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Vincent Chapelain, ennemi de Turreau....
Vincent Chapelain, républicain
et ennemi de Turreau...
Voici un personnage dont nous n'aurions sûrement pas eu l'idée de parler sans l'intervention d'un lecteur de Chemins secrets qui nous a demandé quelques renseignements et que nous remercions de nous avoir inspiré cet article.
On connait essentiellement Chapelain par ses dénonciations contre Turreau contenues dans l'ouvrage de Lequinio "Guerres des Vendéens et des Chouans" , Paris, Pougin, An III (1794). Nous avions publié quelques éléments des ces dénonciations ici et présentons à présent une petite biographie de ce farouche républicain qui s'élèvera contre les massacres de masses, indistinctement de toute opinion.
Vincent Chapelain est né aux Epesses le 22 décembre 1757 d'un père chirurgien portant le même prénom et de Marie-Anne Gourdon mariés à la Plaine (49), le 26 octobre 1756. Il aura un frère prêtre, le célèbre abbé Pierre-Marie Chapelain (vitrail commémoratif dans cet article), né en 1763 et massacré aux Epesses le 27 juillet 1794. "La Maraîchine Normande" en a déjà parlé.
Vincent Chapelain apprendra la médecine comme son père et sera diplômé de la faculté de Caen. Marié à la Forêt-sur-Sèvre avec Marie-Charlotte Migeon (née en ce lieu le 30 septembre 1767 et décédée à Fontenay-le-Comte le 23 janvier 1845, fille d'André Migeon, farinier et de Charlotte Mousset). Il sera maire de "Mont-Mercure" (pas de "Saint' évidemment devant le nom de la commune), de la Flocellière et de Châteaumur. Vincent Chapelain adhère à la société populaire de Fontenay en 1791 et part servir dans les armées républicaines. De retour en Vendée vers la fin 1793, il sera chargé de réorganiser le canton de La Flocellière. Comme on le sait, il manquera d'être tué par Grignon et dénoncera les horreurs du plan d'extermination avec force. Le 24 mars 1794, il est envoyé à Paris par la Société Populaire de Fontenay, en compagnie de Tillier, pour porter un mémoire au Comité de Salut Public. Il sera reçu par Lequinio le 1er avril. Il aurait curieusement fait une tentative de suicide le 24 décembre si l'on en croit le document suivant :
"...Parmi les députés l'agitation était extrême, et dès le 4 nivôse, l'un d'eux nommé Chapelain avait trahi ses craintes personnelles en se frappant de son poignard. Représentant de la Vendée, il avait dénoncé avec acharnement le général Turreau et ne voyait en lui que le dévastateur de cette malheureuse contrée. Le procès de Turreau fut instruit et jugé par un conseil de guerre qui, ne trouvant pas l'accusation justifiée, rendit un arrêt d'acquittement. Il se peut que Chapelain eût tacitement reconnu que ses dénonciations reposaient en partie du moins, sur les préventions de la haine bien plus que sur l'évidence des faits, car il avait compris d'avance que son ennemi sortirait victorieux d'une lutte où son honneur courait le même péril que sa vie. Toujours est-il que le dénonciateur, consterné de son insuccès, ne put se faire à l'idée qu'il restait exposé aux ressentiments implacables du général républicain. Son imagination blessée ne lui laissa plus de repos, et son courage impuissant à braver la colère d'un homme lui permit cependant d'affronter le suicide ; inconséquence plus apparente que réelle, car la mort seule donne le repos. Il survécut toutefois à ses blessures. (1)
(1) Biographie des contemporains, par Rabbe, etc. - Histoire parlementaire, t. XXXVII, p. 145)
Extrait : Du suicide politique en France depuis 1789 jusqu'à nos jours: études sur la mort volontaire - par le Dr A. Des Étangs - 1860.
Vincent Chapelain n'avait obtenu un certificat de civisme que le 24 vendémiaire an III (15 octobre 1794) seulement si l'on en croit les AD85. Il est alors officier de santé à l'hôpital militaire de Fontenay où il habite rue Saint-Nicolas. Pour autant sa carrière politique continue et il est élu au Conseil des Cinq-cents le 14 octobre 1795. Son mandat se terminera en novembre 1799. Il décède le 27 juillet 1818 à Fontenay-le-Comte.
Portrait et signature de Vincent Chapelain, AD85.
Vincent Chapelain a laissé un intéressant mémoire que l'on retrouve aux AD85 en cote 1J2118. Le document est disponible en ligne pour ceux qui savent utiliser Internet mais nous l'avons transcrit afin de faciliter sa lecture pour ceux qui n'ont pas l'habitude des documents d'époque. PDF téléchargeable ICI.
Ce mémoire, bien que rédigé dans un français assez sommaire est particulièrement intéressant et nous montre l'état de la Vendée à la veille de ce qui sera la "Troisième Guerre de Vendée" de 1799. Chapelain y met en avant l'intérêt de ne pas surcharger une population déjà ruinée par des contraintes fiscales et militaires trop importantes, sous peine de voir de nouveaux soulèvements. Il y souligne également l'importance de l'espionnage. Nous laissons le lecteur se faire une idée au vu du document.
RL
Nuit du nouvel An 2016
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Commentaires
Le frère aîné de Vincent (le républicain) et Pierre-Marie Chapelain (le prêtre) s’appelait Honoré. Père de 9 enfants, chirurgien de son état (comme son père), il fut choisi comme chef par le Comité de paroisse de Saint-Prouant, lors du soulèvement de mars 1793. Pourchassé par la garde nationale du Boupère après l’effondrement de la Vendée en octobre 1793, il fut arrêté, conduit à La Rochelle, condamné à mort et fusillé le 2 novembre 1793. Il avait 41 ans.
La famille Chapelain a fait l’objet d’une intéressante étude historique et généalogique de l’abbé André Bouchet dans la Revue du Souvenir Vendéen n° 167, juin-juillet 1989, pp. 21-30.