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Massacre à la Chapelle-Basse-Mer....
Massacre à la Chapelle-Basse-Mer…
C’est en fouillant une nouvelle fois les archives militaires de Vincennes que je suis tombé sur ce curieux combat contre, tenez vous bien, des femmes et des vieillards armés de faux. Le 13 mai 1794, Turreau de Garambouville est suspendu et quitte son poste le 17. Il sera nommé comme, on le sait, gouverneur de Belle-Ile le 22. Nous sommes donc au lendemain de l’abandon officiel du système des Colonnes Infernales, l’idéologie demeurant néanmoins la même.
On commence par le bulletin analytique des opérations (1) :
« Ancenis 24 mai 1794 5 prairial an 2
L’adjudant général Delaage au général en chef Vimeux
Enlèvement de 200 bestiaux. Débarquement du 3ème bataillon des Vosges, fort de 300 hommes. Corps de garde des brigands égorgés. 120 hommes tués vers la Chapelle Basse Mer dont 80 armés de fusil. 3 cavaliers tués. 150 tant femmes que vieillards armés de faulx et de fourches ont été massacrés. Dix enfants en bas âge conservés pour être conduits à Nantes. Le capitaine Souheil et le capitaine adjoint Bellarde se sont très bien conduits dans cette expédition. »
Maintenant, passons à l’inévitable « Tableau des opérations de l’Armée de l’Ouest » (2) :
« Ancenis 5 prairial
Enlèvement de près de 200 bestiaux. Débarquement du 3° bataillon des Vosges de 300 hommes sur la rive gauche sur 3 points. Corps de garde des brigands égorgé à la Bayonnette. 120 hommes tués vers la Chapelle Basse Mer dont 80 armés de fusils. 3 cavaliers tués et leurs chapeaux pris ( je lis textuellement même si le mot « chevaux » aurait paru plus adéquat), 150 tant femmes que vieillards armés de faulx et de fourches massacrés. 10 enfants en bas âge conservés pour être conduits à Nantes. 40 vaches et 11 veaux pris. Le capitaine souheil et le capitaine adjoint Bellarde se sont très bien conduit dans cette expédition. »
Savary, qui ne fait pas l’impasse sur cette date préfère toutefois édulcorer les faits (3):
« L’adjudant-général Delaage, au général Vimeux
(Ancenis)
Je t’annonce avec plaisir le succès d’une expédition qui vient d’avoir lieu sur la rive gauche de la Loire. Le troisième bataillon des Vosges, fort de trois cents hommes, a débarqué sur trois points. Un corps-de-garde des brigands a été surpris et enlevé (tiens, c’est bizarre, ils ne sont plus « égorgés"). Plusieurs postes ont été dispersés du côté de la Chapelle-Basse-Mer. Dix enfants en bas âge ont été conservés pour être conduits à Nantes. »
Il est clair que le texte original n’était pas publiable pour Savary…
En fouillant les travaux de Reynald Secher, on trouve ceci, dans sa monographie sur la Chapelle-Basse-Mer (4) :
« Le 24 mai 1794, les canonniers de la Loire sont les auteurs du massacre de René Jousseaume dont la population locale à conservé le souvenir. Cet homme, âgé de soixante-quinze ans, est, sous peine de mort, sommé par les républicains d’abattre les statues de la chapelle Saint-Simon à coups de hache. Il refuse et est égorgé au pied de l’autel. »
L’auteur nous donne en note N° 212, p. 284 (op. cit) l’acte N° 375 du registre clandestin tenu par l’abbé Robin. En consultant ce dernier, il n’apparaît nullement que le vieil homme aurait été tué par des canonniers (l’anecdote de son martyre ne semble pas sourcée). Je pense que l’on peut rapprocher ce crime, avec d’autres à la même date, du combat précédemment exposé.
Il est clair en tout cas que ce combat contre « des femmes et des vieillards » n’est pas à la gloire des pseudo-militaires composant l’armée française du moment.
RL
Novembre 2017
Notes :
(1) SHD B 5/9-21, v. 12/14.
(2) 2° tableau, SHD B 5/10-1, v. 7/26.
(3) Tome III, p. 511 et sq.
(4) Op. cit. p. 139.
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