• Le château de Puy-Guyon (3° partie)....

     

    Le château de Puy-Guyon (3° partie)…

     

    Après la seconde partie déjà vue ici, voici le dernier volet sur Puy-Guyon  que tout le monde attend, avec bien entendu le souterrain ! Avant que de présenter quelques photos, lisons la description qu’en a faite le docteur Boismoreau de Saint-Mesmin en 1914. Pour ceux qui s’intéressent aux souterrains, on retrouvera un autre travail de ce chercheur ici.

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    « Découverte et description du Souterrain-refuge de Puy-Guillon, près Cerisay (Deux-Sèvres)

    Dr Boismoreau, Saint-Mesmin-le-Vieux (Vendée)

    Bulletin de la Société préhistorique de France/Année 1914/Volume 11/Numéro 2 /pp. 119-123.

    Généralités. – A quelques centaines de mètres après le bourg de Cerisay, chef-lieu de canton des Deux-Sèvres, en suivant la grande route de Bressuire aux Sables-d’Olonne, on remarque, sur la droite, au sommet d’une côte assez dure, une superbe allée de vieux tilleuls.

    Si l’on s’engage dans cette allée, longue et large, on arrive sur un point culminant qui domine l’horizon et forme un véritable retranchement. On distingue les ruines d’un vieux mur de clôture, qui domine une vallée assez profonde au fond de laquelle coule un ruisseau. De ce côté l’attaque armée était, jadis, très difficile. Sur cette même hauteur, mais un peu plus à l’Ouest, on distingue les ruines d’un très vieux château. Les ruines, aujourd’hui, sont démolies, sans respect pour de curieuses sculptures qui dominaient les mâchicoulis. Ce n’est qu’un amas de pierres, envahies par les ronces !

    C’est la demeure des seigneurs de Puy-Guillon (1). De très intéressantes recherches seraient à faire sur ces ruines. Le point où elles s’élèvent constitue un poste de défense naturelle, arrangé par l’homme. Camp gaulois, très probablement. Peut-être des recherches attentives permetteraient-elles de trouver des silex et haches de Néolithiques, car l’endroit est merveilleusement situé pour se défendre – Le souterrain ou grotte, que nous allons étudier, a été creusé à une date certainement fort ancienne. Ce fut, sans doute, le premier refuge humain de ces lieux, à moins que des cabanes ne l’aient précédé.

    Quoiqu’il en soit le souterrain a précédé toute construction de pierres, et demeure, intact, au milieu des ruines.

    Découverte. – Ce souterrain est connu dans toute la région ; mais nous ne croyons pas qu’il ait été étudié. Nous ne pouvons pas dire que nous l’avons découvert ; mais nous pensons être le premier à le signaler. Peu de visiteurs s’y risquent maintenant, bien qu’on puisse le visiter en toute sécurité, car la voûte est très solide et durera des siècles ! Il est, en effet, creusé dans un chaple granitique très dur, comme celui de l’Oudrière, qui lui ressemble beaucoup ; aucun éboulis ne s’y manifeste (2).

    Nous l’avons visité pour la première fois en 1912. Nous l’avons montré, au cours de nos excursions préhistoriques, à M. de la Dr Marcel Baudouin, qui nous a engagé à publier nos notes à ce sujet.

    Sa description sera du reste assez sommaire.

    Topographie.- Il est absolument inutile d’insister sur ces points. La ferme de Puy Guillon, construite avec les matériaux de l’ancien château, est connue ; le chemin qui y conduit s’abouche à la grande route. L’allée des tilleuls est un excellent repère ; elle est unique dans le pays.

    On n’a qu’à se diriger vers les ruines, situé, situées dans la cour même de la métairie, au nord-ouest.

    Le terrain est essentiellement granitique ; l’altitude assez élevée par rapport à la vallée voisine.

    Description du souterrain-refuge.- I. Entrée. – a) Porte. – Si nous pénétrons dans les ruines, nous entrons dans une grande pièce où se trouve une magnifique cheminée romane, vouée à l’impitoyable massue du casseur de pierres. Ces ruines sont exposées au soleil couchant ; vers le Nord, le terrain s’élève et forme une petite colline. A l’opposé de la cheminée romane, on remarque un mur épais constituant une aile du château. Dans ce mur, au niveau du sol, on remarque une très curieuse porte romane : c’est l’entrée du souterrain (Fig 1).

    Passons dans les gravats, les briques brisées, les ronces, les épines et arrivons près d’elle. Elle est formée par deux pieds droits en granite et une voûte, de granit également, affectant la forme classique du style roman. Les pierres sont bien taillées et réunies par un excellent mortier. La voûte est intacte ; elle est un peu surbaissée. La largeur de la porte est de 0m90. La hauteur atteint un mètre.

    Cette entrée de souterrain est à signaler. Il convient de la rapprocher de celle de la grotte cachette ou souterrain de la Brunetière, à la Roche-sur-Yon (Vendée), qui lui ressemble point pour point (3).

    En arrière de la porte, on remarque l’emplacement de gonds aujourd’hui disparus.

    b) Couloir maçonné. – Cette porte, passée on pénètre dans un couloir voûté avec des pierres et muré sur ses côtés. Ce couloir a 3m50 de longueur et 1m50 de largeur. A gauche, en entrant, existe une petite niche, maçonnée, à un mètre de la porte, dans le mur, à un mètre du niveau du sol. Cette niche fait 0m70 sur 0m70. Elle atteint un mètre de profondeur (4).

    Le sol du couloir va en descendant ; la pente fait bien 25/100. Au bout d’un mètre on peut se relever et se tenir franchement debout.

    Le couloir est droit et presque dans l’axe de la porte.

    c) Escalier. – Après ce couloir, on remarque, de suite, un escalier. Il fait 4 mètres de longueur, 1m80 de largeur, 1m50 de hauteur, au début, en bas, il atteint 2 mètres.

    On compte sept marches taillées dans une granulite très dure. Ces marches sont assez irrégulières, quoique bien creusées.

    L’escalier dévie vers le Nord et n’est plus dans l’axe du corridor. Les parois sont taillées dans la granulite, la voûte est romane, de grande dimension.

    Le château de Puy-Guyon (3° partie)....

    Fig. 1. –Plan schématique du souterrain de Puy-Guillon (D.S.). – Echelle : 5/1000. – légende : P. Porte romane ; - C. Couloir maçonné et voûté de pierres ; - E, Escalier ; - D, Diverticule ; - Ch. Chambre : - T, Trou dit acoustique ou d’air ; - N, Niche ; - M, Mur du château.

    II. Souterrain proprement dit. – La dernière marche descendue nous sommes dans le refuge. C’est une vaste chambre, irrégulièrement ronde, faisant 7 mètres de long, sur 3m50 de large, dimensions prises dans les plus grands axes. A gauche, cette chambre est flanquée d’un diverticule que nous étudierons tout d’abord (Fig 1).

    A 0m50 du sol, dans la paroi latérale, on remarque un orifice rond, faisant 1m10 de diamètre, épais de 0m40 à peu près. Cet orifice franchi on tombe dans une chambre ronde, de 1m10 de hauteur et de 1m70 de diamètre. La même se trouve, dans les mêmes dispositions, aux souterrains de l’Oudrière et de la Haute-Fosse. C’est un poste de sentinelle (Fig. 1 ; D).

    Sortons du repaire D ; nous pénétrons dans la grande chambre, qui est très vaste et fait 1m60 de hauteur. La voûte est hardie et fort solide, plutôt romane. Dans les parois rien de particulier, sauf une prise d’air ou un trou acoustique au fond. Il est difficile de se prononcer.

    Le plans que nous donnons (Fig. 1) permet de se rendre compte de la disposition exacte du souterrain ; nous n’insistons pas davantage.

    Généralités.- La longueur totale est de 17 mètres. La partie la moins large est la porte de l’orifice du diverticule ; la plus large est dans la grande chambre. Le souterrain est suffisamment haut pour qu’on puisse se tenir debout, sauf à l’entrée et dans le diverticule.

    La capacité est assez considérable et un nombre relativement assez grand de personnes peuvent y séjourner, une vingtaine par exemple, au maximum.

    Le souterrain a très certainement été creusé à la tige-pointe comme la plupart des refuges du bocage ; l’escalier avec l’aide d’autres instruments.

    Le sol est extrêmement résistant et le tout d’une grande solidité. Le chaple est presque aussi dur que du rocher.

    Fouilles. – Aucune fouille n’est possible ; il n’y a pas d’éboulis ; le souterrain est presque dans le même état qu’au début.

    Date de fondation. – La porte est romane ; le couloir aussi ; pas de doute à ce sujet !

    Mais le souterrain proprement dit est bien plus ancien ! Ce n’est qu’après coup que ces constructions de pierres sont venues se joindre au refuge et en modifier l’entrée primitive. Il y a eu là une série indéniable d’utilisations successives ; le cas est fréquent en l’espèce.

    L’escalier lui-même a pu être fait après coup. En tous les cas, il a dû remplacer une pente assez forte et ne semble pas avoir été uniquement creusé, avec les mêmes outils qui ont servi à forer le refuge.

    Les traces de tige-pointe ne sont pas nettes du tout.

    L’escalier et la porte sont sans doute de la même époque, c’est-à-dire du XI° au XII° siècle probablement.

    Mais le fond du refuge est bien plus vieux. Le diverticule de gauche est une preuve, car il n’a aucun rôle, si l’escalier large et haut existait au début. Cet escalier a dû être fait, en élargissant le conduit du côté droit. L’examen de la voûte semble plaider en faveur de cette hypothèse.

    Le souterrain proprement dit a tous les caractères habituels des vieux souterrains du pays, bien que plus petit, avec son poste de sentinelle et son trou acoustique. C’est une grotte artificielle, dissimulée, construite sur une hauteur pour surveiller la vallée ; c’est un poste d’observation, qui a précédé toute construction de pierres.

    Un souterrain est voisin, celui de Montboisé, que nous avons étudié et fouillé (4). Nous avons pu le dater d’une façon presque certaine, trouvailles en mains, du V° ou VI° siècle. Le souterrain du Puy-Guillon, sans doute, est la même époque, sauf sa première partie. »

     

    Notes :

    (1)  Nous avons eu dans les mains un ouvrage concernant la Vierge Miraculeuse de Beauchêne, bourg voisin du vieux Château de Puy-Guillon. Il y avait des notes intéressantes sur les seigneurs de Puy-Guillon, dont la famille, depuis longtemps, ne possède plus le château ni les terres.

    (2)  Le souterrain de l’Oudrière est dans la commune de Saint-Mesmin, en Vendée ; nous le publierons plus tard.

    (3)  Dr Marcel Baudouin. – La Grotte cachette ou souterrain de la Brunetière, à la Roche-sur-Yon (Vendée). – Malines, 1911, 13 p., 18 fig.

    (4)  A la Haute-Fosse, on remarquait, à l’entrée, une niche pareille (Cf. Dr Boismoreau et L. Rousseau. Découverte, étude et description du souterrain-refuge de la haute-Fosse, commune de Mouillerons-en-Pareds (Vendée). – Bulletin de la société préhistorique française, 1912).

     

    ***

     

    C’était là, l’ultime étape de notre visite de Puy-Guyon. Il aura d’abord fallu couper la végétation qui obstruait en partie l’entrée du souterrain puis, marcher sur une corniche de terre longeant l’ancienne muraille du château. L’entrée est là, trou noir béant. Le porche s'est effondré en 2012, suite à des infiltrations d'eau.

    Le château de Puy-Guyon (3° partie)....

    Le château de Puy-Guyon (3° partie)....

    Reste de l’entrée en plein cintre, tombé dans la végétation.

    Le château de Puy-Guyon (3° partie)....

    Il faudrait créer un moule pour remonter les voussoirs, chantier qui ne serait probablement pas simple et sûrement pas l’œuvre d’un homme seul.

    Deux cavités carrées encadrent l’entrée principale à l’extérieur

    Le château de Puy-Guyon (3° partie)....

    Une fois dans l’entrée, on remarque une niche sur la gauche dont la position est curieuse. Il s’agit visiblement d’une archère mais bouchée, elle ne donne qu’à l’intérieur de la muraille. Que peut-il y avoir à l’intérieur de cette muraille ? Se peut-il qu’il y ait des pièces murées ? La chose laisse un peu rêveur…

    Le château de Puy-Guyon (3° partie)....

    Traces des gonds et de la fermeture d’une ancienne porte :

    Le château de Puy-Guyon (3° partie)....

    Nous descendons à présent une pente abrupte et l’escalier décrit par le docteur Boismoreau est plutôt sommaire. Il n’y a plus guère de traces de marches que sur les côtés et il faut descendre prudemment, de peur de faire tout le parcours sur les fesses.

     Le château de Puy-Guyon (3° partie)....

     

    Il faut allumer rapidement les lampes spéléo pour découvrir la niche à gauche au bas de l’escalier. Ici, un homme pouvait se cacher et trucider à son aise ce qui se présentait.

    Le château de Puy-Guyon (3° partie)....

    Le château de Puy-Guyon (3° partie)....

    Nous arrivons rapidement au fond du boyau. Les travaux de creusement semblent s’être arrêtés brutalement. Contrairement à la description du docteur Boismoreau, on ne tient plus debout aujourd’hui dans la salle. Je fais 1.80 m et je devais courber la tête. Beaucoup de poussière de remblais jonche le sol, à travers diverses pierres.

    Le château de Puy-Guyon (3° partie)....

    Le château de Puy-Guyon (3° partie)....

    Une chauve-souris nous tient compagnie :

    Le château de Puy-Guyon (3° partie)....

    Il faut à présent remonter vers la lumière du jour et reprendre l’escalier taillé à même la roche :

    Le château de Puy-Guyon (3° partie)....

    Ainsi s’achève cette petite aventure à Puy-Guyon. Afin d’éloigner toute tentative de curieux plus ou moins bien intentionnés, voleurs de pierres, chasseurs de trésor et illuminés en tout genre, je tiens à signaler que le lieu est privé et fermé au public.

     

    RL

    Décembre 2017

      

     

     


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