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La colonne infernale des frères Huché....
La Colonne Infernale des frères Huché.
La petite fête donnée à Nantes le mardi 4 février 1794, à l'occasion du mariage de son petit frère étant terminée, Jean-Baptiste-Michel-Antoine Huché, entre deux ''cuites'', est bien décidé à ''casser'' du Vendéen. Dès le 10 février, les massacres commencent et il rend compte à Turreau le 28.
« Je te rends compte, mon cher général, de la sortie que j'ai faite hier contre les Brigands que j'ai trouvés, sur les huit heures, à la Gaubretière. Je les ai égayé de la bonne manière ; ils étaient en trop petit nombre pour en faire un grand carnage ; plus de cinq cents tant hommes que femmes ont été tués. Leur cavalerie, avant de rien engager, a pris la fuite, et nous ne l'avons aperçue que dans le lointain. Cette canaille a été assez audacieuse que de nous provoquer par des défis, des huées et des injures. On s'est fusillé très peu, et quarante de ces scélérats sont tombés. J'ai fait fureter les genêts, les fossés, les haies et les bois, et c'est là qu'on les trouvait blottis. Tout a été passé par le fer, car j'avais défendu que, les trouvant ainsi, on consommât les munitions.
Les fouilles faites des repaires, j'ai fait marquer les lieux où il y avait des grains, je les ai réservés et ai fait incendier de suite le reste.
J'oubliais de te dire qu'à mon arrivée à la Verrie, j'ai fait passer au fil de la baïonnette tout ce que j'y ai trouvé, à la réserve des enfants, et que j'ai incendié ce qui était échappé aux flammes....
A Saint-Malo-du-Bois, il n'y avait rien, pas une âme, j'ai ordonné le feu… »
Mais Huché n'est pas seul comme criminel, il a sous ses ordres des exécutants qui ne valent pas plus cher que leur général. Ce ne sont plus des soldats, mais de simples débauchés, une soldatesque vomie par l'Enfer. Il m'a donc semblé intéressant de perpétuer les unités, les régiments, qui se sont couvert d'opprobe pendant ces grands massacres en ce premier semestre 1794.
Pour cette recherche, j'ai donc pris deux ''photographies'' des unités sous les ordres du général Huché ; l'une prise le 21 décembre 1793 et l'autre le 30 Ventôse de l'an 2, c'est à dire le 20 mars 1794 ; cette dernière me semblant la plus plausible en ce qui concerne les unités impliquées dans les grands massacres, bien qu'un panachage des deux ne soit pas impossible.
« Tableau Général des Troupes,qui sont sous le commandement de l'Adjudant Général HUCHE actuellement général de Brigade à la fin de l'année 1793.
Tableau du 2ème Bataillon de Valencienne.
2ème Bataillon de Valencienne – n°2.
Composition du corps tel qu'il doit être.........................1000 hommes.
Nombre d'hommes effectifs............................................ 225 hommes.
Nombre de chevaux...........................................................5 chevaux.
Garnison : Cuillé.
Sur 225 hommes, 36 au dépôt de Chartres.
60 hommes en détachements et hôpitaux.
Tableau du 3ème Bataillon de Douaÿ.
3ème Bataillon de Douaÿ – n°3.
Composition du corps tel qu'il doit être.........................733 hommes.
Nombre d'hommes effectifs...........................................330 hommes.
Garnison : Laval.
Tableau du 4ème Bataillon de la Sarthe.
Composition du corps tel qu'il doit être.......................1000 hommes.
Nombre d'hommes effectifs...........................................430 hommes.
Chevaux.......................................................................................6 chevaux.
Garnison : Cossé.
Tableau de la compagnie des canonniers.
1ère compagnie d'Alençon.
Composition du corps tel qu'il doit être..........................80 hommes.
Nombre d'hommes effectifs............................................63 hommes.
Chevaux.....................................................................................20 chevaux.
Garnison : Cossé.
Tableau des Chasseurs de la Mayenne.
Nombre d'hommes effectifs............................................80 hommes.
Garnison : Cossé.
Tableau des Chasseurs d'Loron.
Composition du corps tel qu'il doit être.........................130 hommes.
Nombre d'hommes effectifs.............................................29 hommes.
Chevaux.......................................................................................6 chevaux.
Garnison : Mesnil.
Cavalerie Volontaires.
Composition du corps tel qu'il doit être.........................137 hommes.
Nombre d'hommes effectifs.............................................29 hommes.
Garnison : Laval.
Détachement du 16ème Rgt de Dragons.
Composition du corps tel qu'il doit être.........................800 hommes.
Nombre d'hommes effectifs.............................................17 hommes.
Chevaux.....................................................................................18 chevaux.
Garnison : Cossé.
5ème Division.
Composition du corps tel qu'il doit être...........................89 hommes.
Nombre d'hommes effectifs.............................................88 hommes.
Nombre de chevaux........................................................63 chevaux.
Formation : le 16 février 1791. - Le corps a été formé en Mayenne.
Garnison : Laval et Angers.
Sur le nombre des 88 hommes portés effectifs, il n'y en a, à Laval que 46 hommes dont beaucoup de malades et chevaux estropiés, 8 hommes à Angers et 34 dispersés dans les différents endroits.
Récapitulatif...........................................................................1077 hommes.
Hussards....................................................................................34.
Chasseurs..................................................................................31.
Cavaleries.................................................................................30.
Gendarmerie Nationalle........................................................88.
Chevaux en tout.....................................................................177.»
Voilà l'effectif pour la fin de l'année 1793, la Gendarmerie Nationale est pratiquement au complet, 88 hommes sur 89 de prévus.
Le 30 Ventôse de l'an deux (20 mars 1794), nous sommes encore dans la période des grands massacres. Les unités sont opérationnelles et n'ont pas encore été réorganisées. Nous avons donc à coup sûr affaire avec les massacreurs, voici donc les formations et régiments coupables des plus grandes turpitudes.
Sont avec Huché le 30 Ventôse de l'an 2 :
.Le 7ème Bataillon des Vosges............................451 hommes.
.Le 3ème Bataillon des Vosges...........................148 hommes.
.Le 1er Bataillon de Jemmapes..........................306 hommes.
.Le 7ème Bataillon du Jura............................... 420 hommes.
.Le 14ème Bataillon de la Charente...................294 hommes.
.Le 1er Bataillon de Seine et Oise......................300 hommes.
.Le 7ème Bataillon du Calvados...........................88 hommes.
.Le 8ème Bataillon du Calvados...........................88 hommes.
.Le 15ème Bataillon de la Légion Nantaise........112 hommes.
.Détachement du 41ème Régiment.......................72 hommes.
.Le 1er Bataillon de Maine-et-Loire....................260 hommes.
.Le 3ème Bataillon de la Vienne........................625 hommes.
.Le 5ème Bataillon des Deux-Sèvres..................122 hommes.
.Détachement du 77ème Rgt -1er Bataillon.........72 hommes.
Soit une Colonne Infernale d'un effectif de 3358 hommes.
On ne parle pas de la Gendarmerie, celle-ci étant répartie dans les diverses Colonnes. Il existe pour l'Armée de l'Ouest une garnison de Gendarmerie à Machecoul : la 31ème Division de Gendarmerie avec 99 cavaliers et la 6ème avec 68 hommes stationnée à Niort ; la Gendarmerie de 12 départements et autres, est répartie sur tout le théâtre d'opération.
A propos de la Gendarmerie, je vais essayer de vous brosser la carrière type d'un cavalier de la Maréchaussée pendant cette période troublée. En effet, un ami de Jean-Baptiste-Isaïe Huché, Jean-Louis Maussion, lieutenant de gendarmerie est témoin à son mariage à Ancenis le 18 Germinal de l'an 8 (31 mars 1800). Se sont-ils connus en Vendée où lors de la purge des Chouans sous le Directoire et le Consulat ? De toute façon, cet officier a trempé dans les Colonnes Infernales puisqu'il était en Vendée, et qu'il est rentré chez lui en juin 1794. (Le recensement d'Ancenis, le 2 ventôse de l'an 4, nous informe que Jean-Louis Maussion, gendarme, 44 ans, est entré dans la commune il y a 27 mois… y est domicilié avec Henriette Gicquiau et une domestique)
Jean-Louis Maussion est né le 28 décembre 1751 à Chateaubriant. Il est le fils du Sieur Jean-René Maussion et de Jeanne Bauduz. Il se marie en premières noces avec Demoiselle Marie Hamon, en secondes noces avec Henriette Gicquiau-Gicqueau, fille d'un Sénéchal, décédée le 21 janvier 1800 à Ancenis, puis en dernières noces avec Charlotte-Perrine Moriceau, il est père de dix enfants.
Voici les « Services successifs de Monsieur Maussion Jean-Louis, lieutenant de la dite compagnie de la 5ème Légion ».
Il s'engage comme fusilier au Régiment de Penthièvre Infanterie, le 31 mai 1767. Il est caporal le 16 juin 1769, caporal des Grenadiers le 14 juillet 1774, puis sergent le 27 octobre 1774 jusqu'au 15 juin 1775.
Il devient cavalier de la Maréchaussée le 17 mai 1776. Nous le retrouvons à Chateaubriant, Brigadier de la Maréchaussée le 22 décembre 1785, Maréchal-des-Logis le 3 mai 1791. Le 6 septembre 1793, c'est ''l'épaulette'', il est lieutenant de Gendarmerie à Ancenis jusqu'au 1er septembre 1814. Le total de ses services : 46 ans, 3 mois et 11 jours.
« Campagnes et blessures :
Il a fait les campagnes des années 1770,1771,1772 à l'île de Corse.
Celles de la Révolution des années 1792, 1793, ans 2, 3, 4, 5, 6, 7 et 8 aux Armées de la Vendée, des Côtes de l'Océan, de l'Ouest et Océan.
Blessé au pied droit en Corse, d'un coup de feu en 1770 près le bourg d'Osta.
En Thermidor de l'an 7 à l'affaire de Noyeau, il a eut le poignet gauche cassé par une chute de cheval.
Nommé membre de la Légion d'Honneur, le 3 messidor de l'an 12 -14 juin 1804, il prête serment à Ancenis le 4 Thermidor de l'an 12. »
Bien entendu, comme tous les autres, il prête serment au Roi le 16 août 1816. Cette promotion dans l'Ordre de la Légion d'Honneur n'est peut-être pas due au hasard, car il devient Légionnaire en même temps que le Chef d'Escadron Jean-Baptiste-Isaïe Huché et dans la ''première fournée'' de 1804 ; ce dernier prêtant aussi serment à Ancenis, le 1er Thermidor de l'an 12.
Jean-Louis Maussion décède le 3 octobre 1820 à Ancenis.
Sources:
Archives militaires de Vincennes via les Archives Départementales de La Vendée tous droits réservés. SHD B5/125-10-21 décembre 1793 - B5119-125 Armées de l'Ouest, état de situation.vue n°4/4. SHD B5/119-10 -20 mars 1794 vue n°2,3,4/13.
Archives Départementales de la Loire-Atlantique, tous droits réservés – commune d'Ancenis, Chateaubriant. Mariages an 8, vue 11/27. Décès1820, vue n°15/21 acte n°72.
Recensement an 4,vue n°34/53, n°582)
Archives Nationales – Base Leonore - dossier Légion d'Honneur – LH/1805/46, Jean-Louis Maussion.
Histoire de la Guerre de la Vendée – Abbé Deniau, Tome IV pages 286-287- édition 1878. Guerres des Vendéens et des Chouans… Jean-Julien-Michel Savary, tome III, p. 236.
Photos : de "Chemins secrets", de "Vendéens et Chouans" et de ''l'Histoire de l'organisation des armées'' de Carlpépin blog.
X. Paquereau pour Chemins Secrets
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