• Choses vues par Lucas de la Championnière....

     

    Choses vues par Lucas de la Championnière...

     

     Si les mémoires de Lucas de la Championnière sont bien connus, il est bon de rappeler certains passages et notamment les descriptions d'un témoin oculaire des pires moments de la première Guerre de Vendée. Nous extrayons ici quelques passages ayant trait aux villages de Legé et de Saint-Philbert-de- Grand-Lieu.

     

     RL

    Janvier 2015

     

    "... Les républicains cantonnés à Legé avaient massacré tous les habitans d'alentour ; les cadavres des femmes et des enfants, rangés dans tous les villages avec une symétrie barbare dont les sauvages n'eussent pas été capables, semblaient crier vengeance à leurs parens qui leur survivaient. Nous nous précipitâmes dans Legé malgré la défense de la garnison et le feu de deux pièces de canon. Cette fois nous avions attaqué par le chemin de Roche-Servière ; nous fûmes bientôt maîtres de la place, l'ennemi se sauvant par la route de Nantes se trouva pressé entre deux ruisseaux qui dans l'hiver forment des torrents, presque tous furent massacrés : à peine s'en sauva-t-il 60 de 800 qu'ils étaient.

     Il périt à cette attaque le fils Joly, jeune homme plein de courage et fort aimé des soldats ; son père perdit dans la même action ce fils qu'il adorait, un autre qui servait dans la république et dans le même jour un plus jeune qui fut massacré par une colonne ambulante.

     Parmi les troupes que nous venions de battre, il y avait un bataillon de Bordelais. On ne saurait voir une plus belle jeunesse. Que de fois j'ai gémi sur la nécessité de faire périr tant de gens dont la moitié peut-être partageait notre opinion ; mais les prisonniers faits dans l'année précédente étaient venus nous attaquer de nouveau ; nous savions qu'un jeune homme renvoyé sur sa parole n'était pas maître de la tenir. Peu d'entre ceux que nous aurions fait prisonniers auraient consenti à partager notre misère et nous n'avions plus d'endroit à pouvoir nous assurer d'eux. On conserva cependant un homme qui depuis nous a été bien utile ; c'était un capitaine, il avait fui avec sa compagnie, mais nos cavaliers l'arrêtèrent, et c'en était fait de lui, si son ami intime qui se trouvait parmi nous depuis peu de jours, ne fût arrivé à temps pour lui sauver la vie. Il se nommait Baumel ; il a été depuis un de nos premiers officiers et a servi avec distinction.

     Les cadavres d'hommes et d'animaux et des charognes de toute espèce faisaient de Legé un endroit infect où nous jugeâmes qu'on ne pouvait rester longtemps sans danger ; nous emmenâmes l'artillerie et toute la prise à la Benate....

     .../...

     Quelques jours après cette affaire une division républicaine, du côté de Nantes, vint jusqu'à Saint-Philbert indiquant sa route au loin par l'incendie de toutes les habitations.

     L'armée royaliste était à Touvois ; M. Charette marcha aussitôt vers l'ennemi, mais celui-ci était parti de Saint-Philbert au moment de son arrivée ; il ne s'y trouva qu'une centaine de traînards qui se jetèrent dans la rivière ou furent sabrés par nos cavaliers. Le feu consumait la ville ; plusieurs cadavres furent trouvés à moitié brûlés dans différens endroits. Celui d'une femme surtout frappa d'horreur tous ceux qui purent en approcher. Tout son corps était supporté sur la pointe d'un seul pied sans qu'elle touchât à rien qui put la soutenir ; elle avait les bras ouverts comme quelqu'un qui s'élance pour échapper d'un grand danger. La flamme sans doute l'avait surprise dans cette attitude ; ce tableau faisait frémir.

     Des cavaliers s'arrêtèrent au-delà de Saint-Philbert un républicain occupé à mettre le feu dans le lit d'un paysan : Scélérat que fais-tu là lui dit le premier qui l'aperçut ? Que pouvez-vous me reprocher lui répondit l'incendiaire, est-ce que je ne mets pas le feu ? Sa réponse fit croire que les Généraux républicains exigeaient de leurs soldats des crimes auxquels ils se refusaient quelquefois et que celui-ci nous avait pris pour être de sa compagnie. Nos piétons arrivant en foule se jetèrent sur le malheureux et voulurent le faire griller dans le feu qu'il venait d'allumer, mais M. Charette réprimanda fortement ceux qui avaient eu une pareille idée et il ordonna de fusiller le prisonnier de la manière la plus prompte..."

     

     

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