marche par Nantes, elle y arrive le 21. Le commandant de la force armée à Montaigu reçoit ordre de rentrer dans cette ville avec sa troupe. Il fait bruler beaucoup de munitions, du riz et effets de campement ; quitte Montaigu et reçoit le lendemain, l’ordre de retourner aux mêmes postes. Le 22 l’on me fit partir avec 1 500 hommes pour suivre et harceler l’ennemi qui s’était porté sur Château Gontier ; mais l’on me fit passer par le Nord, un détour de 6 à 7 lieues ; et pendant ce temps l’armée catholique s’éloigne sans inquiétude. Le 26 j’arrive à Château Gontier, le général Beaupuis y arrive aussi avec deux mil hommes, l’ennemi était à Laval ; nous marchâmes sur lui le même soir. Je forme l’attaque vers onze heures de la nuit ; le combat dure plus de deux heures ; et n’ayant plus de cartouches je fus obligé de faire ma retraite sur Château Gontier, qui se fit en très bon ordre et sans perte.
Le 27 Léchelle arrive avec l’armée et l’attaque de Laval fut résolüe pour le lendemain ; je reçois l’ordre d’aller à l’avant-garde lui indiquer sa position ; il fallait pour arriver à Laval, passer sur un pont placé dans un fond au-delà du village d’Antrame dominé par deux hauteurs immenses. Le général Danican et moi nous primes la position de ces hauteurs avec trois cents hommes. Je fus avertir Léchelle d’arriver ou d’envoyer des forces pour fortiffier ce poste important ; il avait placé l’armée à deux lieues de là et ordonna froidement de quitter ces hauteurs. Je lui fis sentir, mais inutilement, cette faute et lui prédi que l’armée serait battue à ce passage.
Le 28 l’armée de 20 mille hommes se mit en marche en procession sur une seule colonne, l’ennemi s’était emparé des hauteurs du pont ; et à notre approche nous cribla de mitraille, bientôt l’armée est mise en déroute, l’ennemi nous poursuit deux lieües au de là de Château Gontier et nous prit beaucoup de mines canons et munitions. A cette occasion le général divisionnaire Muler à fui jusqu’â Angers d’où il fut chassé par le comité révolutionnaire la même nuit. Le lendemain l’armée se replia à une lieue d’Angers et ensuite à Angers où elle resta douze jours pour se réorganiser. Dans cette intervalle je fus envoyé à Niort pour faire joindre tous le fuyards et forces disponibles à l’armée.
L’ennemi avait quitté Laval et attaqué Granville où il fut repoussé avec perte. Il s’était retiré à Avranches. Je rejoins l’ armée à Angers qui le lendemain se mit en marche pour se rendre à Laval où elle séjourna un jour. De là nous partimes pour Vitré ; Rossignol vint nous rejoindre dans cette ville où nous restâmes encore un jour. Rossignole prend le commendement de l’armée, nous fit aller à Rennes où nous fîmes la jonction avec l’armée des Cotes de Brest aussi sous son commendement. Après un autre séjour nous marchâmes sur deux colonnes sur Antrun et une autre colonne sur Fougères. Le même jour de notre arrivée, l’ennemie a battu une colonne de nos troupes qui s’était portée sur Pontorson et lui prit tout ses canons et munitions. La même nuit j’avance vers Pontorson, avec environ 2 000 hommes, les Brigands à mon approche évacuèrent cette ville abondonnèrent huit pièces de canons et plusieurs caissons. Je les poursuis jusqu’au ports de Dole, leur prend neuf voitures d’équipage et fait tailler en pièces tous ce qui était resté en arrière. J’envoye par une ordonnance prévenir Rossignol à Antrun ; je lui propose de surprende l’ennemi dans Dole ; d’attaquer de son côté cette ville sur le route d’Antrun ; pendant qu’à minuit j’attacquerai sur la route de Pontorson ; un coup de canon devait être le signal de l’attaque.
Rossignol accepte la proposition et envoye la division de Muler pour cette attaque : comme je connaissais la lenteur que souvent on mettait dans les opérations je ne commence l’attaque que vers trois heures du matin, Muler n’était pas encore arrivé, le combat dura pendant plus de deux heures ; l’aile droite de l’ennemi est battüe et mise en déroute, principalement par une division de gendarmerie de Paris. J’avais brulé jusqu’à la dernière cartouche, par conséquent je ne pouvais hazarder l’entrée de la ville ; Muler arrive de son côté vers cinq heures du matin bien saoul, il voit les brigands fuir il arrête et dit : l’ennemi est en déroute il faut attendre le jour et nous le poursuivrons. Cette inaction leur donna le temps de se rallier et de connaître notre foiblesse ; il marche sur Muler et sur moi ; et tous deux nous fumes forcés à la retraite, lui sur Antrun et moi sur Pontorson. Je propose à Rossignol une même attaque pour la même nuit, il accepte encore ma proposition et me renvoye 1 500 hommes de renfort et ses munitions. Je marche sur Dole lorsque vers les 10 heures du soir je reçois trois ordonnances de suite me portant à la déffense d’attaquer et l’ordre de prendre position sur la route de Dole ; j’obéis et Rossignol prit position entre cette ville et Antrun. Le lendemain matin l’ennemi marcha sur Antrun et Rossignol est mis en déroute. Le même jour je subis le même sort ; mais je soutins la retraite de l’infanterie par la cavalerie que je fis mettre à pied à plusieurs reprises en ambuscade. Je fis ma retraite sur Antrun et j’entre dans cette ville pour ainsi dire au même moment que l’ennemi.Notre armée se retire sur Rennes où elle séjourne environ dix jours. L’armée des Cotes de Cherbourg commandée en chef par le général Sepher se trouvait à Avranches, ce dernier refusa longtemps d’avancer ; enfin il fait sa jonction avec nous, il fut suspendu à Rennes par les représentants du peuple. c’est dans cette ville que le commendement général de la cavalerie de l’armée me fut donné.
Les divisions des généraux Klebert et Marçaux reçurent ordre de se rendre à Chateaubriant ; le lendemain de leur arrivée, Marçaux prévint par une ordonnance Rossignol à Rennes que l’ennemie marchait sur Angers et demande des ordres ; point de réponse. Le lendemain, une seconde ordonnance pour le même objet ; Rossignol répond qu’il donnerait le lendemain des ordres verballes à Château-Briant. Dans cette intervalle Angers est assiégé, et Rossignol n’arrive à Château Briant que deux jours après la lettre. La ville d’Angers fait résistance pendant deux jours. Rossignol arrivant à Chateau Briant fait partir à minuit la troupe qui avait si mal à propos séjourné quatre jours dans cette ville. J’arrive le 14 frimaire à onze (heures) du soir avec la cavalerie à Angers. L’ennemi découragé par la bravoure de la garnison et des habitants lève le siège le 15 au matin avec beaucoup de perte. Les généraux Klebert et Dalicant ; ce dernier commandant Angers et qui avait infructueusement envoyé six courriers de suite à Rossignol avant et pendant le siège s’étaient plaints du retard des ordres de ce général, tous deux ont été suspendus (le premier a été conservé par un arrêté des représentants du peuple). Je reçois l’ordre de partir le même matin avec ma cavalerie et deux pièces d’artillerie volante pour suivre et harceler l’ennemi partout : d’ici Rossignol quitte encore notre armée, retourne à Rennes et Marceaux prend le commandant (commandement) en chef par interim à la satisfaction de l’armée.
L’ennemi s’était retiré sur Beaugé ; tout ce qui était resté en arrière ; tous ceux qui avaient couché et rodé dans les fermes et villages dispersés ont trouvé la mort dans la nuit. Le lendemain 16 je m’approche de Beaugé ; j’y envoye quelques obus pour inquiéter l’ennemi qui s’occupait d’une nouvelle réorganisation ; il se porte sur moi en force, je me replie jusqu’à Suède (sic) sans perte, en faisant front à chaque instant. A plusieurs reprises ma cavalerie mis pied à terre et s’embusca. Cette manœuvre soutenüe par l’artillerie couta la vie à beaucoup de brigands.
La même nuit le général Muler arrive à Suede avec sa division et le 17 au matin il me suit sur Beaugé. L’armée catholique et royale avait évacué cette ville dès la pointe du jour et dirigé sa marche sur la Flèche. Elle avait laisse une arrière garde de cavalerie avec une pièce de canon : arrivé devant Beaugé avant Muler je l’attends pour être soutenu de son infanterie ; aussitôt arrivé je charge avec ma cavalerie celle de l’ennemi, 40 cavaliers tombent sous nos coups, le reste se sauve et renverse jusqu’aux rangs de leur propre infanterie ; je dépêche deux ou trois ordonnances à Muler pour l’engager à me suivre, il me fit froidement répondre qu’il scavait ce qu’il avait à faire : environ 150 hommes de son infanterie viennent à mon secours sans ordre accompagnant mon artillerie, l’ennemi s’était ralié sur une hauteur et braqué son canon. Le combat s’engage et le canon ronfle plus d’une demi heure ; je dépêche une autre ordonnance à Muler qui s’obstine à ne pas s’avancer, déjà ma petite infanterie et une partie des trois cents hommes de cavalerie se replient, lorsqu’avec la cavalerie je coupe l’ennemi par la droite et le charge sur son derrière. Il se sauve de toutes parts abandonnant son canon, fusils, sac et sabots ; je le poursuis avec vigueur et en fait un carnage effroyable jusqu’au pont de la Flèche qui s’est trouvé coupé ; ce qui arrête l’ennemi devant cette ville.
La nuit était survenüe et toute la force de l’armée catholique et royale étant réunie, je n’ai pu pousser ma victoire plus loin : j’établis mon bivouac en face des brigands. J’avertis encore Muler ; mais inutillement, il s’était établi à Beaugé et refusa d’avancer, il m’envoya cependant 5 à 6 cents hommes dans la nuit. Le 18 à la pointe du jour j’attaque l’armée catholique qui comme l’on doit bien croire me repousse ; je fis ma retraite sans perte sur Beaugé ; le général Legros marche avec sa brigade sur l’ennemi, le met en fuite ; Nous le repoussâmes jusqu’au pont de la Flèche. Le gros de l’armée catholique s’avance encore sur nous et nous nous replions sans perte à Beaugé.
Le 20 nous avançons encore et nous établissons notre bivouac à une Lieüe de la Flèche, l’ennemi avait réparé le pont et était dans cette ville. La même nuit je fis égorger les avant postes ennemis, l’armée devait arriver aussi sur lui par Turtalle (Durtal), il évacua la ville le 20 à la pointe du jour, je me trouve avec ma cavalerie et 300 hommes d’infanterie devant le pont coupé de la Flèche ; j’apprends que les Brigands avaient filé sur le Mans, à l’instant je fais passer la rivière à ma cavalerie à la nage et me petite infanterie sur des poutres, des planches et des petits nasselles. Nous trouvames encore dans la ville quelques cents Brigands qui furent tous massacrés et nous rendimes maitres de plusieurs canons, caissons et voitures. Je poursuis l’ennemi jusqu’à Fultourte (Foulletourte), la route était semée de cadavres ; la même nuit je fis égorger plus six cents Brigands qui avaient couché dans les villages et fermes dispersés.
Le 21 j’avance sur le Mans et j’attaque l’armée royale le matin dans cette ville. Il paraitra sans doute extravagant de toujours vai (vouloir) attaquer des villes avec de la cavallerie ; mais par ce moyen je lassai et dégoutai les devots de se battres ; je leur faisais user des munitions, et j’empêchai la dévastation totale des campagnes ; aussitôt que l’infanterie ennemie se portait sur moi je battai en retraite en lui envoyant des boulets qui en étendirent toujours quelques uns. Ce jour je fus quitte pour un repli à une lieüe du Mans (« où j’établis un bivouac » – rayé).
Ma petite infanterie de 300 hommes qui formait mon appui arrive ; elle bivouaque avec moi ; nous entendimes beaucoup nos feux, et le 22 à dix heures du matin nous attaquons l’armée royale forte d’environ 80 à 90 mille hommes ; elle était retranchée au Mans jusqu’aux dents ; et partout des chevaux de frise étaient placés. J’avais embusqué ma petite infanterie, l’ennemi fort de ses retranchements se porte sur moi, nous soutenons le combat près de trois heures, chaque coup de canon renversa des brigands, enfin je fus obligé de replier, la cavalerie et le canon soutinrent la retraite de l’infanterie. Muler arrive avec sa division, il avance ; mais à la première décharge il prend la fuite et ordonne à sa troupe de le suivre pour dit il, prendre position, effectivement il pris position à Fouilletourte (sic), (à) 4 lieües du Mans. La division de Cherbourg commandée par le général Thilly arrive après coup, elle avance fièrement sur l’ennemi, le combat s’engage et en moins d’une heure les Brigands se replient ; je me mets à la tête de ma cavalerie ; et de concert avec la division de Cherbourg nous chargeons l’ennemi avec tant d’impétuosité que bientôt il fuyait à tout jambe dans le Mans. Muler qui me croyait battu motionnait bien loin de l’ennemi contre moi auprès du représentant du peuple Bourbotte qui de bonne fois croyait tout perdre ; le général en chef, Marceaux arrive et me trouve à la poursuite de l’ennemi à trois portées de fusil du Mans ; il me remit la lettre siuvante :
« Ton imprudente audace à déjà plusieurs fois compromis le succès de nos armes et le salut public ; tu viens encore par ton attaque de tantot, de nous exposer à être battus et mis en déroute. Nous t’ordonnons de te renfermer strictement dans les ordres qui t’ont été donnés par le général en chef ; ces ordres te deffendent d’attaquer l’ennemi ; mais seulement d’éclairer sa marche, de le harceler sur ses derrières et de ne jamais engager d’action. Songes qu’il y va de ta tête ; elle est là pour nous répondre de ta soumission à ce qu’exigent de toi les représentants du peuple et le général en chef. Signé Bourbotte. »
Il faisait nuit et Marsault donna ordre de prendre position devant le Mans pour l’attaquer le lendemain, il ne connaissait pas comme moi les retranchements de l’ennemi devant cette ville ; l’attaque était difficile et aurait couté la vie à bien des braves républicains ; je lui dis que la meilleure position était dans le Mans, qu’il fallait proffiter du moment ; je marchai toujours en avant, Marceaux me serra la main et me dit : tu Joües gros jeu, brave homme, mais vas je ne (te) quitte pas. Nous doublons le pas, cavalerie et infanterie se mettent à courir et nous sauton pour ainsi dire, ensemble dans les retranchements ennemis qui n’avaient pas eu le temps se reconnaitre ni de se rallier ; nous poursuivons les ennemis fuyant dans les fauxbourgs du Mans, tout ce qui se présente devant nous est renversé et taillé en pièces ; beaucoup de canons, caisson et voitures tombent en notre pouvoir, et les rües ne présentaient plus que des monceaux de cadavres et des semées d’armes ; mais arrivant vers la place l’ennemi y avait braqué plusieurs pièces de canon et s’était placé dans les maisons d’où il fit un feu d’enfer sur nous. Je fis arrêter la troupe et Marceaux m’envoya à l’instant du canon pour empêcher les Brigands d’avancer sur moi ; nous étions en ce moment en bien petit nombre. Marceaux fit filer une colonne qui s’empara de la route de Paris, moi je fis garnir toutes le rües adjacentes à la place, toute la nuit du canon et de la mousqueterie ne discontinua pas , ; chacun tenait sa position. Le général Kleber qui avait été le plus éloigné avec sa division arrive aussi, il se place devant l’ennemi ; mais il m’envoye sur le champ de la troupe fraiche pour relever celle qui était abymée de fatigues. Marceaux par précaution s’occupait à faire abattre et combler les retranchements et à faire évacuer les fauxbourgs de tout ce qui était tombé en notre pouvoir. Toute la nuit quoi que deux fois je me fusse trouvé mal, par les blessures que j’avais reçus, le deffaut de subistances et la fatigue je ne lachai pas prise et le 23 à la pointe du jour, je mis pied à terre et fis avancer le canon à la tête de l’infanterie nous avançâmes avec tant de précipitation sur l’ennemi qu’en moins de dix minutes, je me rendis maitre de la place, des équipages et du canon ennemi ; sans m’arrêter un instant dans la ville je le suivi sur la route de Laval où à chaque pas des centaines et des milliers de Brigands trouvèrent la mort. Ils se dispersèrent dans les bois abandonnant leurs armes, les citoyens des environs les traquèrent et les ramenèrent par douzaines, tous furent taillés en pièces. Je le serrai de si près que les princesses et marquises abandonnaient leurs voitures et barbottaient dans la crotte. Les canoniers et leurs canons, et les chartiers leurs caissons et équipages et c’est sur des monceaux de cadavres que le 24 au soir je suis arrivé à Laval avec ma cavalerie et artillerie. L’ennemie avait passé et quitté cette ville avec précipitation et dans le plus grand désordre au point que les femmes désarmèrent les trainards. Je suis l’ennemi à Cran (Craon), de là à St Marc (Saint-Mars-la-Jaille), chaque pas, chaque ferme, chaque maison devinrent le tombeau d’un grand nombre de brigands.
Le 26 l’armée catholique et royale arrive à Ancenis ou elle voulait passer la Loire, tous les batteaux sur la rivière avaient été conduits à Nantes par ordre du représentant du peuple Carrié en sorte que le passage devenait difficile. Les Brigands avaient pris dans un étang près de St Marc, une petite nasselle dans laquelle la Rokjaquelin (sic) et Stofflet, deux de leurs chefs ont passé les premiers la Loire ; mais suivant les rapports tous deux en débarquant ont été fusillés par nos troupes ; l’ennemi résolut de forcer le passage, il prit à Ancenis tous les tonneaux poutres et planches pour former des radeaux, mais le 27 au matin je me trouve devant lui et fais lancer quelques boulets au milieu des travailleurs sur la rive et dans la ville. Cela donna l’allarme, tous les cloches sonnèrent à l’instant et les crix : aux armes ! se firent entendre de toutes parts ; l’armée royale sort d’Ancenis et se porte sur moi. Je fais ma retraite comme à l’ordinaire sur St Marc et après bien des fatigues l’ennemi retourne à Ancenis peu satisfait d’avoir perdu une journée aussi précieuse pour son passage. Cependant il se remit au travail, j’envoye un exprès à Ancenis et je fais donner la fausse nouvelle que notre armée était arrivée à St Marc, pour attaquer Ancenis le lendemain à la pointe du jour. Cette ruse réüssit parfaitement ; l’on voullait précipiter l’ouvrage ; les radeaux s’enfoncèrent sur la Loire et beaucoup de brigands se noyèrent. Cinq de leurs chefs désespérés prirent la fuite, une quantité débandée se porte sur Varades et y trouve la mort. L’armée évacüe Ancenis le 28 à la pointe du jour, j’en fus averti, aussitôt je me porte sur cette ville, plusieurs cents (sic) Brigands y avaient restés, tous furent taillés en pièces, l’ennemi a évacué avec tant de précipitation qu’il à abandonné beaucoup d’équipages, cehvaux, bœufs et pièces de canons de gros calibre.
Les expéditions finies je suis l’ennemi qui s’était porté à Norte (Nort-sur-Erdre), chemin faisant j’apprens que quelques cents brigands avaient resté au village des Touches, il pleuvait à verse et faisait beaucoup de vent j’en profite à onze heures de la nuit j’entre ventre à terre dans ce village, tout ce qui se présente est renversé par ma cavalerie. Je place des postes aux deux extrémités du village, le reste de ma cavalerie mit pied à terre et réveilla les brigands endormis à coups de sabres. La massacre fut sanglant et dura quatre heures : cette expédition m’ayant bien réussi je résolu de donner le même réveil à l’armée catholique à Norte ; j’envoye une patrouille pour sonder le terrain, qui a trouvé le pont gardé et deux pièces de canons braqués. Je voulais absolument ne pas laisser un moment de repos à l’ennemie ; j’envoye une grande patrouille avec ordre de se mettre hors la route et de tirer quelques coups de carabine sur le poste du pont. L’allerte fut donnée et la générale battüe aussitôt. J’aproche Norte vers cinq heures du matin le 29. J’entens de loin le canon et (les) équipages filer ; un poste de cavalerie était placé au pont pour favoriser l’évacuation de ce bourg ; je tombe sur ce poste, et plus des deux tiers furent massacrés, le reste prit la fuite ; j’entre ventre à terre dans Norte plus de 1 200 brigands y étaient encore, trois à 4 cents se rendirent, beaucoup furent taillés en pièces et le reste se sauva débandé et fut ramené par les citoyens des environs. Plus de cent chevaux devinrent notre prise du jour.
Sans débrider , je suis l’ennemi sur la route de Blin (Blain) où il arriva le 29. Je charge le derrière de la colonne, la cavalerie entra même au milieu des brigands et les engagea amicalement à jeter leurs armes et à se rendre, tous crièrent à la tête de la colonne de s’arrêter, qu’ils voulaient se rendre, Marigny un de leurs chefs arrive avec de la cavalerie et sabra les benais (sic)(10), ma cavalerie rebroussa chemin sans essuyer un coup de fusil. Je m’étais arrêté à Norte pour dépêcher une ordonnance au général en chef pour lui aprendre la marche de l’ennemi ; au moment que j’arrive je fis charger la queüe de l’ennemi de la colonne de l’armée royale, très peu périrent dans cette ocasion, Marigny embusca son infanterie et braqua sur moi du canon ce qui m’arrêta tout court : mes chevaux pour ainsi dire tous defférés et harassés de fatigue, je laisse partir tranquillement monsieur de Marigny qui le même soir est arrivé à Blin et je retourne à Norte en plaçant des avant postes. Toute la journée les habitans des campagnes, avec les propres fusils des Brigands les traquèrent dans les bois et me les amenèrent par pelotons, tous furent mis à l’instant à mort à l’exception de 300 que j’envoyai à Nantes. Le même soir il m’est arrivé un secours d’environ six cents hommes d’infanterie j’ordonne le départ pour le lendemain 30 à quatre heures du matin, je pars avec ma cavalerie, et par une grande négligence l’infanterie ne partit que vers sept heures à l’exception de 150 hommes détachés qui me suivirent. J’arrive à sept heures au premier pont devant Blin : l’ennemi l’avait coupé, j’aprends qu’à huit heures l’armée catholique devait célébrer une grand’messe, je fais mettre l’infanterie en croupe derrière les cavaliers et je passe ainsi la rivière. J’embusque mon infanterie et j’avance sur Blin avec la cavalerie au moment où on se rendait à la messe. Je fais faire feu sur les avant postes ennemis, ils prirent la fuite et se retirèrent derrière leur canon. Le tocsin sonne et le canon ronfle, l’ennemi sort de la ville et se précipite sur moi. Je me retire derrière mon infanterie qui fit un feu de file sur l’ennemi et jetta quelques hommes bas. J’avais placé dans un fonds couvert par une forêt assez de chevaux pour pour recevoir mon infanterie qui se retira aussitôt et passa l’eau. De la suivi de près, nous restons deux heures en observation l’un devant l’autre. L’ennemi se retire, le reste de mon infanterie arrive, et la grande messe sonne une seconde fois, je forme la résolution d’une seconde attaque, je voullais faire passer l’infanterie sur les chevaux, un capitaine d’infanterie de la légion des francs nommé Vaillant se précipite, passe la rivière à pied, seul de l’autre côté et crie : Vive la République ! Toute l’infanterie suit son exemple, la cavalerie passe aussi et nous courons tous pour entendre la grand’messe de l’évêque d’Agra ; mais ce monsieur, nous fit arrêter tout cours par un feu de file et une bordée de boulets, nous sommes obligés de repasser la rivière où j’ai perdu un homme qui s’est noyé en voulant passer avec trop de précipitation.
Je place ma troupe dans des fermes voisines, et n’ayant pas reçu de nouvelles de l’armée, je pars pour Nantes pour en apprendre et entre-parler avec les représentants du peuple.
La même nuit je reçois une lettre de Marceaux qui m’annonce qu’il arriverait le lendemain 1er nivose au soir pour attaquer Blain par la droite tandis que je ferai une fausse attaque de front. Profitant de la nuit l’ennemi coupa le second pont devant Blain, ce qui rendait mon attaque bien difficile. L’eau était profonde et je n’avais pas d’autre retraite ; enfin l’armée royale instruite de l’arrivée de notre armée prit le parti d’évacuer Blin la même nuit et le deux au matin, pendant que je m’ocupais à faire réparer le pont et à faire passer les rivières à mon infanterie sur les chevaux, Marceaux entre dans dans Blin et fit tuer un grand nombre de Brigands qui y étaient restés. Sans m’arrêter je suis l’ennemi sur la route de Savenay, (un) grand nombre de trainards furent mis en pièces tout le long de la route. L’armée catholique ne fut pas arrivée une heure dans Savenay, que j’attaque ses avant postes ; l’ennemi sort se porte sur moi en m’envoyant des boulets l’un après l’autre. Je fais ma rertraite et l’ennemi me poursuit à une lieüe ou je fais front sur une hauteur. Plus d’une heure nous restons en observation l’un devant l’autre ; enfin lassés, les Brigands se retirent dans Savenay. Cette attaque à donné temps à notre avant-garde d’arriver. Je place en position sur le flanc de la route une pièce d’artillerie légère, j’embusque l’infanterie et j’attaque une seconde fois les postes ennemis avec ma cavalerie. L’ennemi sort avec beaucoup de précipitation de la ville, (précision dans la version imprimée : « suivi d’une pièce de huit ») se jettent sur moi, je me replie derrière mon canon qui salua les Brigands d’une rude force. A l’instant l’infanterie embusquée fit un feu de file et courut dessus, la cavalerie charge et la pièce de 8 fut prise. Nous poursuivons l’ennemi en déroute, nous en tuons quelques uns ; il gagna une petite forêt devant Savenay, et la nuit nous empêcha de pousser notre victoire plus loin. L’armée arrive et prend position à une demi lieue de Savenay, toute l’avant-garde près de cette ville toute la nuit sans feu. Vers minuit je place une pièce de 8 à l’avant-garde et je fais avancer des patrouilles sur les deux flancs. Je commence la canonnade, l’ennemi riposte toute la nuit. Je m’éloigne beaucoup sur la gauche pendant que l’on amusait les Brigands sur la route, je fais la reconnaissance de la ville, en revenant je dis aux soldats : demain c’est la fin de la guerre. Vers trois heures du matin je me retire et prends un peu de repos. Le 3 à la pointe du jour, Marceaux fit battre la générale et chargea Kleber et moi de l’attaque. Sans nous attendre l’ennemi s’avance sur notre avant-garde qui se replie sur la division de Cherbourg, tandis que moi je conduisais la division de kleber avec le général Canuel à un chemin sur la gauche pour couper la ville et entrer par derrière ; Kleber se chargea du front et de la droite, la division de Cherbourg fonce sur l’ennemi avec son courage ordinaire. Déjà nous paraissons sur la hauteur derrière la ville lorsque les Brigands nous apperçoivent, bientôt ils se sauvèrent à toutes jambes en criant hautement à la trahison. Tout le monde court dessus et Savenay est à nous. Nous y fimes une boucherie horrible, les dernières sic pièces de canons, quelques caissons, équipages, trésor etc, tout tomba en notre pouvoir. Marceaux et les autres généraux, avec les représentants du peuple Prieur et Turreau, suivirent l’ennemi sur la droit très peu leurs échapèrent ; partout on ne voyait que des monceaux de morts ; moi je me suis attaché à quelques pelotons de cavelerie et d’infanterie qui s’étaient sauvés sur la gauche, tous furent noyés ou taillés en pièces. Les Brigands qui échapèrent cette journée à la mort furent traqués, tués ou ramenés par les habitans des environs. Dans la banlieue de Savenay seul, plus de six mille ont été enterrés. C’est ainsi qu’une armée forte au Mans, le 22 frimaire de 80 à 90 mille hommes fut complètement détruite dans douze jours, par le génie et le courage des soldats républicains qui tous, pour ainsi dire, ont amassés des trésors des dépouilles des ennemis de la République.
Westermann »
Notes :
(1) « Histoire de la Vendée Militaire », par Jacques Crétineau-Joly, tome II, p. 6 de l’édition « nouvelle et illustrée » de 1895-1896.
(2) Procès du 2 avril 1794.
(3) SHD B 5/7-57, v. 1/11, bulletin analytique.
(4) AD85 1 Num 119 4/11.
(5) AN D XLII 3-24, v. 1 et 2/15.
(6) AN AF II 273-7, v. 1 et 2/19.
(7) Savary, tome II, p. 240 et sq.
(8) SHD B 5/7-97, v.4 à 15, s.d. bulletin analytique compris. Document consultable également aux Archives Nationales en AD XVIII C 306-14, aux AD85 en BR 408, bibliothèque du comte de Chabot, imprimé à Paris en l’an II et . On retrouve également en cote 1 M 491 des Archives Militaires de Vincennes un « Aperçu des mouvements de la colonne du général Westermann conduisant l’avant-garde de l’Armée de l’Ouest ».
(9) On sait que le 21 juin, le camp de Lescure du Busseau fut attaqué parallèlement, non en direction de Parthenay mais de la route menant dans le Bocage via l’Absie.
(10) Transcrit « benêts » dans la version imprimée. On voit bien par là, quelles étaient les véritables intentions de Westermann vis-à-vis de ceux qui voulaient se rendre.
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Commentaires
5DavidJeudi 30 Septembre 2021 à 20:16Merci pour cet article très instructif. N’ayant découvert votre blog qu’après sa fermeture je me réjouis de relire chemins secrets sur d’autres supports. S’agissant de l’erreur de Reynald Sécher sur le discours de Clémenceau j’ai immédiatement saisi la référence au livre « Du génocide au mémoricide » tant le prétendu discours imputé à Clémenceau était iconoclaste sur le personnage! Au fond Sécher ne cite pas Drumont comme référence (p.215 de son livre) mais le livre de Pierre Miquel intitulé « la troisième république ». Miquel aurait-il donc fait la même erreur ?-
Jeudi 30 Septembre 2021 à 21:20
Merci de votre commentaire. En effet, un nouveau "Chemins secrets" va bientôt apparaître, sans publicités intrusives ni chantage à l'inscription.
Je ne sais si Miquel a fait cette erreur, mais j'estime que sur des ouvrages qui se veulent aussi péremptoires, Sécher aurait pu au moins consulter les pièces originales. Mlaheureusement, cet auteur, ne s’embarrasse pas avec des précisions pourtant indispensables et préfère faire du sensationnel. Il n'est pas le seul dans ce cas et beaucoup d'historiens, que ce soit d'hier ou de nos jours, n'ont eu de cesse que de recopier ce qui avait été fait par d'autres avant eux. La cause vendéenne ne gagne pas à exagérer des faits qui sont largement suffisants pour prouver les intentions du gouvernement révolutionnaire. Faire de la surenchère, c'est nous discréditer plutôt que de rendre service à l'oeuvre de mémoire et à la compréhension de l'histoire.
Bien cordialement,
R. Lueil
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Jeudi 30 Septembre 2021 à 20:44
Merci de votre commentaire. En effet, un nouveau "Chemins secrets" va bientôt apparaître, sans publicités intrusives ni chantage à l'inscription.
Je ne sais si Miquel a fait cette erreur, mais j'estime que sur des ouvrages qui se veulent aussi péremptoires, Sécher aurait pu au moins consulter les pièces originales. Mlaheureusement, cet auteur, ne s’embarrasse pas avec des précisions pourtant indispensables et préfère faire du sensationnel. Il n'est pas le seul dans ce cas et beaucoup d'historiens, que ce soit d'hier ou de nos jours, n'ont eu de cesse que de recopier ce qui avait été fait par d'autres avant eux. La cause vendéenne ne gagne pas à exagérer des faits qui sont largement suffisants pour prouver les intentions du gouvernement révolutionnaire. Faire de la surenchère, c'est nous discréditer plutôt que de rendre service à l'oeuvre de mémoire et à la compréhension de l'histoire.
Bien cordialement,
R. Lueil
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<style type="text/css"></style>Cette critique concernant les sources de Crétineau-Joly ne date pas d’hier. En 1877, Eugène de La Gournerie écrivait que Crétineau a été « un grand dénicheur de pièces, ou plutôt il savait si bien les faire valoir qu’elles lui arrivaient de tous côtés ». Tant mieux pour son Histoire de la Vendée si des correspondants lui ont fourni des pièces originales, et peut-être même celle de Westermann.
Le problème est que « son tort alors était de faire le mystérieux, comme un amant, de ses bonnes ou plutôt de ses mauvaises fortunes, et, au lieu de s’attacher à prouver, de ne chercher qu’à intriguer. De là une certaine défiance du public érudit, qui tient toujours à remonter aux sources ».
La Gournerie en donne un exemple avec les Mémoires du Cardinal Consalvi, édités par Crétineau-Joly en 1864. Le doute est venu de Dom Guéranger qui fit remarquer que ce texte n’avait pas été publié en italien. Crétineau-Joly ne voulait pas montrer l’original. « Aussi l’authenticité des Mémoires de Consalvi n’a-t-elle cessé d’être mise en doute que lorsque le fac-similé du passage le plus important a été mis sous les yeux des lecteurs. Encore est-il fort heureux qu’on n’ait pas exigé davantage, car Crétineau s’était mis dans l’impossibilité de faire connaître le texte entier. »
Alors peut-on imaginer qu’il en fut de même avec les lettres de Westermann (« J’ai écrasé les enfants sous les sabots des chevaux… ») ou de Merlin de Thionville (« Les Brigands n’ont pas le temps d’écrire ni de faire des journaux… ») ? Peut-on croire que Crétineau-Joly ait eu ces pièces entre les mains, mais qu’il les ait cachées, voire fait disparaître, peut-être pour que son œuvre soit à l’avenir la seule référence qui permettent de les citer ?
(Eugène de La Gournerie, J. Crétineau-Joly, Revue de Bretagne et de Vendée, 1877, pp. 5-13)
Afin que le lecteur puisse observer par lui-même les faits évoqués dans cet article salutaire, les deux historiens désignés de manière anonyme sont :
– Le premier (qui a mené l’enquête sur cette fameuse lettre de Westermann) : Alain Gérard dans son livre « Vendée, les archives de l’extermination » (pages 562-564).
– Le second (qui indique la cote B 5/16) : Reynald Secher, dans son livre « Le génocide franco-français, la Vendée-Vengé » (citation en page 150, source en note 219).
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Ah, si seulement les archives personnelles disparues de Crétineau-Joly pouvaient enfin être retrouvées!