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Erreur de tir à Ardelay....
Une erreur de tir...
En 1793, une sentinelle républicaine commet une grossière erreur, elle abat un officier municipal...
A l'instruction militaire on répète régulièrement qu'il faut bien identifier son ennemi avant d'ouvrir le feu, leçon que ce Bleu, dans tous les sens du terme, n'a pas retenue.
On peut situer cette affaire vers la fin de l'année 1793 ou au début 1794, puisque à partir du 21 janvier 1794, les Républicains massacreront indistinctement les Vendéens Blancs ou Bleus ; une façon de récompenser les supplétifs, ces républicains locaux, qui leur apportèrent une aide précieuse dans le génocide. Ces traîtres étaient généralement abattus d'une balle dans le dos après avoir ''balancé'' leurs voisins qui ne pensaient pas comme eux, la pensée unique était déjà en marche...
L'acte de notoriété qui va suivre nous confirme que la ville des Herbiers a été incendiée, que les habitants ont trouvé refuge à Mortagne et que comme toujours, des enfants se sont perdus.
Voici la composition de la famille de l'Officier Municipal au moment des
faits :
Mathurin Pineau est métayer à la Laudière commune d'Ardelay en cette année 1793. Il est Officier Municipal et Procureur de sa commune. « Il fut arrêté, chemin faisant par un coup de feu qui lui porta à la tête et le priva de la vie quelques jours plus tard.» (1) – Il est le fils de Pierre Pineau et de Modeste Boubrie, il épouse à Ardelay le 10 février 1779 Perrine Durand, fille de Pierre Durand et de Perrine Caillaud des Herbiers. De cette union sont issus :
1° Perrine Pineau, née le 19 juillet 1780 et † le 20 juillet 1780 à Ardelay.
2° Marie Pineau, née le 1 août 1781 et † le même jour à Ardelay.
3° Mathurin Pineau, né le 21 mai 1783 à Ardelay.
4° Jeanne-Modeste Pineau, née le 29 mai 1785 à Ardelay.
5° Pierre Pineau, né le 11 mars 1787 à Ardelay.
6° Perrine Pineau, née le 16 avril 1789 à Ardelay.
7° Louis Pineau, né le 27 mai 1791 à Ardelay.
Acte de notoriété du 3 Brumaire de l'an V (Lundi 24 octobre 1796).
« Par devant nous notaires publics du Département de la Vendée canton des Herbiers soussignés.
Sont volontairement comparus les Citoyens Jean Bourasseau agent municipal de la commune des Herbiers, Mathurin Libaud cultivateur demeurant à la Laudière, Jean Godet cultivateur demeurant à la Maison Neuve, Mathurin Joignet, Louis Tessier cabaretier, René Blanchard agent municipal de la commune d'Ardelay, Louis Grenon juge de paix, lieu canton des Herbiers, Pierre Pineau cultivateur, Charles Bordelais assesseur du juge de paix et Joseph Blaise maréchal taillandier demeurant tous commune D'Ardelai et des Herbiers.
Lesquels comparans nous ont affirmé et attesté avoir parfaitement connu feu Mathurin Pineau et parfaitement connoître Perrine Durand aujourd'hui sa veuve, avoir une parfaite connaissance que le feu Mathurin Pineau a été tué par méprise et par accident par une sentinelle républicaine il y a environ trois ans, qu'il étoit un excellent patriote, qu'avant l'insurrection de la Vendée, il étoit officier municipal de la commune qu'il étoit le procureur, que de son mariage légitime avec la dite Perinne Durand, aujourd'hui sa veuve sont issus cinq enfants dont le plus jeune est un garçon âgé d'environ cinq ans ; qu'ils ont une parfaite connaissance que lors de l'incendie qui fut mise aux Herbiers par les troupes républicaines la veuve Pineau s'y trouva avec ses enfants au nombre desquels étoit son fils le plus jeune* - atteste de plus (illisible) l'un des comparants avoir vû la dite Pineau et son fils à Mortagne lors de l'évacuation des habitants de la commune des herbiers en la dite commune de Mortagne lors du brûlement des maisons de la dite commune des Herbiers.
Ont également comparû François Loizeau meunier et Adélaïde Robert son épouse demeurant à l'Etenduère en la commune des Herbiers lesquels nous ont pareillement attesté et affirmé n'avoir qu'un fils procréé de leur mariage lequel est actuellement demeurant chez eux, et que conséquemment celuy qui est à Laval chez le citoyenne Cribier à Laval n'est point le leur et que c'est probablement celuy de feu citoyen Pineau procureur de la commune d'Ardelai et de Perinne Durand sa veuve.
Desquelles déclarations, attestations et affirmation les comparans nous ont requis acte que nous dits notaires leur avons octroïé pour valoir et servir ce que de raison a qui il appartiendra.
Fait et passé aux Herbiers étude d'Allard l'un de nous dits notaires ce jourd'huy trois Brumaire de l'an cinq de la République française une et indivisible après midy les comparans après nous on déclaré ne savoir signer de ce enquis exceptés ceux qui ont avec nous signé.
signé : Adélaïde Robert – Bourasseau agent – Blanchard agent – Tessier – Billaud notaire – Allard notaire. »
*Perinne Durand a confié à un beau-frère quatre de ses enfants et se réfugie à Hermant près de sainte Hermine avec le plus jeune de ses fils, Louis.
Sources:
.(1) Ecrivain : Philippe Ricot. - Ouest Editions – Les Herbiers sous la Révolution – pages 112,113 (ADV-L 347).
. Archives Départementales de la Vendée tous droits réservés. Minutes notariales des Herbiers - Etude A (1783-an IV) -Henri-René Allard – vues 51,52/434.
. Archives Départementales de la Vendée tous droits réservés. Registres état civil – registres paroissiaux d'Ardelay de 1776-1789 – 1743-1763.
. Photo: Gallica – estampe non identifiée.
X. Paquereau pour Chemins Secrets
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Commentaires
On lit dans les papiers de Jacques-Étienne-Louis Deladouespe que lorsque Mathurin Pineau fut frappé par ce tir, on avertit sa femme Perrine qui accourut pour le soigner, avec un enfant de deux ans (Louis) qu’elle prit avec elle. À peine était-elle arrivée qu’on vint lui dire que la troupe incendiait sa métairie. Elle s’y précipita alors, afin de sauver ce qu’elle pouvait, en laissant son mari à l’agonie (il est noté qu'il est mort le soir même), mais aussi son fils.
Dans la confusion provoquée par l’incendie des Herbiers, le jeune Louis Pineau fut recueilli sur le pavé par un officier qui le plaça sur une charrette et l’emmena jusqu’à Laval, où il resta par ordre de ce militaire chez la citoyenne Cribier. Celle-ci en eut bon soin et s’attacha tellement à l’enfant qu’elle refusa de le remettre quand sa mère vint le réclamer trois ans après. Il fallut un autre voyage, entrepris cette fois par Charles Brunet, second mari de Perrine Durand (ils se sont mariés à Ardelay le 27 novembre 1796), et l’intervention de la municipalité de Laval, pour que la citoyenne Cribier cède enfin et restitue Louis à sa mère.
Après l’incendie des Herbiers, Perrine Durand se réfugia dans la Charente-Inférieure, puis elle s’installa à Sainte-Hermine, avant de pouvoir revenir à Ardelay.
Source : Papiers et correspondance de J.-É-L. Deladouespe (1746-1810), publiés par son arrière-petit-fils, Alfred Deladouespe, Niort, L. Clouzot, 1904, pp. 24-25)